INTRODUCTION
Les Éditions Manucius proposent de redécouvrir l’œuvre indispensable de Theodor Gomperz, manquante en France depuis près d’une centaine d’années, publiée entre 1893 et 1902 à Leipzig sous le titre original Griechische Denker : Geschichte der antiken Philosophie [Les Penseurs de la Grèce. Histoire de la philosophie antique, trad. Auguste Reymond, préface A. Croiset, première édition 1904, deuxième édition revue et corrigée 1908-1910, Paris, Félix Alcan, et Lausanne, Payot].
Né en Moravie le 29 mars 1832 dans une famille juive de banquiers et de commerçants, à Brünn, ville dans laquelle il entama ses études, Theodor Gomperz reçoit en 1867 le titre universitaire de Privat-docent à l’université de Vienne, puis, en 1873, celui de Professeur en Philologie Classique. Élu membre de l’Académie des Sciences en 1882, il obtient le diplôme de Doctor of Philosophy honoris causa par l’université de Königsberg, ainsi que celui de Doctor of Literature, par celles de Dublin et de Cambridge.
Comptant parmi les personnalités les plus importantes de la culture viennoise et des lettrés juifs de son temps, sa notoriété était si grande, que la presse autrichienne et allemande s’empressaient de demander à cet éminent intellectuel son avis sur des questions d’actualités, qu’il s’agisse des réformes de la monarchie habsbourgeoise, de la question juive, de l’antisémitisme, ou encore, de la réforme du système éducatif.
C’est en 1876 qu’il rencontre Sigmund Freud qui avait vingt ans. En tant qu’éditeur des Œuvres Complètes de Stuart Mill, Gomperz recherchait un collaborateur pour traduire un essai sur Platon. Son collègue, le philosophe Franz Brentano, lui recommanda Freud qui avait suivi son enseignement entre 1874 et 1876.
Gomperz n’était pas totalement un inconnu pour le jeune homme qui avait déjà assisté à une de ses conférences sur les rêves chez les peuples anciens [dans la suite de son Traumdeutung und Zauberei de 1866 que Freud citera plus tard dans son Interprétation des rêves].
Les deux hommes entretinrent pendant plus de trente ans une relation d’amitié et d’estime. [Gomperz n’hésitera pas, en 1902, à user de son influence pour soutenir Freud dans sa carrière universitaire.]
Cette influence de Gomperz sur Freud – Les Penseurs de la Grèce figurait parmi les livres préférés de l’inventeur de la psychanalyse – nous pouvons la retrouver dans l’approche historique et psychologique, dans le choix d’une situation temporelle préférée à un cadre logique et abstrait, développés dans Les Penseurs de la Grèce. Élaborer une véritable généalogie de la pensée grecque, situer les philosophes dans leur temps, et par là même, présenter un développement progressif de l’humanité depuis sa phase primitive, n’a sans doute pas manqué d’inspirer Freud.
Theodor Gomperz meurt le 29 août 1912, laissant derrière lui près d’un demi-siècle de travaux philologiques, une œuvre aussi colossale qu’indispensable à celui qui, pour peu qu’il s’intéresse à l’histoire de la pensée grecque, y prêterait quelque attention.
Extraits
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