1 % des artistes auteurs touche 1/5 de l'ensemble des revenus artistiques
Le secteur artistique, libéral en diable, n'échappe pas aux inégalités en matière de revenus. Le rapport ministériel sur les chiffres-clés de la culture rappelle ainsi que la moitié des artistes-auteurs déclarent un revenu artistique inférieur à 15.800 € par an, soit, en moyenne, 1300 € environ.
Le 27/12/2021 à 15:02 par Antoine Oury
6 Réactions | 541 Partages
Publié le :
27/12/2021 à 15:02
6
Commentaires
541
Partages
Sans forcément proposer les chiffres correspondant à l'année écoulée, mais en s'efforçant de produire le panorama le plus actualisé possible, le ministère de la Culture a publié ses chiffres-clés 2021 du secteur de la culture.
Un point sur les artistes-auteurs y est proposé, concernant plus de 43.000 personnes affiliées à l’Association pour la gestion de la sécurité sociale des auteurs (Agessa) et à la Maison des artistes (MdA), qui gèrent toutes deux leur protection sociale. Photographes, peintres, graphistes, sculpteurs, dessinateurs, traducteurs, illustrateurs et auteurs s'y trouvent ainsi représentés.
Rappelons que, pour pouvoir être affilié, un artiste-auteur doit dépasser un certain seuil de revenus, fixé à environ 700 € pour leur activité d'écriture : environ 2500 auteurs de l'écrit seraient ainsi affiliés à l'Agessa.
On compte au sein de ces affiliés (toutes professions artistiques confondues) 57 % d'hommes, avec un âge moyen de 46 ans : les moins de 25 ans y sont sous-représentés par rapport à la population active, et les plus de 65 ans, surreprésentés.
En 2018, plus de la moitié des artistes-auteurs affiliés habitent en Île-de-France, mais le ministère note que les illustrateurs de l'édition sont beaucoup mieux répartis sur tout le territoire.
Une inégalité très forte des revenus pour les auteurs de l'écrit
En 2018, le revenu artistique annuel moyen des artistes-auteurs est de 29.800 € : il atteint 44.900 € pour les écrivains et dramaturges, 31.400 € pour les illustrateurs de l'édition, 23.000 € pour les traducteurs et 19.300 € pour les dessinateurs.
Le tableau ci-dessous présente aussi les revenus médians, sans aucun doute plus fidèles à la réalité de nombreux artistes-auteurs.
Ces revenus annuels moyens cachent bien sûr d'importantes inégalités. « 1 % des artistes-auteurs (soit environ 400 personnes) touchent des revenus artistiques supérieurs à 225 000 euros en 2018, se partageant ainsi un cinquième de l’ensemble des revenus artistiques de la population affiliée », note ainsi le rapport du ministère de la Culture. On compterait 69 écrivains au sein de ce « 1 % ».
Parmi les auteurs de l'écrit, 10 % des affiliés concentrent ainsi près de 60 % des revenus...
L'inégalité entre les femmes et les hommes, en matière de revenus, est très forte au sein des artistes-auteurs : « en moyenne, un homme artiste-auteur touche 35 000 euros de revenu artistique et une femme 22 000 euros en 2018, soit un revenu 1,6 fois plus élevé pour les hommes », indique le ministère.
COVID: des aides aux auteurs peu suivies
Si l'on considère les revenus médians pour les travailleurs de l'édition, les différences se comptent en milliers €, entre les revenus des hommes et ceux des femmes...
Photographie : illustration, Jeremy Segrott, CC BY 2.0
Plus d'articles sur le même thème
Autres articles de la rubrique Métiers
6 Commentaires
SamSam
28/12/2021 à 10:13
Le secteur de l'édition pour ne parler que de celui-la est un plus capitaliste, donc rien d'étonnant à voir des revenus minables pour l'immense majorité, et le pactole pour une poignée.
Normalement, en République, l'Etat tente de corriger, de supprimer les inégalités. Aujourd'hui, l'Etat est patron et encourage tt le grouspucule des riches exploiteurs à perséverer.
Le meilleur est le plus efficace vecteur de la progression de la précarité, et de la misère pour les gens de culture, c'est Bachelot et ses pareils.
Aradigme
28/12/2021 à 17:22
L'article indique: "Ces revenus annuels moyens cachent bien sûr d'importantes inégalités. « 1 % des artistes-auteurs (soit environ 400 personnes) touchent des revenus artistiques supérieurs à 225 000 euros en 2018, se partageant ainsi un cinquième de l’ensemble des revenus artistiques de la population affiliée », note ainsi le rapport du ministère de la Culture. On compterait 69 écrivains au sein de ce « 1 % »."
Mais l'article ne s'interroge pas sur la ou les causes de ces disparités. Les revenus d'un écrivain sont directement proportionnels au nombre de livres vendus autrement dit, de livres achetés par le public. Il n'est donc pas déraisonnable d'estimer que le 1% supérieur jouit de cette rémunération visiblement enviée simplement parce qu'il écrit des livres plus appréciés du public. Il possède ce que certains nomment du talent.
