En partenariat avec la manifestation Lire à Lausanne, qui se tient du 28 au 5 septembre, ActuaLitté propose de découvrir la liste de 50 ouvrages qui ont marqué ces 50 dernières années. Des livres repérés par les services des archives et des bibliothèques de la ville, en fouillant les décennies de documentation.
Le 03/09/2019 à 10:36 par Clément Solym
Publié le :
03/09/2019 à 10:36
50 ans de littérature, à travers 50 ouvrages, passés en revue en fonction de leur décennie de publication, voici le défi qu'ont relevé les bibliothèques et archives de la ville. En partenariat avec ActuaLitté, elles présentent durant toute la manifestation ces ouvrages exemplaires — à plus d'un titre – dans nos colonnes.
L’écrivain
Né en 1929 à Genève de parents bibliothécaires, mort en 1998, Nicolas Bouvier contracte le virus du voyage « vautré sur ses atlas les longs dimanches de pluie ». En 1951, il rallie Istanbul avec des amis, dont le peintre Thierry Vernet, avec lequel il partira sur la route de L’Usage du monde. Le voyage de Nicolas Bouvier dure quatre ans, le menant en Inde et au Japon. Il tire de son séjour à Ceylan Le Poisson-scorpion. Journaliste, écrivain, photographe, Nicolas Bouvier gagne sa vie grâce à ses activités d’iconographie, fournissant des illustrations à l’OMS ou aux éditions Rencontre à Lausanne. Il reçoit en 1995 le Grand Prix CF Ramuz.
Le livre
Le Poisson-scorpion, Prix des Critiques 1982, raconte les neuf mois passé par l’auteur sur l’île de Ceylan en 1955.Parti de Genève deux ans plus tôt, Bouvier vient de traverser les Balkans avec son ami Thierry Vernet. Bouvier a continué seul jusqu’à Ceylan. Son séjour sur « l'île des démons » s’apparente à une descente aux enfers dans laquelle l'auteur frôle la folie. Récit envoûtant et sage, c’est un éloge de la route qui « vous plume, vous rince, vous essore ». Il peaufine longtemps son récit, paru presque trente ans après le voyage lui-même.
L’écrivaine
Adeline Favre est née à Saint-Luc, dans le val d’Anniviers, huitième des quatorze enfants de la famille Salamin. Contre l’avis de ses parents, elle part à Genève suivre une école de sages-femmes. Elle rentre à Sierre, se marie et s’installe comme sage-femme à Sierre dès 1928 et pour une carrière de près d’un demi-siècle. Elle accouchera plus de 8000 enfants dans la région, d’abord à domicile, plus tard à l’hôpital. Ce sont ses nièces qui, plusieurs années après sa retraite, recueilleront son précieux témoignage.
Le livre
Dans ce récit de vie, qui se dévore comme un roman d’aventure, Adeline Favre retrace les moments les plus émouvants de sa longue carrière de sage-femme qui débute en 1928 en Valais. On la voit pénétrer dans tous les milieux, rencontrer l'accueil chaleureux des familles ou se heurter à l'hostilité des mères, belles-mères et grand-mères qui n'admettaient pas que l'on récuse les pratiques traditionnelles pour introduire de nouvelles formes d'hygiène, se déplacer par tous les temps, à toute heure du jour et de la nuit. Immense best-seller, Moi, Adeline, accoucheuse a été moult fois réédité.
L’écrivain
Claude Frochaux, né en 1935, est un libraire, éditeur et écrivain vaudois, d’origine neuchâteloise. De 1956 à 1965, il est libraire à Zurich, Londres et Paris, puis revient à Lausanne en 1965 pour fonder les éditions L’Âge d’Homme avec Vladimir Dimitrijevic. Il crée la collection Contemporains, dédiée aux grandes plumes de la littérature romande. Il rédige plusieurs essais et romans et reçoit le Prix Lipp en 1997 pour L’Homme seul. En 2012, il publie son dernier grand ouvrage, L’Homme achevé.
