Le 15 mai 2019, le Comité permanent du patrimoine canadien (Comité CHPC) de la Chambre des communes a dévoilé son rapport sur les modèles de rémunération pour les artistes et les créateurs, dans le cadre de l’examen quinquennal de la Loi sur le droit d’auteur.
Le 17/05/2019 à 10:47 par Maxim Simonienko
Publié le :
17/05/2019 à 10:47
L’examen de la Loi sur le droit d’auteur avait commencé au printemps 2018. Il a d'abord été confié au Comité permanent de l’industrie, des sciences et de la technologie (Comité INDU) de la Chambre des communes. Ensuite, c'était au tour du Comité permanent du patrimoine canadien (Comité CHPC) de faire fonctionner ses méninges, en effectuant au même moment une étude des modèles de rémunération possibles pour les artistes et les créateurs.
Pour rappel, la Loi sur le droit d’auteur a déjà été modifiée une première fois en 2012 par le gouvernement de Stephen Harper, qui y a notamment introduit de trop nombreuses exceptions aux yeux des concerné(e)s. Celles-ci ont rendu gratuits plusieurs usages qui, jusqu’en 2012, étaient gérés par des sociétés de gestion collective, notamment pour le secteur de l’éducation. Ce n'est que grâce aux différents sondages, études et témoignages que les députés canadiens ont pu se rendre compte du recul important des revenus des écrivains et des artistes.
Une liste de 22 recommandations
Voici les 22 recommandations émises par le Comité CHPC pour la Loi sur le droit d'auteur :
Recommandation 1
Que le gouvernement du Canada rehausse son soutien aux créateurs et aux secteurs de création pour s’adapter aux nouveaux marchés numériques.
Recommandation 2
Que le gouvernement du Canada mette au point des mécanismes grâce auxquels les services de vidéo en continu pourront créer du contenu canadien et le promouvoir.
Recommandation 3
Que le gouvernement du Canada crée du matériel didactique pour sensibiliser les consommateurs aux dispositions sur le droit d’auteur et à la rémunération des artistes.
Recommandation 4
Que le gouvernement du Canada crée du matériel didactique pour sensibiliser les créateurs aux dispositions sur le droit d’auteur ainsi qu’aux droits et responsabilités des artistes en vertu de la Loi sur le droit d’auteur.
Recommandation 5
Que le gouvernement du Canada examine les exceptions et les lois relatives à l’exonération pour s’assurer que les fournisseurs de services Internet sont responsables de leur rôle dans la diffusion du contenu.
Recommandation 6
Que le gouvernement du Canada augmente ses efforts pour lutter contre le piratage et appliquer le droit d’auteur.
Recommandation 7
Que le gouvernement du Canada poursuive son engagement à mettre en œuvre la prolongation du droit d’auteur de 50 à 70 ans après la mort de l’auteur.
Recommandation 8
Que les services de diffusion de musique en continu soient réglementés comme les autres services de musique canadiens.
Recommandation 9
Que les tarifs pour les services de musique en ligne soient révisés par la Commission du droit d’auteur afin que les paiements de redevances assurent une rémunération équitable aux artistes.
Recommandation 10
Que le gouvernement du Canada modifie la Loi sur le droit d’auteur de manière à ce que l’exemption des redevances radio prévue au paragraphe 68.1(1) ne s’applique qu’aux radios indépendantes ou communautaires.
Recommandation 11
Que le gouvernement du Canada modifie la définition d’enregistrement sonore de l’article 2 de la Loi sur le droit d’auteur afin que les enregistrements sonores utilisés à la télévision et au cinéma soient admissibles à la rémunération pour l’exécution en public.
Recommandation 12
Que le gouvernement du Canada revoie, clarifie ou supprime les exceptions contenues dans la Loi sur le droit d’auteur s’assurant que toute exception respecte l’article 9 de la Convention de Berne pour la protection des œuvres littéraires et artistiques à laquelle le Canada est signataire.
