Pas certain que ce fut au cœur des discussions entre le président Emmanuel Macron et le secrétaire d’État américain Rex Tillerson. Justice League, censuré au Liban ? Oui, mais pas si simplement. Quand on évoque le pays et sa situation politique critique, on pense aux mesures de censure prises. Si elle peut arriver, la relance du pays par le Premier ministre Saad Hariri passe-t-elle nécessairement par des politiques culturelles alimentant les animosités ?
La Justice League, au grand complet
Alors qu’il explose manifestement les box-offices, le film Justice League vient donc d’être interdit sur le territoire libanais. La raison n’est pas bien compliquée et ne repose pas même sur une tentative de résistance à l’invasion américaine type “non au Coca Cola”. Une fois encore, c’est la présence de Gal Gadot, actrice originaire d’Israël, qui met le feu aux poudres dans les salles.
Dans son rôle de Wonder Woman, l’actrice avait déjà vécu une première campagne de censure, lors de la sortie du premier film. C’était en juin dernier, et le Liban reprochait alors à l’actrice d’avoir servi dans l’armée israélienne — le Liban et Israël ne marchent pas vraiment main dans la main. Différents incidents aux frontières avaient ravivé les rancœurs d’un côté comme de l’autre, ces dernières années.
D’ailleurs, techniquement, les deux pays ont signé l’accord de 1949, entérinant un armistice, mais restent dans une perpétuelle tension
Alors Gal Gadot dans le rôle de Wonder Woman faisait tout bonnement les frais de cette haine réciproque. Notons cependant que tous les citoyens israéliens servent dans l’armée, passage obligatoire — il ne s’agit pas d’une démarche spécifiquement engagée de l’actrice. En revanche, elle s’était fait remarquer par une prise de position politique forte, en 2014, dans un message d’amour et de soutien aux forces armées israéliennes, contre le Hamas.
Des déclarations qu’elle évite soigneusement depuis que sa carrière a décollé et que Wonder Woman la porte actuellement sur les écrans.
Or, dans la Justice League, le personnage de Wonder Woman est indispensable, et de par sa présence, le Liban a renouvelé cette politique de censure pure et simple. Il arrive, dans ce gende de cas de figure, que les films soient juste coupés, ce qui permet d'éviter l'interdiction complète. Le tout reste à l’initiative et la discrétion du ministère de l’Économie qui prend ces mesures.
Notons que plusieurs pays à dominante musulmane, au sein du Moyen-Orient, ont mis des embargos commerciaux avec les films hollywoodiens, dénonçant l’impérialisme culturel américain. Et alors que Justice League a brassé quelque 175 millions de dollars aux États-Unis, c’est dans le reste du monde qu’il fonctionne le mieux : 485 millions $ de recettes. Loin de ce que Warner espérait ? Peut-être…
Alors l’interdiction au Liban n’aura certainement pas une conséquence dramatique pour les finances de la Warner, mais la censure était presque inévitable. En effet, les lois libanaises interdisent toute forme de normalisation des relations avec Israël.
Or, la cristallisation autour de Gal Gadot s’explique cependant mieux encore : en effet, les deux années de services qu’elle a dû accorder à son pays se sont déroulées en 2006 — époque où Liban et Israël furent dans l’un des conflits les plus violents de ces dernières décennies. On parle de la deuxième guerre du Liban pour Israël, la guerre de juillet pour le Liban — plus globalement, dans le monde arabe, il s’agit de la sixième guerre israélo-arabe. Près de 6000 civils furent blessés durant cette période.
Actuellement, le Liban est l’objet de toutes les attentions internationales, alors que le pays vit une crise politique depuis la démission de son Premier ministre. Et les pays alentours font pression, notamment l’Iran et l’Arabie saoudite, engagés contre le pays.
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