#Roman jeunesse

Un secret de famille

Marie-Christophe Ruata-Arn

Qui n'a pas rêvé de gagner un million au loto ? Et pourtant, lorsqu'une mallette pleine de billets de banque débarque, par hasard, dans une famille qui en aurait bien besoin, c'est le cauchemar !

Par Marie-Christophe Ruata-Arn
Chez La Joie de Lire

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Genre

Lecture 9-12 ans

 

 

 

 

 

 

LE CADEAU DE MON FRÈRE

 

 

Tout est prêt : mon gâteau d’anniversaire – aux amandes, mon préféré – et ses treize bougies. Mon père, un verre à la main ; ma mère, un œil sur mon père, et Guida ma grande sœur, habillée pour la circonstance avec la robe blanche qu’elle ne met plus pour la disco.

 

Et puis, de l’autre côté de la minuscule table de notre minuscule cuisine : mes deux cadeaux. Le sixième tome des Aventures de Jenny et de son chien, un cadeau de mes parents qui savent que j’adore lire, mais n’ont toujours pas compris que j’ai déjà terminé l’école primaire.

Et un sèche-cheveux dernier cri. Cadeau de Guida. Sa manière à elle de me demander :

« Quand vas-tu enfin commencer à te comporter comme une fille ? »

 

Entre les uns qui me traitent comme un bébé et l’autre qui me traite de garçon manqué, le seul dans ma famille qui me comprenne, c’est Joao mon grand frère. Et justement, il manque à l’appel ; un détail.

Un détail de presque 90 kilos pour 1 mètre 90, qui travaille dans un atelier protégé. Dans une de ses lettres parfumées à la fleur d’oranger, Maï, ma grand-mère, m’a demandé qui se protège de qui. Je n’ai pas su lui répondre. Les médecins qui ont évalué le « développement mental inadapté » de Joao auraient su, eux. Peut-être.

 

Joao, je l’aime. Hors de question de commencer le gâteau sans lui. Alors on attend.

 

Je regarde ma mère se faire un sang d’encre. Et mon père qui se sert un autre verre de vin en attendant de manger le gâteau des treize ans de son « petit poupon » – un surnom agaçant, non ?

 

Je pousse un soupir en même temps que ma mère et que Guida.

 

En ce moment, on songe toutes à Maï, lorsqu’elle apostrophe mon père de son : « Attention ! Qui a bu boira ! »

 

Maï, la maman de maman, qui tire les cartes et guérit les verrues, furoncles et autres petits embarras avec des prières et un secret qu’elle me révélera un jour.

Maï qui est restée à Lisbonne. Et dont les cadeaux sont toujours une manière de nous demander : « Quand est-ce que vous quittez ce pays de sauvages ? Quand est-ce que vous rentrez à la maison ? » Mon père prétend qu’elle le fatigue rien qu’en le regardant.

 

L’horloge électrique du salon sonne 21 heures. La tension monte d’un cran. Guida veut téléphoner au poste de police de la cité. Mon père refuse : la police, on ne l’appelle qu’en dernier recours. Ma mère regarde d’un mauvais œil le verre qu’il finit cul sec et lâche, aigre :

– Evidemment, à partir d’un certain stade, on n’a plus conscience du danger !

 

Voilà une dispute qui se prépare ou je ne m’y connais pas. D’un pas, je suis dans notre minusculissime salon :

– Je mets un peu de musique ?

 

Ma mère, mon père et Guida ont l’indélicatesse de crier en écho d’une seule et stridente voix. Même s’ils n’aiment pas Avril Lavigne, ils pourraient bien faire un effort le jour de mon anniversaire, non ?

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20/04/2005 191 pages 9,00 €
Scannez le code barre 9782882583147
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