Le livre
Avec Aujourd’hui je ne vais pas à l’école, qui rencontre un joli succès et sera adapté au théâtre, Frochaux obtient le Prix Schiller en 1983. Un jeune homme, étudiant, décide un beau matin qu'il n'ira pas à l'école et qu'il restera dans son lit, tout en réinventant le monde. Ce qu'il réclame, pour lui du moins, car il se soucie peu des autres, c'est le droit de s'arrêter. Claude Frochaux rompt ici avec tous les usages littéraires, échappe à tous les genres et joue avec la parodie, pour produire un livre positif et divertissant.
L’écrivaine
Née en 1920 à Genève d’un père alémanique et d’une mère romande, décédée en 2010, Yvette Z’Graggen a entretenu des liens forts avec ses lecteurs et lectrices depuis son premier livre, La Vie attendait, paru en 1944, à son dernier, Juste avant la pluie, paru en 2011. Journaliste et productrice d’émissions culturelles et de pièces radiophoniques à la RTS, secrétaire des Rencontres internationales de Genève, son œuvre questionne avec tact la condition féminine, les inégalités sociales et les zones d’ombre de l’histoire suisse durant la deuxième Guerre mondiale.
Le livre
En 1981, bouleversée par un film évoquant le refoulement de réfugiés juifs par la Suisse durant la Seconde Guerre mondiale, Yvette Z’Graggen décide de plonger dans les souvenirs de la jeune fille qu’elle était alors. Les Années silencieuses met ainsi en parallèle les faits de guerre tels qu’ils apparaissaient dans le journal La Suisse, et son quotidien de secrétaire et d’écrivain en devenir, avide de vivre malgré tout. Premier livre engagé d’Yvette Z’Graggen, lu et relu par des générations successives, il donne une relecture essentielle des années 1940 en Suisse.
L’écrivaine
Née en 1938 aux Brenets, décédée en 2004 à Peseux, Monique Laederach est fille d’un pasteur et d’une enseignante allemande. Musicienne, enseignante, d’abord poétesse puis romancière depuis Trop petits pour dieu en 1986 jusqu’à Flèche dérobée au vent en 2003, elle est également traductrice de Kafka, Rilke, Muschg ou Erika Burkart. Trois fois prix Schiller, écrivaine exigeante et impliquée, elle s’engage au parti socialiste autant que dans les combats féministes. Elle a su mieux que personne mettre des mots sur les rapports entre les hommes et femmes de sa génération.
Le livre
Une femme, Anne, quitte son mari Jérôme après dix ans de vie commune. Elle déménage, affronte les amis, se réinvente une vie, reprend son nom de jeune fille. Elle ne sera pas comme sa mère, certes, mais que sera-t-elle alors ? Inspirée de sa séparation d’avec l’écrivain Jean-Pierre Monnier, dont elle a été l’épouse de 1961 à 1973, Monique Laederach signe, avec La Femme séparée, le roman que les femmes dites libérées attendaient. Livre générationnel, c’est surtout une œuvre novatrice qui concentre avec brio les enjeux socioculturels et existentiels de ces années de transition.
Catherine Safonoff est née à Genève en 1939. Elle vit un temps aux Etats-Unis et à Londres, puis revient en Suisse où elle donne naissance à deux filles, d’un second mariage. Elle publie son premier roman, La Part d’Esmé, en 1977, et travaille comme critique littéraire et journaliste à la RTS. Quelques années après, elle publie Retour, retour (1984), distingué par le Prix Schiller, avec lequel elle perce. Elle a depuis publié une dizaine d’œuvres, souvent autobiographiques, la dernière en 2016.
Le livre
Dans Retour, retour, Catherine Safonoff dépeint une héroïne, qui, sentant un vague désaccord avec sa ville natale, part s’installer sur une île, en espérant se détacher de son lieu d’origine pour mieux s’y enraciner à son retour. Catherine Safonoff rencontre le succès avec ce livre, qui fait figure de quête individuelle, avec ce mythe de l’île idéale, central chez l’auteure. Le voyage et l’écriture permettent l’exploration de sa propre identité et la guérison d’un sentiment profond d’échec et de déracinement.
