Information ActuaLitté : Désormais, Najafi met en place les actions annoncées en début d'année. Le repreneur de DirectGroup France, devenu Actissia depuis le rachat, avait de grands projets pour les sociétés Chapitre, France Loisirs et consorts. Mais peu de moyens à mettre : en effet, Najafi avait clairement annoncé qu'aucun investissement ne serait réalisé pour assurer la croissance d'Actissia. Amusant, parce que les solutions ne manquent en effet pas...
Le 26/09/2012 à 17:29 par Clément Solym
Publié le :
26/09/2012 à 17:29
En janvier dernier, ActuaLitté dévoilait les projets de la structure : « La proposition est simple : revendre 55 % des magasins aux salariés, sous la forme de franchises, et Actisissia conservera 45 %. Cela permet d'utiliser l'argent des salariés pour continuer à alimenter les résultats de Najafi », expliquait en effet la CGT Chapitre. (voir notre actualitté)
Vendre, pour mieux se dégager ?
La présentation d'un projet de vente des enseignes du groupe faisait frémir, alors que le site internet va connaître un grand ravalement de façade et de fonctionnalités - mais que rien n'allait être fait pour les établissements physiques. Le projet de développement était simple : inviter le directeur de chaque librairie Chapitre à prendre une participation dans l'établissement, en rachetant à Najafi 55 % de l'entreprise. Bien entendu, le fonds d'investissement conservait 45 %, mais il était possible, pour les salariés, de prendre une participation à la hauteur de 5 % maximum.
Un accord liera d'ailleurs le racheteur à Actissia durant trois années, avec quelques subtilités. En effet, selon des sources syndicales, nous apprenons que Actissia sera en mesure de se retirer de l'accord, avant les 3 ans, en contraignant le repreneur à racheter l'intégralité des 45 %. Mais comme les temps sont durs et que les banques prêtent moins, Actissia a également prévu d'être tout à la fois juge et partie. Durant les trois ans, de fait, l'acheteur est lié à Actissia concernant les livraisons de livres et les commandes. Un système d'ailleurs dénoncé comme lourd et coûteux, mis en place par Jorg Hagen, le patron d'Actissia.
Ainsi, le repreneur pourra acheter à Actissia les 55 % de la structure, le fonds d'investissement a déjà mis en place un programme de prêt, pour pallier la défection dans banques en ces périodes difficiles. Actissia devient alors banquier et vendeur du bien. De quoi profiter en effet de l'ensemble des structures implantées, sans verser le moindre euro, tout en assurant une croissance économique de la société.
Contacté par ActuaLitté, Actisia souhaite toutefois rétablir plusieurs points. Tout d'abord, « il ne s'agit pas d'une politique de « franchisation », les critères d'une franchise ne correspondant pas du tout à ce que l'on propose, mais bien d'une proposition (n'ayant pas de caractère obligatoire, donc) de prise de participation majoritaire faite au personnel des librairies ». Par ailleurs, plusieurs des informations que nous avions avancées en janvier étaient imprécises, souligne la société.
Une expérimentation hasardeuse
Reste que la CGT exprime une réelle colère : les librairies seront bel et bien à vendre, avec le magasin de Rennes pour commencer puis ceux de Lorient, Nancy, Saint-Brieuc, Grenoble, Angoulême, Dax, Julliard et Sarreguemines. Selon les syndicats, l'intention de Najafi, qui n'a jamais caché qu'aucun euro ne serait investi, est bien de ne pas payer de Plan de Sauvegarde de l'Emploi. Et ainsi, d'habiller les licenciements sous couvert d'une nouvelle politique - celle de la vente des établissements.
À ce titre, souligne-t-on, un nouveau directeur des ressources humaines a été engagé, Jean-Louis Vidot, ancien de l'AFP, qui avait opéré un plan social concernant près de 80 personnes, en 2010. Les syndicats sont alors inquiets des implications entraînées par l'arrivée de ce DRH... Or, la direction, citée par la CGT, avait clairement posé que le fonds d'investissement n'avait pas les moyens d'assurer un PSE, ajoutant, en juillet dernier, que des procédures de fermeture de librairies étaient prévues pour fin 2012.
Ce 25 septembre, une rencontre entre les organisations syndicales et Actissia a eu lieu, où fut présenté le projet de développement numérique. « On va travailler sur le numérique, les ebooks et les tablettes, c'est certain. Et puis, au passage, on va même inventer un réseau social du livre - alors que d'autres libraires s'y sont lancés, sans résultats probants. Mais surtout, c'est l'avenir des librairies qui est menacé, clairement », nous précise une personne présente durant cette réunion.
