« L’auteur comme éternelle variable d’ajustement. » Terrible phrase de Benoît Peeters, après la révélation d’un courriel signé du président de la Maison des Ecrivains et de la littérature. ActuaLitté a en effet pu prendre connaissance d’un mail adressé aux auteurs ayant contractualisé avec l’association. Pour leur annoncer qu’ils ne seraient pas payés... avant plusieurs semaines.
Depuis une dizaine de jours, la situation de la MEL est connue : ayant quitté la tutelle du Centre national du livre pour celle de la DRAC, l’établissement accuse le coup d’une perte de sa subvention – 50.000 € de moins. Aux grands mots, les grands remèdes : Jean-Yves Masson, président, s’est donc adressé aux auteurs, pour leur donner la couleur.
Pas de rémunération pour les auteurs, en attendant
En effet, si l’association avait mis un point d’honneur à payer en temps et en heure, « [e]xceptionnellement, pour les rémunérations qui vous sont dues, cela ne pourra pas être le cas pendant les semaines qui viennent », affirmait-il.
Et d’ajouter : « Néanmoins, vous comprendrez que, vu l’état d’urgence auquel nous devons faire face, il faille faire passer en premier le versement des salaires des permanents. » Autrement dit, tant que la subvention n’est pas obtenue, ce sont les salariés qui passent avant les auteurs.
Les réactions ne se sont d’ailleurs pas fait attendre :
Ben voyons ! « vous comprendrez que, vu l’état d’urgence auquel nous devons faire face, il faille faire passer en premier le versement des salaires des permanents. » https://t.co/x2ntC3IpO8 via @actualitte #payetonauteur @LigueAuteursPro @CharteAuteurs @franckriester
— Sophie Dieuaide (@DieuaideSophie) March 5, 2019
"La MEL ne rémunérera pas les auteurs pour préserver sa faible trésorerie". Edifiant ! L'auteur comme éternelle variable d'ajustement. Je regrette d'avoir signé la pétition en leur faveur. #LigueAuteursPro https://t.co/yBGagvT5Cv via @actualitte
— Benoît Peeters (@BenoitPeeters) March 5, 2019
“Un nouvel affront aux auteurs”
Première association à réagir, la Charte des auteurs et illustrateurs jeunesse, par la voix de son président, Guillaume Nail. « Votre courrier demande [aux auteurs] de maintenir les interventions à venir sans aucune assurance que vous percevrez les fonds que vous pensiez percevoir au lancement des programmes », pointe-t-il. Et ce, en présumant qu’ils comprendront la nécessité de la situation.
Mais pour le président de la Charte, la pilule est difficile à avaler : « Si vous affichez un objectif de transparence, nous sommes au regret de vous dire que ce courrier est perçu comme un nouvel affront aux auteurs et aux autrices qui revendiquent d’exercer un métier, lequel mérite autant que celui des salariés une juste rémunération. »
Et de déplorer que la MEL « ne mettant plus l’auteur et ses difficultés au cœur de ses préoccupations s’éloigne définitivement de ses principes fondateurs ». Faire ainsi porter sur les auteurs et autrices la responsabilité « de vos erreurs de budgétisation des programmes » n’est pas admissible.
« La Charte vous demande à son tour de procéder sans délai aux règlements des prestations. Libre à vous d’effectuer l’emprunt évoqué pour honorer ensuite salaires et droits d’auteurs à venir. »
Contacté, le président de l’association doit nous apporter des précisions. Il nous a toutefois garanti que les auteurs qui souhaitaient retirer leur nom de la pétition signée seront servis. Et qu’il les contactera personnellement pour leur apporter des précisions.