#Essais

François Bon, d’'un monde en bascule

Gilles Bonnet

Depuis Sortie d'usine (1982), l'oeuvre de François Bon s'honore d'inscrire pour mémoire la disparition d'un monde, ne fût-elle visible qu'en l'infra-ordinaire. Cependant, de récits en biographies des Rolling Stones ou de Led Zeppelin, de pièces de théâtre en essais sur le numérique, cette oeuvre profuse se garde d'une vision passéiste qui se complairait dans le regret d'un temps perdu. Ecrire la bascule signifie ainsi se laisser aspirer par le vide de l'ancien, au moment où le nouveau tente de l'investir, puis en bâtir une structure tuilée qui puisse supporter l'oeuvre et le monde appelé à y résonner. De la fin à la bascule, la nuance n'est pas que de lexique : écrire la bascule d'un monde, c'est maintenir le texte ouvert contre la tentation de la nostalgie, l'astreindre sans cesse à la véhémence jusqu'à l'incantation, rageuse parfois, de se savoir quête vive car vaine. Aussi la bascule dans l'oeuvre de François Bon a-t-elle à voir avec la légitimité illégitime de la littérature comme geste tendant à la maîtrise et à la déprise du monde ou du sujet. Ce n'est qu'en déséquilibre, entre fixé et effondré, que l'acte d'écrire prend sens. Seule une telle instabilité, source d'une constante invention de formes, dote l'écriture d'une densité neuve, tissée d'urgence, d'aléatoire et d'irrémédiable.

Par Gilles Bonnet
Chez La Baconnière

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Genre

Critique littéraire

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26/04/2012 256 pages 20,00 €
Scannez le code barre 9782940431076
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