L'indépendance tous risques
Yorg Hagen, le PDG, se serait fendu d'un commentaire assassin, expliquant « pour moi en 2013 la crise économique va s'aggraver, le taux de chômage va dépasser 10%, les sociétés françaises vont retenir leurs investissements, Internet va fortement progresser, le secteur industriel dans lequel nous travaillons va voir une baisse de son activité et le chiffre d'affaires des éditeurs va baisser ». Mais alors, s'interrogent les syndicats, comment une librairie devenue indépendante pourra-t-elle faire face, quand un groupe ne pourrait pas supporter la future crise ?
La CGT n'a de cesse de demander à notre direction de laisser nos magasins autonomes dans le choix des produits et dans leur décision, mais cette autonomie doit rester dans le cadre de l'UES ChaPitre permettant ainsi aux salariés de préserver des garanties sociales qui seraient, de fait, perdues sans l'UES. La direction reconnaît que c'est la bonne solution mais elle refuse son application montrant ainsi une volonté très claire de couler nos magasins !! Pour notre direction l'avenir c'est Internet et non pas les magasins.
Enfin, l'une des dernières informations, concernerait la numérisation des ouvrages, dont Chapitre prend en charge la réalisation. Alors qu'une société basée dans le Nord de la France se chargeait de cette opération, Actissia aurait à l'esprit de diminuer les coûts de production. Ainsi, c'est vers le Cambodge que l'activité se délocaliserait. Le site français aurait encore un peu de travail sur ce point, mais qui diminue à vue d'oeil. Une information que nous ne sommes pas encore parvenus à confirmer - mais qui semble conforme à l'ensemble du projet.
Vendredi va se tenir un Comité d'entreprise exceptionnel, pour définir le cadre de la vente pour la librairie de Rennes. Nous devrions obtenir plus d'information en fin de semaine.
Les précisions de Actissia
Actissia nous a fait parvenir plusieurs explications sur le projet, afin de donner une vue d'ensemble, telle que la société l'envisage. Nous le reproduisons ici, sans modifications :
La proposition de prise de participation des libraires dans les librairies du réseau a été présentée aux équipes au début de l'année. Quant à la participation des salariés, l'idée est de céder une partie du capital est fondée sur une idée qu'il y a des forces chez les libraires indépendants, mais qu'ils ont aussi des difficultés auxquelles un réseau peut offrir des solutions. En gros, il s'agit de faire un « bon mariage ». Et ce, avec deux composantes essentielles :
Concrètement le projet se fait sur la cession de 55% des parts aux Directeurs de magasin, dont une partie doit être proposée aux collaborateurs de la librairie. Ensuite, un dossier est constitué par le candidat repreneur, dans lequel il présente, entre autres, son business plan ainsi que tous ses engagements concernant le personnel. Un organisme indépendant est chargé d'accompagner le candidat repreneur dans son entreprise. Un accompagnement financier est également prévu et défini au cas par cas en fonction des besoins et des capacités du magasin. Si le business plan n'est pas viable, le projet est refusé et la librairie reste dans le réseau. Et quoi qu'il en soit, Chapitre garde 45% dans la librairie pendant au moins trois ans. A l'issue de ces trois ans, la librairie pourra décider de prendre son indépendance. En revanche Actissia ne pourra pas obliger la librairie à racheter ses parts, ni avant les trois ans ni après.
Ainsi, l'idée est faire un « mariage » réussi : proposer aux libraires des services supports (marketing, relation client, logistique, etc) et d'inscrire ce modèle dans la durée. Pendant ces trois ans, le libraire aura donc le loisir de tester la palette de nos services, l'idée étant qu'il soit convaincu et décide de continuer à les utiliser après les 3 ans.
Le système proposé par Chapitre est donc une troisième voie, entre une librairie indépendante et un réseau complètement intégré, pour répondre au changement radical du marché et à la nouvelle forme de commerce. Nous croyons à ce projet, raison pour laquelle nous proposons les mêmes services à des librairies indépendantes extérieures au groupe.
En ce qui concerne les nominations, Pascal Maume a en effet été nommé Directeur général des librairies Chapitre au mois de février dernier (il était depuis 2009 Directeurs de l'exploitation des librairies). Il a en même temps intégré le Directoire afin d'assurer une meilleure représentation des librairies. C'est donc la première fois que le réseau est représenté au Directoire.
Jean-Louis Vidot a intégré l'entreprise au mois de juillet et a été nommé au Comité de Direction des librairies. Cela correspond à l'évolution de notre stratégie de structuration des différentes divisions. Nous avons maintenant des comités de direction pratiquement complets au sein de chaque division du groupe (pour rappel, il y en a 4, une rassemblant toutes les activités « Club » du groupe, la deuxième rassemblant le réseau des librairies, la troisième les activités internet et ebook, la dernière proposant tous les services logistiques, service clients et de numérisation du groupe).
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