Le 6 février 1626, le Cardinal Richelieu ne le savait pas, mais il venait de donner l’idée d’un grand roman à un certain Alexandre Dumas père. Résolument décidé à légiférer sur la pratique du duel – dix ans plus tard, il fonda l’Académie française, sans aucun lien –, le cardinal interdit tout bonnement la pratique sur le sol français.
À une époque où tous les cadres de l’armée royale sont issus des rangs de la noblesse, la pratique du duel pour laver les affronts à l’honneur finit par entamer dangereusement les effectifs de l’encadrement. Richelieu demande à Louis XIII de promulguer un édit punissant de mort les contrevenants, considérant que la défense de l’honneur individuel ne doit pas mettre en danger le Royaume.
Il fait décapiter, le 21 juin 1627, deux jeunes nobles pris en flagrant délit de duel. Même si le propre frère de Richelieu est mort en duel avant le fameux édit, c’est pour asseoir l’autorité de l’État naissant que Richelieu frappe si fort contre ceux qui sont pourtant ses serviteurs.
C’est d’ailleurs en quittant son père l’unique recommandation que ce dernier livrera au jeune... d’Artagnan : « Je vous ai fait apprendre à manier l’épée ; vous avez un jarret de fer, un poignet d’acier ; battez-vous à tout propos ; battez-vous d’autant plus que les duels sont défendus et que, par conséquent, il y a deux fois du courage à se battre. »
D’Artagnan ne tardera pas à se retrouver empêtré dans trois duels, réunissant Athos, Portos et Aramis, comme on le sait. À peine arrivé à Paris, l’apprenti mousquetaire se retrouvera donc engagé.
Ce moyen de mieux contrôler justement le caractère belliqueux des mousquetaires du roi permit d’ailleurs à Richelieu d’exercer une plus grande influence sur le pays. Mais, quand la garde du cardinal intervient pour s’emparer des quatre hommes, c’est en se rangeant à leur côté que d’Artagnan gagne leur confiance.
Alexandre Dumas
Le roman de cape et d’épée qui fut popularisé au XIXe siècle ne manqua pas de rendre aux duellistes un hommage appuyé. Au point, chez Dumas, d’en faire une affaire de rivalité entre le roi et son ministre : « Aussi Richelieu et Louis XIII se disputaient souvent en faisant leur partie d’échecs le soir, au sujet du mérite de leurs serviteurs. Chacun vantait la tenue et le courage des siens, et, tout en se prononçant tout haut contre les duels et contre les rixes, ils les excitaient tout bas à en venir aux mains et concevaient un véritable chagrin ou une joie immodérée de la victoire des leurs. »
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