#Roman francophone

Polaroïds

Marie Richeux

Ma première expérience des Polaroïds de Marie Richeux, ce fut il y a quelques mois. Je suis entré dans un studio radiophonique pour participer à une émission dont je ne savais rien (je n’écoute jamais la radio l’après-midi) avec cette jeune femme qui posait de si belles questions, avec des phrases très calmes mais très enjouées, comme improvisées mais si précises, en réalité. J’ai alors pensé à ce que dit Walter Benjamin dans son texte sur "L’auteur comme producteur" : quand le travail, et non l’ego, prend lui-même la parole dans certaines circonstances favorables. Et puis Marie Richeux a, soudain, marqué un temps, produit une césure dans le dialogue, selon une règle du jeu que j’ignorais complètement, et elle a lu devant le micro un texte écrit où il était question, d’abord d’une "fissure dans le sol", d’une "fissure dans le béton", et ensuite de quelques perles colorées gisant au sol, probablement tombées d’un coffret de beauté pour petites filles. Polaroïds, donc : "se polariser" sur la texture même des choses. S’approcher, se pencher, donner sa place au minuscule. Mais, aussi, "polariser" les rapports que chaque chose entretient avec ses voisines : se déplacer, faire changer l’incidence de la lumière, donner sa place à l’intervalle. Dans l’économie, je veux dire le rythme de vie, de Marie Richeux, il s’agit, si j’ai bien compris, d’écrire chaque jour un récit en miniature, l’ekphrasis d’une seule image, l’état des lieux d’une seule situation, et de le transmettre presque aussitôt, façon d’en partager la jouissance, à la radio, par lecture interposée, la voix jouant ici le rôle du matériau polarisant permettant le "développement instantané" de l’image racontée.

Par Marie Richeux
Chez Sabine Wespieser Editeur

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Genre

Littérature française

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03/10/2013 160 pages 17,00 €
Scannez le code barre 9782848051543
9782848051543
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