#Essais

Diplomaties au temps de Napoléon

Thierry Lentz, Yves Bruley

Au vu des guerres menées par l'Empereur, le rôle de la diplomatie et des diplomates à l'époque napoléonienne peut paraître marginal. Il n'en est rien : pour Napoléon, la guerre était bien la continuation de la politique. Du traité de Campo-Formio à celui de Tilsit, des accords territoriaux aux traités de commerce, les diplomates furent des acteurs essentiels de l'action extérieure du Consulat et de l'Empire. Si la question de la continuité ou de la rupture de la diplomatie napoléonienne avec celles de l'Ancien régime et de la Révolution française se pose d'emblée, celle de la contradiction entre l'idée de puissance, la volonté de paix, le désir de gloire, d'une part, et la nécessaire régulation de la vie internationale, d'autre part, est révélatrice d'ambiguïtés qu'il convient d'examiner. Qui animait la politique diplomatique et avec quels moyens ? Plus concrètement, quelle influence réelle eurent les cinq ministres des Relations extérieures - Reinhard, Talleyrand, Champagny, Maret et Caulaincourt - ou les chevilles ouvrières - La Besnardière, Hauterive, Bignon, etc. - face à la volonté de Napoléon lui-même ? Quelle était la conception du «droit international» de l'empereur et en quoi heurtait-elle ou se conformait-elle aux idées du temps ?

Par Thierry Lentz, Yves Bruley
Chez CNRS

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Editeur

CNRS

Genre

Histoire de France

 

 

 

 

 

 

Les historiens de Napoléon à la recherche de la diplomatie postrévolutionnaire

 

 

Yves Bruley

 

Alors que depuis deux cents ans tout le monde s’interroge sur la politique européenne de Napoléon, la diplomatie reste le versant le moins fréquenté de l’histoire extérieure du Consulat et de l’Empire. Chacun a bien conscience que s’il faudrait une immense bibliothèque pour contenir tout ce qui a été écrit sur la guerre et les guerriers, un petit rayonnage suffirait pour disposer les ouvrages relatifs à la diplomatie et aux diplomates. Cette diplomatie a pourtant toute sa place dans la puissance napoléonienne et fut l’un de ses moyens d’action, comme ce livre le montrera. Mais elle est restée largement dans l’ombre. Peu explorée par les historiens, elle a encore besoin d’être mise en lumière et réserve bien des occasions de découvertes.

C’est aussi l’un des thèmes qui permet le mieux d’analyser le Consulat et l’Empire : l’ère napoléonienne rompt-elle avec la Révolution ou la prolonge-t-elle ? Renoue-t-elle avec l’Ancien Régime ou cherche-t-elle à fonder une politique différente, tournée vers l’avenir ? Ces questions générales se posent aussi à la diplomatie, et les réponses permettront de mieux comprendre la période. Au seuil de ce livre, il convient d’abord de faire un bilan de ce que nos prédécesseurs ont dit sur le sujet, dans les décennies qui ont suivi la fin de l’Empire, puis à la « grande époque » de l’histoire diplomatique, et enfin dans les renouvellements récents de l’historiographie napoléonienne.

Mais en bonne méthode, il faut commencer par définir les mots.

 

 

 

 

 

« DIPLOMATIE » ET « DIPLOMATES » :
DES MOTS NOUVEAUX AU TEMPS DE 
NAPOLÉON

 

 

Le mot « diplomatie » vient du latin diploma que le Grand Siècle français a emprunté au latin impérial pour désigner une « pièce officielle authentique ». Les Romains l’avaient lui-même emprunté aux Grecs : diplôma, proprement « objet double », désignait en langage administratif une tablette ou un papier « plié en deux », dérivé de diploun « répéter, doubler ». On est loin, dira-t-on, des relations internationales. Mais en apparence seulement, car le mot français « diplôme » désigne à la fin du XVIIe siècle et au début du XVIIIe siècle une « charte, pièce officielle », tandis que la « diplomatique » (comme substantif), ou re diplomatica, est l’étude des documents officiels, puis l’étude des diplômes qui règlent les rapports internationaux (1726). Comme adjectif, « diplomatique » désigne bientôt ce qui est relatif aux relations internationales (1777). Puis apparaissent le substantif « diplomatie » (1790), dans le sens de « science et pratique des relations politiques entre les États », et enfin « diplomate » pour désigner, comme adjectif celui qui est habile dans les relations diplomatiques (1789), et comme substantif celui qui est chargé d’une mission diplomatique (17921). Notons que bien plus tard « diplomate » désignera « un entremets froid servi avec une sauce aux fruits » – Proust l’utilise dans ce sens en 1922, et sans aucun rapport avec le célèbre M. de Norpois.

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09/10/2014 376 pages 22,90 €
Scannez le code barre 9782271079909
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