Recommandation 13
Que le gouvernement du Canada respecte les obligations découlant des traités internationaux (y compris la Convention de Berne pour la protection des œuvres littéraires et artistiques, l’Accord sur les aspects des droits de propriété intellectuelle qui touchent au commerce et le Traité de l’Organization mondiale de la propriété intellectuelle sur le droit d’auteur).
Recommandation 14
Que le gouvernement du Canada modifie le paragraphe 14(1) de la Loi sur le droit d’auteur de façon à ce qu’il se lise comme suit : « 25 ans après la cession ».
Recommandation 15
Que l’exception pour les organisations charitables prévue au paragraphe 32.2(3) de la Loi sur le droit d’auteur soit clarifiée pour s’appliquer strictement aux activités où aucun gain monétaire commercial n’est prévu.
Recommandation 16
Que le gouvernement du Canada étende les droits moraux et économiques aux artistes-interprètes audiovisuels.
Recommandation 17
Que le gouvernement du Canada modifie l’article 34.1 de la Loi sur le droit d’auteur pour que le scénariste et le réalisateur soient considérés comme co-titulaires du droit d’auteur et coauteurs d’une œuvre cinématographique ou télévisuelle.
Recommandation 18
Que le gouvernement du Canada modifie la Loi sur le droit d’auteur pour préciser que les dispositions relatives à l’utilisation équitable ne s’appliquent pas aux établissements d’enseignement si l’œuvre est accessible sur le marché.
Recommandation 19
Que le gouvernement du Canada fasse la promotion d’un retour aux licences par l’entremise des sociétés de gestion.
Recommandation 20
Que le gouvernement du Canada révise, harmonise et améliore l’application des dommages-intérêts préétablis en cas de violation commise à des fins non commerciales prévus au paragraphe 38.1(1) de la Loi sur le droit d’auteur.
Recommandation 21
Que le gouvernement du Canada harmonise les recours pour les sociétés de gestion en vertu de la Loi sur le droit d’auteur.
Recommandation 22
Que le gouvernement du Canada établisse le droit de suite.
Un enthousiasme général en attendant le rapport du Comité INDU
Aujourd'hui, l’UNEQ (l'Union des écrivaines et des écrivains québécois), l'une des plus importantes associations professionnelles du secteur de l'écriture au Québec, a accueilli plus que favorablement le rapport, non seulement pour sa clarté, mais également pour ses recommandations formulées.
« Les 22 recommandations faites par le Comité permanent du patrimoine au gouvernement du Canada vont dans le sens des revendications des artistes. Le Comité a su écouter les nombreux témoignages des créateurs dont les revenus et le métier sont plus que jamais menacés », déclare Suzanne Aubry, présidente de l’UNEQ.
En 2018, l’UNEQ avait décidé de participer activement aux audiences des deux comités. Plus récemment, avec la campagne « Une vie sans art, vraiment ? » débutée en avril de l'année dernière, l’UNEQ et quinze autres organisations professionnelles représentatives des artistes québécois et canadiens ont réclamé une modification de la Loi qui puisse mieux protéger les créateurs et leurs œuvres.
Cependant, Laurent Dubois, directeur général de l’UNEQ, a tenu à rester lucide et calmer l'enthousiasme des troupes : « Ce rapport est une excellente nouvelle, mais il ne faut pas perdre de vue que l’examen de la Loi n’est pas terminé ».
« Le Comité INDU doit lui aussi produire son rapport, qui sera déterminant, et nous avons des raisons de craindre qu’il sera moins favorable aux artistes, ajoute-t-il. Les recommandations du Comité permanent du patrimoine canadien et leur excellente synthèse des enjeux ne doivent pas rester lettre morte. Les créateurs ont été unanimes à dénoncer les failles de la Loi de 2012 et à réclamer une législation forte qui protège leurs œuvres de toute forme d’utilisation abusive, le gouvernement ne peut les ignorer. »
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