L’écrivaine
Née Colette Blum en 1943 à La Chaux-de-Fonds, Amélie Plume suit des études de Lettres et d’ethnologie avant de voyager en Afrique, Israël et à New York, où elle enseigne et commence à peindre et écrire. Etablie ensuite à Genève, elle se consacre à l’écriture dès 1981 avec la publication de LesAventures de Plumetteet de son premier amant. Explorant autant la vie de couple que ses origines ou l’âge, à l’aise dans l’autofiction, elle est une des voix les plus originales de sa génération.
Le livre
Oui Emile pour la vie est l’histoire d’Emile et Amélie qui se rencontrent, tombent amoureux, se marient, partent en voyage de noce, font des bébés et se rendent compte que la vie ne ressemble pas à un conte de fée. Parus trois ans après le premier livre d’Amélie Plume, Les Aventures de Plumette et de son premier amant, il séduit d’emblée par son style audacieux, burlesque, drôle, acide et novateur, sorte de poème narratif aussi léger que grave, au service des grandes questions que tous les couples se posent.
L’écrivain
Maurice Métral, né en 1929 à Grône (VS), charpentier de formation, puis journaliste au début des années 60, se consacre entièrement à l’écriture à partir des années 70. Il connait le succès avec L’Avalanche (1966), Les Hauts cimetières (1970), La Solitaire (1972), L'Enfant refusé (1973) et L'Etrangère (1984), dont certains dépassent les 30 000 exemplaires de tirage. Son œuvre repose sur un lien intime qu’il tisse avec le Valais, ses paysages et ses hommes. Il meurt en 2001 à Grimisuat (VS).
Le livre
Maurice Métral reçoit, avec L’Etrangère, le Prix des Littératures de langue française hors de France, récompensé pour son très grand talent et sa maîtrise de la langue française. L’histoire racontée est celle de Laurent, qui malgré les années passées au collège, demeure fidèle à la tradition paysanne. Il aime la nature et ses expressions. Deux événements viendront pourtant perturber cette quiétude : la propriété familiale, menacée par le tourisme et sa rencontre, dans un train, avec une étrangère.
L’écrivaine
Gisèle Ansorge, née en 1923 à Morteau (France) est une écrivaine vaudoise. Pharmacienne de formation, elle s’intéresse à la littérature, la radio, la télévision, les beaux-arts et le cinéma d’animation, qu’elle produit avec son mari, Ernest Ansorge. En 1987, son premier roman, Prendre d’aimer, connait un succès considérable grâce auquel elle reçoit le Prix Paul-Budry et celui des auditeurs de RTS. Elle reçoit également des prix pour ses pièces de théâtre et décède en 1993 à Etagnières.
Le livre
Dans Prendre d’aimer, Gisèle Ansorge met en scène une femme qui, à l’écart du pouvoir, voit l’Histoire par un interstice. Jeune Valaisanne, servante et malmenée depuis son adolescence, elle tente de survivre tant bien que mal entre le Valais et Lausanne, au temps du Sonderbund. Ce dernier emporte le mari qu’elle avait fini par trouver. Elle vient alors en aide à une adolescente enceinte, qui lui rappelle les difficultés qu’elle a elle-même vécues. Petite et grande histoire s’emmêlent ici avec réussite.
L’écrivaine
Née à Paris en 1936, morte à Lausanne en 2015, orpheline de père à 9 ans, Anne Cuneo grandit en Italie puis dans un orphelinat à Lausanne. Tour à tour enseignante, journaliste à la RTS, traductrice, scénariste, réalisatrice, chroniqueuse, passionnée par le monde du théâtre et l’Angleterre, elle consacre sa première vie d’auteure à l’autofiction. Dès Station Victoria en 1989, elle livre des romans historiques, consacrés notamment à la période élisabéthaine, et des romans policiers, qui connaissent un beau succès populaire.
Le livre
Amalia, 14 ans, débarque seule à Londres un jour de mars 1954. Sa rencontre avec l’originale octogénaire Victoria Brown marque le début d’un double éveil et d’une amitié irremplaçable. Parcours initiatique inoubliable, plongée dans un univers « so british » mariant courses de chevaux et clubs de jazz, Station Victoria inaugure avec brio la deuxième vie d’écrivaine d’Anne Cuneo, après presque trente ans dédiés à l’autofiction et aux documentaires. Et se lit comme une déclaration d’amour émue à l’Angleterre, adorée par l’auteure.
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