#Roman francophone

Passages du désir

Cécile Huguenin

Qui peut bien se soucier de Clara Davidson ? Quand Titus, jeune homme oisif et insouciant, apprend au hasard d'un flash info la disparition de Clara Davidson, il décide sur un coup de tête de se lancer à sa recherche. Muse et veuve d'un célèbre créateur de mode, Clara a ouvert à Zanzibar une maison d'hôtes très prisée par une clientèle essentiellement féminine. Persuadé de s'engager dans une aventure digne des BD dont il est friand, c'est finalement dans une épopée sensuelle que Titus se retrouvera embarqué. Initié aux mystères du plaisir féminin, il apprendra à son corps défendant, puis consentant, que le désir peut s'écrire au pluriel et découvrira que la rencontre avec le corps de l'autre est un troublant jeu de miroirs...

Par Cécile Huguenin
Chez Editions Héloïse d'Ormesson

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Genre

Littérature française

À celles qui ont peur de vieillir

À celles qui ont peur d’être trop vieilles

Aux intrépides qui n’ont pas peur d’avoir peur

 

 

 

Ne riez pas de l’autobus : il n’est pas de lieu

d’élection pour le coup de foudre…

L’imprévu demeure la seule puissance

capable de rendre de la chaleur à la vie.

Pascal Bruckner

Lunes de fiel

 

 

TITUS, JEUDI 3 DÉCEMBRE 2020


« Mon histoire à Zanzibar a commencé par un rêve, s’est déroulée comme un conte et se termine en cauchemar. »

Cette phrase, écrite à la main dans un cahier à demi calciné, est tout ce que l’on a retrouvé de Clara Davidson, dans les décombres de l’incendie qui a détruit sa maison.

Cette active septuagénaire, ressortissante française, veuve du couturier et créateur de la célèbre marque de prêt-à-porter La Ronde des fées, se rendait fréquemment à Zanzibar pour des actions humanitaires. Elle avait fini par s’installer définitivement dans l’archipel et depuis trois ans proposait des chambres d’hôtes très appréciées par une clientèle essentiellement féminine.

On m’informe à l’instant que l’hypothèse d’un acte malveillant vient d’être confirmée. Les premières investigations n’ont heureusement décelé aucune victime. Mais nous sommes sans nouvelles de Clara Davidson, à ce jour introuvable.

Le visage lisse du présentateur est remplacé par une image qui emplit l’écran. C’est un cahier convulsé, dont la couverture, qui a dû être bleu turquoise, est striée de traînées noirâtres. Image suivante. Le cahier est ouvert à la première page, intacte. La phrase citée en ouverture de ce fait divers s’étale un bref instant sur deux lignes clairement lisibles. Signes noirs sur fond blanc.

Et maintenant le reste de l’actualité…

Quelques secondes de suspense et une vie tout entière vient d’être compressée, jetée en pâture à des milliers d’oreilles distraites, puis abandonnée pour laisser place à l’information suivante.

C’est le journal télévisé du 20 heures.

Qui peut bien se soucier de Clara Davidson ?

 

 

CLIC. TITUS VIENT D’APPUYER sur le déclencheur. Il fait ce geste mille fois par jour depuis qu’il a, par un heureux hasard, découvert son style photographique. Il préfère dire inventé. Il n’a jusque-là partagé avec quiconque sa trouvaille, qu’il nomme pick bits, raccourci anglicisant et approximatif de voleur de fragments. Chaque prise est le produit d’une impulsion autoritaire qui coordonne ses yeux et son geste pour capter la scène qu’il ne peut pas manquer. Photographier un écran de télévision est pour lui une première, mais il a fini par acquérir, sans trop savoir comment, des réflexes de professionnel.

Vingt-quatre images pour faire une seconde de film, appareil réglé au quinzième de seconde. Planté devant l’écran, Titus mitraille. Il tient cet objet à bout de bras, comme un trophée arraché à la concurrence de l’information. Un scoop. Un fragment de vie, un fragment de femme. Les clics se succèdent tandis que le cliquetis des cuillers dans les assiettes s’impatiente.

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01/06/2017 224 pages 19,00 €
Scannez le code barre 9782350874159
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