Ada d’Adamo a remporté la 77e édition du prix Strega, l’équivalent italien du Goncourt, pour son livre Come d’aria (Elliot). Un livre puissant et délicat à la fois, une lettre d’amour d’une mère à sa fille souffrant d’un grave handicap. Et pour la première fois, la lauréate était absente.
Le 09/07/2023 à 09:11 par Federica Malinverno
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Il s’agit d’un prix posthume : l’écrivaine et essayiste est décédée à la suite d’une grave maladie le 1er avril de cette année, à l’âge de 55 ans. Deux jours après l’annonce de son inclusion dans la douzaine (« dozzina ») de titres demi-finalistes du prix Strega.
Ada d’Adamo est la quatrième lauréate du prix Strega à titre posthume : avant elle, Giuseppe Tomasi di Lampedusa, avec Il Gattopardo, en 1959 ; Maria Teresa Di Lascia, pour Passaggio in ombra, en 1985 ; et Maria Bellonci, qui créa le Premio Strega en 1947 et le reçut pour Rinascimento privato en 1986.
Le prix a donc été remis au mari de l’écrivaine, Alfredo Favi, accompagné de l’éditrice Loretta Santini et de l’écrivaine Elena Stancanelli.
Cette victoire contredit le classement établi par les jurés le 7 juin à Bénévent, lors de l’annonce des cinq traditionnels titres finalistes (« cinquina ») : c’était alors Rosella Postorino qui était en tête avec Mi limitavo ad amare te (Feltrinelli), qui avait initialement remporté 217 voix contre 199 pour d’Adamo.
Voici donc le classement final : 185 voix pour Ada d’Adamo ; 170 pour Rosella Postorino ; 75 à Andrea Canobbio pour La traversata notturna (La nave di Teseo) ; 72 à Maria Grazia Calandrone pour Dove non mi hai portata (Einaudi) ; 59 à Romana Petri pour Rubare la notte (Mondadori).
Il s’agit, comme l’ont souligné certains critiques et journalistes italiens, d’œuvres qui relève principalement de la biographie ou de l’autobiographie – ce qui laisse supposer un attrait particulier pour les histoires tirées du réel de la part de la fiction italienne contemporaine.
Le livre lauréat, refusé par 10 éditeurs, a finalement été publié par Elliot, une petite maison d’édition fondée à Rome en 2007. Il avait déjà remporté le vote des jeunes jurés de 91 écoles secondaires qui composent le jury du Premio Strega Giovani. Come d’aria — dont le titre évoque le nom de la fille de l’autrice Daria — est la lettre d’amour d’une mère à sa fille adolescente handicapée dès sa naissance par une maladie cérébrale.
Daria, fille dont le destin est tracé dès sa naissance suite à une omission de diagnostic. Ada, mère qui, au seuil de sa cinquantaine, se tombe malade. Un mal qui deviendra l’occasion pour elle de se révéler en toute franchise à sa fille, de lui raconter ce qui les lie. Chaque événement est vécu à travers les chairs d’Ada et Daria : le labeur quotidien, la fureur, les secrets, mais également les allégresses imprévues et les instants d’une tendresse sans borne. Les paroles naviguent à travers le temps, dans un entrelacs ininterrompu entre le passé et le présent.
Dans ces mémoires à la fois puissantes et délicates, l’autrice raconte le rapport à sa fille et partage certains de ses doutes sur d’importantes questions sociales, comme l’avortement et les droits de la femme. « J’espère que le livre d’Ada sera utile à ceux qui se trouveront malheureusement dans sa situation, qu’il leur permettra de se sentir moins seuls », a déclaré Loretta Santini, directrice éditoriale d’Elliot, au Corriere della Sera, 7 juillet 2023.
En effet, le livre raconte les difficultés, la solitude et le malaise des parents qui s’occupent quotidiennement d’enfants handicapés dans une société qui — à travers les écoles, les hôpitaux, les structures d’aide sociale — n’accorde pas toujours autant d’attention et de soin aux familles des enfants handicapés.
Un livre courageux, intime et social à la fois, qui parle d’une histoire très privée mais capable d’émouvoir de nombreux lecteurs.
Crédits photo : Premio Strega
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