La littérature francophone perd l'une de ses plumes : l’écrivaine Yun Sun Limet est décédée ce lundi 17 juin 2019 des suites d’un long combat contre une maladie génétique, à l’âge de 51 ans. L’écrivaine belge était notamment l’auteure du roman Joseph, nommé pour le prix Victor-Rossel.
Le 18/06/2019 à 10:22 par Heulard Mégane
Publié le :
18/06/2019 à 10:22
Née à Séoul en 1968, elle fut adoptée par une famille en Belgique, où elle fit ses études. Devenue docteur en lettres de l’université catholique de Louvain et de l’université Paris-VIII, elle s’installa par la suite en France, dans la Manche, pendant presque dix ans.
En parallèle du secteur de l’édition dans lequel elle travaillait, elle était également, selon ses proches, une écrivaine empreinte d’une sensibilité et d’une luminosité rares. Spécialiste de la littérature du XXe siècle, elle écrivit plusieurs essais sur de célèbres écrivains et romanciers. Notamment Maurice Blanchot critique paru aux Éditions de La Différence en 2010, et Cioran et ses contemporains paru aux Éditions Pierre Guillaume de Roux en 2011.
Elle habitait en France avec son mari Vincent Fleury, neurobiologiste et écrivain, et ses deux enfants depuis plusieurs années. C’est à ce moment-là qu’elle écrivit son titre Amsterdam, paru aux Éditions de l’Olivier en 2006.
En tant que romancière elle était particulièrement connue pour ses ouvrages : 1993 paru aux Éditions de la Rue de Russie en 2009, et surtout Josephparu aux éditions de La Différence en 2012. Ce dernier a notamment reçu le Prix Marianne.
Yun Sun Limet dirigeait également avec Jean-Claude Mary La Nouvelle Revue pédagogique chez Nathan, et elle était membre du comité de rédaction du site littéraire remue.net fondé par François Bon.
Un résumé de son titre Joseph :
Comment combler l’absence ?
Une voix, une simple voix sur un magnétophone à bandes ; un chant venu des lointains souvenirs d’une famille meurtrie par la perte prématurée de Joseph. En brossant le portrait de cet homme charismatique, doux, affable et apprécié de tous, son oncle, Yun Sun Limet lui donne un deuxième souffle. Ce récit se fait l’écho d’une voix mineure, presque anonyme. Yun Sun Limet s’efface pour dépasser son histoire familiale et toucher le lecteur là où la douleur vient se nicher : le souvenir de la mort transformant une vie qui, plus jamais, ne sera la même.
Aux détours du texte, c’est un portrait en creux de la Belgique, de la Seconde Guerre mondiale aux années soixante, qui est dressé. Bien plus qu’une page d’histoire, c’est un questionnement perpétuel sur l’altérité, notre rapport au monde et notre propre passé.
Et un extrait :
« Il s’appelait Joseph. Il avait vingt ans. Je ne savais rien de lui. Je découvrais son existence à travers ce grésillement sur une bande qui passe lentement d’un essieu à l’autre, les deux roues du magnétophone faisant ce trajet immobile vers le passé, et, je l’apprenais, sans comprendre, vers la douleur. Pas un jour sans que je pense à lui, a dit plus tard mon père. Pas un jour. Qui était-il ce fantôme, cet inconnu chantant dans le noir d’un enregistrement sans image ? Je me souviens de cette voix, de ces sons qui créaient une scène, un homme chantait devant un auditoire de jeunes gens, mais je ne pouvais rien me figurer. Oui, tout cela restait noir à mes yeux. Une nuit enveloppait l’image qui se dérobait. Plus tard, on m’a dit. Je ne sais plus comment s’est fait le retour à la maison, mes grands-parents muets à l’arrière de la voiture. Ils l’avaient bien connu aussi. Ils l’avaient même connu avant ma propre mère. Déjà à l’époque, il avait fait parler de lui. La légende le précédait. »
Via Ouest-France
Yun Sun Limet — Joseph — éditions de La Différence — 9 782 729 119 683 — 17,00 €
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