Son nom est synonyme de non-violence, dans nos sociétés occidentales : pourtant, la figure de Mahatma Gandhi est beaucoup plus contestée dans son propre pays, où son adhésion au système de castes reste vivement critiquée. Arundhati Roy, auteure lauréate du Booker Prize, a vivement critiqué l'héritage du militant Indien, et les honneurs qui lui sont rendus à tout va.
Statue de Gandhi, à Madrid (jacinta lluch valero, CC BY-SA 2.0)
La voix dissidente d'Arundhati Roy s'est élevée à l'université de Kerala University, à Thiruvananthapuram, dans le Sud de l'Inde. Roy est elle-même connue pour ces activités pacifistes, et c'est donc avec un certain agacement qu'elle voit Gandhi érigé comme un modèle du genre. « Il est temps de rétablir une vérité sur une personne dont la doctrine de la non-violence était basée sur l'acceptation d'une des hiérarchies sociales les plus brutales, le système de castes », a-t-elle souligné lors de son intervention.
Parmi les historiens, l'attitude de Gandhi vis-à-vis du système de castes indien fut l'un des centres de polémiques : les intouchables étaient considérés par le pacifiste comme des « enfants de Dieu », mais certains d'entre eux déplorent toujours que Mahatma Gandhi n'ait jamais vraiment inclus leur libération dans ses combats. « Je ne pourrais plus me considérer comme hindou si l'intouchabilité restait incluse dans l'hindouisme », aurait-il cependant écrit dans une lettre à Charlie Andrews, missionnaire chrétien, en 1921.
C'est plutôt une égalité dans la postérité que réclament les dissidents : Bhimrao Ramji Ambedkar, un intouchable indépendantiste devenu ministre de la Justice sous Nehru et rédacteur de la première Constitution, est ainsi éclipsé par le petit bonhomme chauve. Il surnommait ce dernier « le saint du statu quo »...
Les réactions n'ont pas tardé, suite aux propos d'Arundhati Roy : « Être franc, c'est une chose, mais être à ce point inconscient de son ignorance en est une autre », s'est contenté de déclarer Tushar Gandhi, arrière-petit-fils du militant, dénonçant une tentative pour créer la polémique. Le Professeur Mridula Mukherjee, spécialiste de l'histoire moderne à l'université de Jawaharlal, à Delhi, a précisé que les critiques de la lauréate du Booker Prize étaient hasardeuses, au vu de ce que Gandhi avait pu faire pour les intouchables.
Depuis l'accession au pouvoir du Bharatiya Janata Party (BJP), l'histoire indienne est quelque peu malmenée dans la vision que tente d'imposer le parti d'extrême droite : le Conseil indien en recherche historique a pointé la « vision marxiste » des manuels scolaires, mais a également rappelé que les récits épiques, le Ramayana et le Mahabharata, devaient être considérés comme des sources historiques.
(via The Guardian)
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