#Essais

La Duchesse de Berry

Jean-Joël Brégeon

Les entreprises les plus folles sont souvent celles qui sont le plus près de réussir. Au début du règne de Louis-Philippe, tous les rapports confirment les inquiétudes que suscitaient dans la police les menées des Carlistes, comprenons des partisans de Charles X : Berryer est épié, le faubourg Saint-Germain surveillé et les journaux légitimistes saisis. Faut-il voir dans ces excès de zèle la volonté de certains fonctionnaires de police de se désolidariser du régime qu'ils avaient précédemment servi ? Nullement. La menace était réelle. Certes le complot des Prouvaires, aujourd'hui bien oublié, fut facilement déjoué. Pourtant 1 500 conjurés devaient cerner les Tuileries et s'emparer de la famille royale. Les chefs furent appréhendés avant tout commencement d'exécution. En revanche, la tentative de la duchesse de Berry de soulever la Vendée inquiéta vivement Paris. Les rumeurs les plus folles coururent alors. Un rapport de la Préfecture de police annonçait, le 30 mai 1832 : "Les événements de Vendée suscitent de l'émotion. Des négociations seraient en cours entre les Carlistes et les républicains". Qui était la duchesse de Berry ? Quelles étaient ses motivations ? Pourquoi a-t-elle échoué ? Et quelles sont les raisons de la fascination qu'elle continue d'exercer ? A ces questions Jean-Joël Brégeon apporte des réponses neuves et documentées. Voici la folle expédition de la duchesse de Berry contée par l'un des meilleurs spécialistes de la Vendée et de la Contre-révolution".

Par Jean-Joël Brégeon
Chez Editions Tallandier

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Genre

Histoire de France

 

 

 

 

 

 

Introduction

 

 

TABLEAU PHYSIQUE ET MORAL DE LA FRANCE

 

 

La jeunesse de ce temps n’a été la jeunesse d’aucune époque : elle s’est rencontrée entre les souvenirs de l’Empire et les souvenirs de l’émigration, entre les vieilles traditions de la cour et les études consciencieuses de la bourgeoisie, entre la religion et les bals costumés…

Honoré de Balzac, Ferragus, chef des dévorants, 1833

La Restauration est une période trop négligée de l’histoire de France. Réduite à quelques lignes dans les programmes des collèges et lycées, elle a fini par disparaître, ou presque, de la culture générale, et cela depuis au moins une génération(1). Ce discrédit n’est pas aussi marqué à l’université où, depuis un siècle, la Restauration n’a pas manqué d’historiens majeurs parmi lesquels C. H. Pouthas, P. Bastid, F. Ponteil, J. Vidalenc, G. de Bertier de Sauvigny, M. Agulhon, E. Lever, E. de Waresquiel… En fait, la Restauration souffre du voisinage de la Révolution et de l’Empire, de ce quart de siècle décisif qui a infléchi durablement le cours de l’histoire européenne et même du monde. La Restauration conclut et cherche même à éloigner toute une modernité radicale. Le retour des Bourbons engage la France dans un processus de repli, le temps pour elle de reprendre des forces.

Ramené à 86 départements, à ses frontières de 1792 puis à celles de 1790 (le second traité de Paris lui retire Philippeville, Marienbourg, Bouillon, Sarrelouis, Sarrebruck, Landau et la Savoie), le royaume de France doit payer le prix des défaites de l’« usurpateur » : trois ans d’occupation – 1 236 000 hommes, Prussiens, Autrichiens, Russes, Anglais, Bavarois, Piémontais, Suisses, répartis sur tout le territoire(2) – de lourdes indemnités qu’il a fallu régler en sollicitant des banquiers étrangers. Une charge telle et si promptement payée qu’elle montrait d’ailleurs que la France conservait, dans ses profondeurs, des forces et des ressources inestimables. Pourtant, le « tableau physique et moral » du pays apparaît plutôt déprimant(3). À la langueur démographique et économique viennent s’ajouter des pesanteurs sociales qui le maintiennent dans les basses eaux.

En bref, le rythme démographique : de 29 millions d’habitants au recensement de 1806 (chiffres arrondis), on passe à 30,5 millions en 1821. Tout le passif des guerres de la Révolution et de l’Empire qui ont fauché 1,25 million d’individus, en écrasante majorité des hommes. Un manque à vivre qui peu à peu se corrige puisque la population passe à 32,6 millions d’habitants en 1831, sans migrations particulières. Il reste que l’Europe du Nord-Ouest, l’Allemagne vont désormais plus vite.

Cette population est jeune. En 1826, 67 % des Français ont moins de quarante ans. Les aînés, ceux qui ont connu l’Ancien Régime disparaissent ; les acteurs de l’épisode révolutionnaire sont moins nombreux, moins actifs et tout ce recul se lit au sein du corps électoral défini par la loi électorale après 1815.

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12/02/2009 303 pages 25,00 €
Scannez le code barre 9782847343311
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