#Essais

Apartés

Cécile Duflot

Elle a fait irruption dans la vie politique française avec sa jeunesse, son verbe décidé, ses intonations directes. Cécile Duflot tranche dans un univers sensiblement plus âgé, majoritairement masculin et professionnalisé. Qui est cette femme bien ancrée dans la réalité d'aujourd'hui ? Comment voit-elle son époque ? Quel avenir veut-elle contribuer à dessiner pour son pays ? Face au journaliste Guy Sitbon, homme cle gauche d'une autre génération et d'une tout autre culture politique, elle relate ici, dans une conversation vivante et très franche, son enfance auprès d'un père cheminot syndicaliste et d'une mère prof, ses premiers engagements à la JOC ou comme bénévole dans les prisons, son ascension chez les Verts, sa participation à l'aventure Europe Ecologie, qui débouchera sur le succès des élections européennes de juin 2009. Elle pose également un regard critique sur notre société injuste et gaspilleuse, et sur l'attitude prédatrice des pays du Nord vis-à-vis de ceux du Sud. Elle défend une conversion écologique de l'économie, un développement des alternatives à la voiture individuelle, une rupture avec un productivisme irréfléchi et destructeur pour la planète. Elle réfléchit aussi sur les dangers du pouvoir, le rôle de la presse ou les vertus de la parité hommes-femmes.

Par Cécile Duflot
Chez Les Petits Matins

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Genre

Développement durable-Ecologie

par Cécile Duflot

 

« Tu devrais écrire un livre… » J’ai entendu cette phrase des dizaines de fois depuis trois ans.

Écrire un livre parce que tous les politiques font ça… Écrire un livre pour être invitée à la télé… Écrire un livre parce que j’étais candidate… Écrire un livre parce que cet éditeur était si sympa… Sauf que je n’avais pas le sentiment d’avoir des choses très neuves à dire, pas le temps de le faire bien, et surtout pas – je l’aurai, je l’espère – la capacité à me mettre seule face à un cahier. Une fouille archéologique de mon ordinateur montrerait des débuts de textes, des listes de chapitres, des intentions, des formules… En gros, pas grand-chose.

Et puis, c’est comme souvent Stéphane qui a trouvé la clé ; il m’a dit : « Il faudrait que tu fasses un livre comme si tu essayais d’expliquer l’écologie et la politique à quelqu’un qui ne serait pas convaincu. » C’est vrai, ça m’a plu ; là, je me sentais dans mon rôle, à ma place, mais il fallait trouver le « quelqu’un ». Il n’était pas très loin, en fait, c’était Guy – enfin, s’il acceptait. Guy, sa vie romanesque, son style extraordinaire, sa capacité de provocation inentamée par les années, son polo vert pomme – ou rose vif – assorti à ses chaussettes. Il a dit oui, d’accord, sûrement d’abord pour faire plaisir à Stéphane, son petit-fils, et m’a dit à moi : « Je voudrais qu’on fasse un livre pas chiant, un livre que les gens auront envie de lire. » Ça m’a encore plus plu et je me suis sentie en confiance.

Alain, envoyé par l’éditeur pour prendre les notes, a apporté son magnétophone à cassettes duXXe siècle, des croissants et des pains au chocolat, et ces conversations au long cours sont devenues des bulles indispensables chaque semaine dans la grande pièce vert amande au-dessus du boulevard de Clichy.

Ces moments-là, en aparté, étaient encore plus précieux pour moi qui vivais l’emballement d’une campagne et d’une « médiatisation » brutale.

Je me suis prise au jeu avec la volonté double de regarder avec un peu de distance ce qui était en train de se passer et de penser aux futurs lecteurs et lectrices.

Il n’y a aucune prétention dans ce livre, juste la volonté de témoigner et de transmettre une conviction : la politique est l’affaire de tous et de toutes, la mienne comme la vôtre.

Le projet que je défends, les pas dans lesquels j’inscris les miens sont ceux de l’écologie politique.

J’aimerais beaucoup vous convaincre de sa justesse.

J’appartiens à l’une des dernières générations qui croyaient dur comme fer ceci : tous les règnes de la nature appartiennent de plein droit à l’espèce humaine, elle peut en disposer sans autre limitation que son bon plaisir. Nous avions, bien sûr, entendu parler de religions lointaines, adoratrices de la nature ; nous les trouvions plutôt sympathiques, comme tant d’autres aberrations de la pensée primitive. Jusqu’au jour, au début des années 1960, où nous avons été invités fermement à remettre nos montres à l’heure. La nature n’appartient pas à l’homme, c’est même tout le contraire, l’homme appartient à la nature. Quel choc, mes amis !

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11/02/2010 216 pages 15,00 €
Scannez le code barre 9782915879674
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