#Bande dessinée jeunesse

Une planète dans la tête

Sally Gardner

Standish vit avec son grand-père dans la "zone 7", celle des impurs, privés de tout, surveillés en permanence... Dyslexique, il subit à l'école brimades et humiliations jusqu'au jour où il se lie d'amitié avec son nouveau voisin, Hector. Ensemble, ils rêvent de s'évader sur Juniper, la planète qu'ils ont inventée. Mais Hector et ses parents disparaissent sans laisser de trace... Ont-ils été supprimés ? Le récit coup de poing d'un jeune garçon atypique face au totalitarisme. Un héros inoubliable, un roman bouleversant. Fait exceptionnel, une planète dans la tête a reçu les deux prix littéraires britanniques les plus prestigieux : Carnegie Medal (2013), prix Costa (2012), ainsi que la sélection du Prix des Libraires Indépendants.

Par Sally Gardner
Chez Editions Gallimard

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Genre

12 ans et +

 

 

Un

 

Je me demande si…

Si le ballon de foot n’était pas passé par-dessus le mur.

Si Hector n’était pas allé le chercher.

S’il n’avait pas gardé l’abominable secret pour lui.

Si…

Alors, je me raconterais sans doute une autre histoire. Voyez-vous, les « si » sont comme les étoiles, innombrables.

 

 

 

Deux

 

Mlle Connolly, notre précédent professeur, nous serinait toujours qu’il fallait commencer une histoire par le début. Nettoyer une fenêtre pour voir au travers. Tout bien réfléchi, je ne suis pas certain que ce soit ce qu’elle ait voulu dire. Personne, pas même Mlle Connolly, n’ose écrire ce que nous voyons de l’autre côté de cette vitre sale. Il vaut mieux ne pas regarder dehors. Et si on ne peut l’éviter, il est préférable de se taire. Je ne serais pas assez bête pour consigner cela noir sur blanc.

Même si j’en avais la possibilité, je ne pourrais pas.

Voyez-vous, je suis incapable d’épeler mon nom.

Standish Treadwell.

Je ne sais pas lire, pas écrire.

Standish Treadwell n’est pas une lumière.

Mlle Connolly est la seule à avoir jamais affirmé que ce qui distinguait Standish des autres, c’était son originalité. Cela faisait sourire Hector. Il l’avait compris dès le début, me disait-il.

– Il y a ceux qui suivent les chemins balisés et puis il y a toi, Standish, une brise dans le parc de l’imagination.

Je me le suis répété : « Et puis, il y a Standish dont l’imagination souffle comme une brise sur le parc. Standish qui ne voit même pas les bancs mais remarque que, là où il devrait y avoir de la merde de chien, il n’y en a pas. »

 

 

 

Trois

 

Quand le mot en provenance du bureau du directeur est arrivé en cours, je n’écoutais pas. Hector et moi étions dans la ville au-delà de l’eau, dans un pays où les immeubles ne cessent de grimper jusqu’à épingler les nuages dans le ciel. Où le soleil brille en Technicolor. La vie à une extrémité de l’arc-en-ciel. Je me fiche du discours officiel, je l’ai vu à la télé. Les gens chantent dans les rues – ils chantent même sous la pluie, ils chantent en dansant autour d’un réverbère.

C’est une ère de ténèbres. On ne chante pas.

Cela dit, c’était le meilleur rêve éveillé que je faisais depuis la disparition d’Hector et de sa famille. Je m’étais surtout appliqué à ne pas penser à lui. Je m’étais efforcé de m’imaginer sur notre planète, celle qu’Hector et moi avions inventée : Juniper. C’était mieux que de me rendre malade à envisager ce qui avait pu leur arriver. En plus, c’était un de mes meilleurs rêves éveillés depuis bien longtemps. J’avais l’impression qu’Hector était à nouveau avec moi. Nous roulions dans une interminable Cadillac couleur pastel.
Je sentais presque l’odeur du cuir, bleu intense, bleu azur, bleu des sièges en cuir. Hector était à l’arrière. Moi, un bras appuyé sur la portière, la vitre descendue, une main sur le volant, je nous ramenais à la maison boire un Croca-Cola – une cuisine lumineuse avec une nappe à carreaux, et un jardin où on aurait cru la pelouse passée à l’aspirateur.

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trad. Catherine Gibert
26/09/2013 253 pages 14,90 €
Scannez le code barre 9782070650415
9782070650415
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