La cérémonie des Ig Nobel, calembour américain pour « ignoble », a remis ses prix parodiques, pour la 24e édition. Une occasion de célébrer une science en délire – véritablement délirante – et qui n'apporte de remède qu'à une morosité ambiante. Les découvertes sont toutes plus absurdes les unes que les autres, comme il se doit, mais l'une d'entre elles mérite d'être considérée un instant. Parce que les scientifiques, définitivement, ne respectent rien.
Le 20/09/2014 à 13:15 par Nicolas Gary
Publié le :
20/09/2014 à 13:15
"Houlàlà, je vais encore tomber..."
(Les blondes, Editions Soleil)
Les prix sont stupides, mais les inventions ne le sont pas moins. Considérer que pour arrêter les saignements de nez, on peut appliquer l'emballage de tranches de porc cuit, voilà qui méritait d'être porté à l'attention du public (Médecine). Une équipe de chercheurs s'est demandé si avoir un chat était bon ou mauvais pour la santé mentale – et la réponse n'est pas forcément dans la question (Santé publique).
D'autres ont choisi de vérifier si les gens en retard sont bel et bien plus manipulateurs, narcissiques et psychopathes que les gens à l'heure (Psychologie). Certains se sont déguisés en ours polaires pour éprouver la réaction des rennes en Arctique... Bref, on le constate, tout cela ne se prend pas au sérieux, même si les expérimentations sont sérieusement faites...
Autre chose, plus épatante : il existe un lien vérifiant l'efficacité de remèdes populaires, présentés dans les contes de fées, pour certains problèmes médicaux graves, selon les conclusions de l'équipe du Detroit Medical Center.
Mais revenons un instant sur le prix de Physique, attribué aux Japonais Kiyoshi Mabuchi, Kensei Tanaka, Daichi Uchijima et Rina Sakai. Ces derniers ont souhaité s'intéresser au frottement qui s'exerce quand une chaussure rencontre une peau de banane, que ladite peau est posée sur le trottoir, et que le pied de la personne dans la chaussure marche sur ladite peau. Fascinant.
Et ça "marche" aussi avec des palmes en guise de pieds
Ce gag, qui compte probablement parmi les plus anciens au monde, était alors passé au crible de la science, et Kiyoshi Mabuchi, un professeur de génie biomédical à l'Université Kitasato au Japon, s'est donc consacré à cet examen. « J'ai obtenu la preuve que la friction de la peau de banane est suffisamment faible pour que nous glissions », conclut-il vaillamment. Le très sérieux de l'étude est disponible ici.
Et, autre conclusion non moins scientifique : lui et son équipe ont dévoré quantité de bananes pour parvenir à cette conclusion. Apanage du cinéma muet, de Buster Keaton et de tant d'autres, le gag de la banane est donc tout à fait légitime, et fera rire du malheur d'autrui, désormais fort d'une caution scientifique...
Quant aux chats, les propriétaires n'ont aucune raison de paniquer. Le Dr Davir Hanauer, de l'université du Michigan, service de pédiatrie, promet que le chat ne provoque pas de dépression. C'est simplement que les dépressifs s'accommodent de la présence d'un chat, compagnon agréable pour leurs moments de mélancolie. Baudelaire aurait applaudi des deux mains.
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