L'Éducation artistique et culturelle compte parmi les chevaux de bataille de la ministre de la Culture. En marge d'un colloque qui se déroulait ce 23 juin au Sénat, Aurélie Filippetti est revenue sur cette notion, inscrite dans l'ADN de son ministère - et présenté avant même qu'elle n'occupe la rue de Valois. L'EAC « n'est pas une action ponctuelle. Mais plutôt un engagement au long cours », explique-t-elle.
Le 24/06/2014 à 12:25 par Cécile Mazin
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24/06/2014 à 12:25
EAC, un acronyme magique ?
Trois piliers justifiant l'engagement avec le ministère de l'Éducation nationale, sont au centre de l'EAC «l'enseignement, la rencontre avec les œuvres et la pratique artistique et culturelle». Avec pour projet de « donner aux élèves un autre regard sur le monde, leur proposer d'autres expériences sensibles, c'est aussi leur donner une chance de prendre ou reprendre confiance en eux-mêmes », insiste la ministre. Du côté de l'enseignant, également sollicité, c'est une ouverture vers l'élève, et la découverte d'autres qualités, dans une relation qui permettrait d'instaurer «des conditions favorables à la réussite scolaire».
Chose particulièrement intéressante, la ministre détaille plusieurs types d'opérations « nombreuses et toutes différentes », qui entrent dans le domaine de l'EAC.
Souvent, il s'agit des rencontres inédites comme en témoigne le récent premier Prix de l'audace artistique et culturelle remis par François Hollande à l'Élysée.
Avec Kid Birds , un enseignant et un intervenant extérieur – un danseur et chorégraphe- initie ses élèves de CE2 et CM1 à la danse contemporaine à travers l'œuvre Beach Birds de Merce Cunningham. Ce projet est d'une grande force parce qu'il confronte les élèves à l'œuvre elle-même. Ils se l'approprient et créent ainsi leur propre démarche artistique.
D'autres dispositifs à l'échelle nationale concernent des millions d'enfants, comme École au cinéma , où sur tout le territoire des élèves de tous les cycles, participent à la découverte du 7e art via des projections de films, mais aussi à travers des rencontres avec des techniciens, des acteurs et des réalisateurs.
C'est le cas aussi de Premières pages , une opération initiée par le ministère de la Culture et de la Communication qui a pour but de sensibiliser les plus jeunes enfants et leurs familles notamment les plus fragiles et les plus éloignées du livre à l'importance de la lecture, dès le plus jeune âge.
Ou encore, La Classe, l'œuvre , proposée pour la deuxième année dans la cadre de la Nuit européenne des musées qui rapproche écoles, établissements scolaires autour d'une œuvre. Autant de possibilités pour l'élève d'une rencontre intime avec l'art et la culture.
De quoi j'me MEL ?
Toutes ces manifestations seront autant d'indicateurs pour la Maison des Écrivains et de la Littérature, ou MEL. L'association, qui fêtera en 2016 ses 30 ans d'existence, rencontrait quelques problèmes dans l'obtention de sa subvention auprès du CNL. Le budget alloué avait été diminué de 5 % pour plusieurs organismes financés par le Centre, mais la MEL voyait son aide également diminuée, parce que l'ensemble de ses activités ne répondait pas aux critères de l'EAC.
« À ce jour, 442.300 € sont réellement investis dans ce domaine. Mais ni les Rencontres ni les Enjeux [deux manifestations initiées par la MEL, ndr] ne répondent aux critères de l'EAC. Pour financer les manifestations littéraires, le Centre dispose d'une commission Vie littéraire chargée justement d'attribuer des aides », nous précisait Vincent Monadé, président du CNL. Il est donc proposé à la MEL de présenter un dossier à cette commission, pour mieux rentrer dans les cadres des financements que dispense le Centre.
La semaine passée, la MEL avait eu l'occasion de rencontrer ses partenaires financeurs - le CNL, la Mairie de Paris, la Région Île-de-France, ainsi que le ministère de l'Éducation nationale - et par la suite avait eu un rendez-vous privilégié avec le ministère de la Culture. « Entendre que ce que nous faisons était totalement dépassé n'avait rien d'agréable », relevait Sylvie Gouttebaron, la directrice de l'association.
EAC pour collège et lycée, uniquement
Au terme des échanges, elle notait que le ministère « était d'accord pour mener une réflexion avec la MEL autour de l'EAC. C'est très appréciable. Mais nous avons dans le même temps l'impression qu'on nous demande de faire des efforts pour devenir une agence de placement d'auteurs dans les collèges et les lycées. Nous sommes d'accord pour être politiquement utilisés, au contraire, et pour devenir des opérateurs de l'État. Dans ce cas, que l'on commence par reconnaître notre travail, et que l'on nous accompagne mieux - et nous ne demandons pas de crédit supplémentaire ».
La directrice ajoute : « Voilà 27 ans, la Maison a été crée et avec le temps, est devenu un foyer pour les auteurs, qui s'y sentent comme chez eux. Aucun ne souhaite aujourd'hui devenir un auteur pour des classes. » Au terme des échanges avec le ministère, le périmètre de l'EAC aura été défini comme touchant aux classes primaires et secondaires, « l'université, c'est encore en réflexion pour le cabinet. Que la Maison et ses activités deviennent dignes d'intérêt, c'est une bonne nouvelle : nous ne travaillons désormais plus isolément. Mais on s'intéresse à nous et on nous demande quelque chose avec lequel nous ne sommes pas d'accord ».
Il est certain que le message de la ministre permettra de mieux définir les enjeux. « Avec le ministère de l'Éducation nationale, nous devons continuer à nous engager ensemble. Il faut aménager du temps dans les rythmes scolaires et périscolaires. Ce partenariat est la clef de voûte de la réussite de l'éducation artistique et culturelle. Autre point fondamental, nous devons mettre l'accent sur la formation. Celle en faveur des enseignants, et de l'ensemble des acteurs de l'éducation artistique et culturelle (acteurs de la culture et de l'éducation au sens large) pour inscrire durablement notre politique », conclut la ministre.
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