Arena 13 Tome 2 : La proie

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NOTRE LOT À TOUS

« Les enfants se battent avec des bâtons ; les hommes, avec des lames.

Nous attendons celui qui maniera les deux. »

Amabramdata, le livre genthai de la prophétie

Les combattants qui s’affrontaient dans le pré boueux n’étaient pas très loin de moi, mais un cercle de badauds m’empêchait de les voir. Derrière ce rempart humain, un homme se battait contre trois autres. C’était la coutume dans cette petite ville de province. Comme souvent, la plupart des joueurs avaient parié sur la défaite du combattant solitaire. S’il gagnait, ceux qui avaient misé sur lui remporteraient une coquette somme.

La foule sifflait et acclamait les adversaires. Certains spectateurs, surexcités, sautaient littéralement sur place. Les moins démonstratifs dansaient d’un pied sur l’autre pour se réchauffer.

Je grelottais, moi aussi. Bien qu’il soit à peine plus de deux heures de l’après-midi, le soleil déclinait déjà.

Le spectacle semblait captivant, mais son issue me laissait indifférent. Je ne pariais plus, et je n’étais pas venu ici pour assister à un combat. Je ne faisais que traverser Mypocine, en chemin pour le sud. Cependant, j’avais vécu dans cette ville, et j’y avais de nombreux souvenirs, des bons comme des mauvais. Les meilleurs étaient liés à mes camarades, avec qui je disputais des combats de bâtons. Quant aux mauvais, j’évitais de trop y penser. Après que Hob avait assassiné ma mère et causé le suicide de mon père, j’avais travaillé pour un fermier des environs, qui me traitait à peine mieux qu’un esclave.

En me frayant un passage dans la foule des spectateurs à coups de coudes et d’épaules, je m’attirai quelques jurons et des regards furieux. On m’adressa aussi des signes de tête et des sourires amicaux. Cela ne faisait pas si longtemps que j’avais combattu ici, et certains se souvenaient de moi. Aujourd’hui, j’étais juste venu dans l’espoir de croiser mon ami Peter, que je n’avais pas vu depuis trop longtemps. J’avais quitté Mypocine, cinq mois plus tôt, pour aller m’entraîner au combat dans la célèbre Arène 13 de Gindeen, au nord du pays.

Peter était un combattant de bâtons, comme moi, et j’étais à peu près sûr de le trouver dans les parages, en train d’attendre son tour. Tous les samedis matin, les jeunes gens qui voulaient faire leurs preuves et grimper dans le classement venaient s’affronter dans ce pré proche de la ville.

Je distinguai enfin les adversaires. Deux d’entre eux avaient été mis KO, et les deux qui restaient échangeaient des coups furieux. Les bâtons peuvent infliger des ecchymoses et parfois des coupures sur tout le corps. Mais pour remporter la victoire, il faut frapper l’adversaire à la tête. Les deux garçons à terre se tenaient le crâne entre les mains ; l’un d’eux saignait abondamment.

Soudain, le combattant face à moi reçut un coup sur le nez. Une giclée de sang éclaboussa sa chemise blanche avant de dégouliner sur son pantalon.