#Roman francophone

Les érections américaines

Amanda Sthers

"Connecticut. Etats-Unis. Le 14 décembre 2012, Adam Lanza, un jeune homme de vingt ans tire quatre balles dans la tête de sa mère. Puis il prend la voiture garée devant leur grande maison de Newton avant d'aller tuer vingt enfants et six adultes dans l'école élémentaire de Sandy Hook. Il est armé d'un fusil semi-automatique Bushmaster qui appartient à sa maman. I est ainsi certain de faire un maximum de victimes en un minimum de temps. Le chargeur de trente balles, rapide à enclencher, peut en tirer deux à la seconde. La dernière est pour lui."

Par Amanda Sthers
Chez Flammarion

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Editeur

Flammarion

Genre

Littérature française

Connecticut. États-Unis. Le 14 décembre 2012, Adam Lanza, un jeune homme de vingt ans, tire quatre balles dans la tête de sa mère. Puis il prend la voiture garée devant leur grande maison de Newton avant d’aller tuer vingt enfants et six adultes dans l’école élémentaire de Sandy Hook. Il est armé d’un fusil semi-automatique Bushmaster qui appartient à sa maman. Il est ainsi certain de faire un maximum de victimes en un minimum de temps. Le chargeur de trente balles, rapide à enclencher, peut en tirer deux à la seconde. La dernière est pour lui.

Je rentre de l’école avec mes fils, leurs cartables trop lourds et des miettes de leur goûter partout sur mon jean. J’ai reçu un message : T’as vu ? Alors, j’allume le poste de télévision. Ça se passe à une heure et demie de New York, la ville de mes rêves.

Je m’assure que mes petits garçons ne s’approchent pas des images de la tragédie mais je ne peux me résoudre à passer à autre chose. Ce n’est pas une info comme une autre, c’est une faille.

Le carnage récent dans un cinéma du Colorado m’avait aussi secouée mais il y avait quelque chose de « mis en scène ». Le tireur avait choisi la première du film Batman, The Dark Knight Rises, habité par le mythe du méchant Joker. Ce personnage de clown illuminé, L’Homme qui rit des temps modernes, un écho plus évident à la folie. Là, une école, maculée de neige. C’est la violence sans revendication qui fait irruption dans l’écrin pur de l’enfance. C’est surtout l’idée du silence. Arriver dans un endroit sans bruit. Se garer, prendre son arme à feu. Entrer. Toujours dans le silence. Entendre des comptines peut-être ? Des rires d’enfants. Entrer quand même.

La maman en moi s’effondre, mais l’écrivain qui a tissé sa peau tout autour reste fasciné. Ce pays ressemble à mes personnages : schizophrène, sans père, prêt à s’effondrer comme à se transcender, il est à un instant crucial, une bascule qui en fait une matière vive puisqu’on ne sait de quel côté il va verser. Comme un jeune homme génial qui peut tomber dans la drogue ou révolutionner un art selon le sens du vent. Ce pays, en âge de pays, atteint celui des romans d’initiation, le moment de vivre son éducation sentimentale, peut-être même juste avant : la sortie de l’adolescence. Les dernières poussées d’acné de l’Amérique. Et Adam Lanza est la maladie de cette Amérique, de mon personnage, son symptôme. On se dit que non, que notre héros est en pleine forme, que cette petite boule sombre ne peut pas gangrener le reste, qu’il se tient fier, qu’il parle plus fort que les autres et que c’est légitime. Mon personnage est un dur. Regardez-moi cette fougue ! Même ses erreurs ont de la gueule ! Pourtant, la tumeur se propage, Adam en est une de plus, et tous ces kystes grossissent et excitent les glandes et en fabriquent d’autres qui rapportent plus de fric si on les soigne à l’aspirine au lieu de les amputer.

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09/10/2013 126 pages 12,00 €
Scannez le code barre 9782081303454
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