Quelles saveurs avaient les premiers plats du monde ? Quatre tablettes d’argiles babyloniennes, découvertes au début du XXe siècle et récemment traduites, nous en donnent un aperçu. Ces planches, conservées dans la collection babylonienne du Musée Peabody d’histoire naturelle de l’université de Yale (Connecticut), présentent des recettes vieilles de 4000 ans. Au menu : des ragoûts, des bouillons, mais aussi des soupes et des tartes.
Si les chercheurs avaient déjà connaissance de ces tablettes d’argile babyloniennes depuis le début du XXe siècle, il aura fallu attendre la fin du siècle pour les traduire correctement et ainsi s’apercevoir qu’elles contenaient un trésor culinaire : des recettes.
L’assyriologue Gojko Barjamovic affirme que les experts ont longtemps pensé que ces tablettes étaient des récits de médecine. « Les gens ne s’attendent pas à ce que les textes anciens soient des recettes de cuisine. »
Pourtant, dans les années 1940, une chercheuse et universitaire du Connecticut du nom de Mary Hussey avait émis l’hypothèse que ces textes étaient des recettes, mais à l’époque, « personne ne l’a crue », affirme-t-il. Ce n’est qu’à partir des années 80 qu'une telle supposition a été prise au sérieux, lorsqu’un auteur et universitaire français, Jean Bottéro, a eu pour projet d’écrire un article encyclopédique sur la cuisine dans le monde antique.
« Il avait entendu parler de cette rumeur et s'est donc présenté à Yale » reprend-il. Le dessein de la traduction de ces planches est alors réapparu. « Et bien sûr, comme il était Français, ils ont bien voulu collaborer avec lui » ajoute-t-il.
Sur les quatre planches, trois d’entre elles datent de l’ancienne période babylonienne, soit pas plus tard que 1730 av. J.-C. La première tablette récense pas moins de 25 recettes de ragoûts et de bouillons avec de brèves instructions, tandis les deux autres en contiennent moins, mais avec beaucoup plus de détails. La quatrième et dernière pièce, elle, appartient à la période néo-babylonienne.
« Les ragoûts représentent le début d’une longue tradition qui domine encore dans la cuisine irakienne », affirment les chercheurs dans un article du Lapham’s Quarterly. En particulier, les ragoûts d’agneau qui, « cuisinés avec la graisse de queue de mouton, des épices, des oignons, de l’ail et du poireau, semblent être les héritiers directs des recettes retrouvées sur ces tablettes babyloniennes ».
Quelques membres de l’équipe de chercheurs en charge de la collection babylonienne de l’Université de Yale ont décidé de réaliser quelques recettes issues de ces premiers « livres » de cuisine. Pour le moment, ils ont reconstitué trois recettes : un ragoût de betterave, un autre entièrement végétarien et le dernier à l’agneau.
« Nous n’arriverons jamais à reproduire à l'identique ces plats vieux de presque 4000 ans » reprennent-ils. « Le gouffre culturel qui nous sépare des auteurs de ces recettes est trop important. Les goûts, l’esthétique, mais aussi les méthodes de cuisson, tout évolue avec le temps. »
« Il y a beaucoup de chefs qui me contactent en ce moment, ils me demandent si une quelconque collaboration est possible afin que ces recettes soient présentées dans un restaurant » confie Gojko Barjamovic au micro de National Public Radio.
Ces tablettes d’argile sont actuellement présentées dans le cadre d’une exposition au Musée Peabody d’histoire naturelle qui se tient jusqu’à a fin du mois de juin 2020. Ancient Mesopotamia Speaks : Highlights from the Yale Babylonian Collection met également en évidence près de 150 objets datant du milieu du Ve millénaire avant notre ère et jusqu’au Ier siècle apr. J.-C.
Et si l'envie vous prend de faire revivre ces anciennes recettes, elles sont disponibles en anglais à cette adresse.
4 Commentaires
Vedel
19/11/2019 à 13:00
Bonjour
Quelle sont ces recettes
Vedel
19/11/2019 à 13:02
Bonjour je veux lire ces recettes
Riva
20/11/2019 à 15:20
Je suis très intéressée à lire ces recettes et à les expérimenter.Merci de me les envoyer
Amélie
29/12/2019 à 22:48
Très bon article. J'ai été voir les recettes. C'est très intéressant de voir comme les standards de cuisine varient selon les pays et encore plus selon l'époque. Mais il y a là de quoi donner des idées pour changer un peu notre façon de cuisiner. Et d'autre part j'ai appris plein de mots d'anglais...