En son temps, Victor Hugo se classait au sommet des ventes et donc des revenus, tout simplement parce que personne d'autre n'était capable d'écrire comme Victor Hugo et que le public appréciait ses écrits. La qualité paie, et vouloir réduire les "inégalités" n'aura pour effet probable que de réduire la qualité globale des oeuvres produites.
Je ne vois pas pourquoi un scribouillard médiocre que personne n'a envie de lire serait en droit de convoquer l'action de la force publique pour récupérer fût-ce une parcelle des revenus d'un génie acclamé, sauf si celui-ci y a auparavant consenti.
Aehris
29/12/2021 à 13:05
Certes, mais il faut aussi prendre en compte le fait que le pourcentage du prix du livre reversé à l'auteur varie énormément selon les maisons d'édition. Des "gros" auteurs sont plus à même de négocier des taux très avantageux, tandis que les petits ne bénéficieront que d'un pourcentage ridicule.
Aheris
29/12/2021 à 22:32
Il faut être vraiment crédule pour considérer que les auteurs fêtés et grassement payés seraient des génies et méritaient réellement leurs privilèges. Ce sont au contraire le plus souvent des gros cakes, des gens qui, faute de talent, ont de l'entregent et un bon carnet d'adresse ou encore beaucoup de chance.
Un génie c'est Tchekov, Dostoïevski, Maupassant, Balzac, Camus, Dos Passos. Musil, Cioran...
Ce n'est pas Marc Levy ou Guillaume Musso...
Je reste comme vous plutôt au raz des paquerettes car je connais mal certain(e)s écrivains contemporains, qui sans vendre autant de bouquins que les deux commerciaux que j'ai cité, s'en sortent plutôt bien.
Mais, pour prendre un domaine que je connais bien, des propos comme les votres sont pitoyables. De Van Gogh à Bram van Velde, vous auriez fait une véritable hécatombe... Au profit des peintres pompiers qui toutes époques confondues ont toujours cartonné pour des raisons étrangères à la peinture (l'adresse, l'effet, la narration). Et vous l'auriez fait avec le plus grand aplomb nlmbé dans vos certitudes... un fanfaron en réalité, mais un fanfaron dangereux
Aradigme
07/01/2022 à 17:07
Bonjour Aheris,
Je crois que vous n'avez pas bien suivi ma démonstration. Ce que j'indique dans mon post, c'est que ceux qui vendent répondent à la demande du public. Ils ont ce talent qui peut parfois confiner au génie.
Il va de soi qu'ils répondent à la demande du public du moment, pas à celui qui existera dans un siècle ou deux, lequel, évidemment, ne les paiera jamais... Cela ne signifie donc pas qu'ils rédigent nécessairement des oeuvres immortelles (quoique pafois...) mais qu'ils se trouvent en phase avec leur époque et que c'est ce qui paie. Que l'époque soit "éclairée" ou pas est une autre question, qui évoluera elle aussi avec le temps. Mais arriver à flairer la demande de son époque et à la transformer par l'écriture en espèces sonnantes et trébuchantes constitue pour moi un véritable talent que tous ne partagent pas et certains écrivains se montrent géniaux dans ce domaine.
Pour répondre à votre comparaison, les peintres pompiers étaient très appréciés de leur temps, non pas tant pour leur carnet d'adresse que parcequ'ils correpondaient à leur époque. Ils livraient au public les produits attendus, ce qui n'était pas le cas de Van Gogh.
Ce dernier est apprécié par les décideurs de la peinture de nos jours. Cela sera-t-il encore vrai dans deux siècles? Pas nécessairement, car il n'existe pas de valeur absolue de la peinture, pas d'échelle objective de la qualité d'une oeuvre. Il n'existe qu'un ressenti culturel, lequel peut changer.
Salutations
Aradigme
Hector
29/12/2021 à 22:53
L'argument du talent est celui qui est toujours rabâché aux artistes auteurs qui osent réclamer une juste rémunération de leur travail.
Tout d'abord vous noterez que le succès des ventes et le talent n'ont pas de rapport. Les exemples d'artistes au talent aujourd'hui incontesté qui n'ont pas été reconnus par le public, ni même la critique, sont très nombreux. A l'inverse vous serez peut être d'accord avec le fait que des œuvres, et des livres pour reprendre votre exemple, sont des best-sellers sans qu'ils soient d'une qualité exceptionnelle. Je vous mets au défi de m'affirmer ici que tous les livres s'étant vendus autant que ceux de Victor Hugo sont aussi brillants.
(Par ailleurs, comparer la situation actuelle et celle du 19e siècle me semble pour le moins inadéquat.)
De toute la chaîne du livre, les auteurs sont ceux qui ont le plus couramment recours à un job "alimentaire" pour compléter leur revenus, lisez le rapport Racine à ce sujet. Les autres corps de métier vivent de leur travail (parfois chichement mais tout de même). Libraires, imprimeurs, diffuseurs et éditeurs se retrouvent plus rarement à devoir trouver d'autres sources de revenus pour boucler les fins de mois.
Comment expliquer alors que tant de monde parvienne à vivre de la vente de livres, sauf ceux qui en sont à la source? Peut être que la répartition des droits de vente n'est alors pas tout à fait équitable. Et allez négocier celle-ci quand toute la profession est dans la même situation que vous et que votre métier est par nature solitaire.