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Etudes

Les grandes écoles. La fabrique des meilleurs

Les grandes écoles françaises exercent sur les élèves et parents d'élèves des classes terminales des lycées, mais aussi sur une importante partie de ceux du supérieur, un pouvoir d'attraction très puissant, et ce depuis fort longtemps. Pour s'en convaincre, il suffit de se reporter à la structure des voeux d'orientation tels qu'exprimés sur la plateforme Parcoursup, portail télématique de pré-inscription pour le passage en première année de l'enseignement supérieur. On s'étonne cependant que ces établissements d'enseignement supérieur professionnel de haut niveau soient une spécificité française. L'histoire nous apprend en effet qu'à l'époque de l'émergence des premières grandes écoles en France, aux XVIIe et XVIIIe siècles, puis de leur montée en puissance et en nombre tout au long des années Suivantes, jusqu'à nos jours, on a en France fait le choix de confier à des petites structures très sélectives, le soin de former une grande partie des "élites" dont le pays a besoin. Ce livre se penche sur les raisons de ce choix historique, un choix qui n'a guère d'équivalent dans les autres pays où on a très majoritairement préféré se tourner vers les universités pour remplir cette même mission. Si nous avons insisté sur la présentation du processus de création et de développement des grandes écoles, c'est parce que ces établissements, aujourd'hui encore très convoités, et donc très sélectifs, malgré un indéniable processus de démocratisation concernant leur recrutement d'élèves, c'est parce que nous pensons que les candidats d'aujourd'hui ont tout à gagner à savoir ce que sont les fondements historico-socio-économiques de ce secteur de l'enseignement supérieur, afin de bien s'en imprégner avant de se présenter à leurs diverses épreuves de sélection, ne serait-ce que pour accroître leurs chances d'y être admis. Mais parvenir à se faire admettre dans une grande école demande bien plus que cela. Entrer dans une grande école c'est entrer dans un univers de formation particulier, qui le distingue des autres. Est-on bien conscient de cela ? Est-on prêt à adhérer à la "culture" (au sens ethnologique du terme) de ce milieu particulier, donc à ses traditions, usages, valeurs et exigences ? Il est d 'autant plus important de bien réfléchir à ces questions à l'avance que la sélection n'est pas faite que d'épreuves visant à s'entourer de garanties concernant les savoir et savoir- faire acquis par chaque candidat(e) , mais aussi pour ne recruter que des élèves compatibles avec le système de valeurs propres à chacune des grandes écoles convoitées, mais aussi celui qui caractérise le monde professionnel auquel on va s'y préparer. Il en va de la certitude que le choix d'une orientation vers une grande école est véritablement le bon , mais aussi de savoir si ce qui attend un jeune une fois admis dans une grande école conviendra, durant le parcours d'études mais aussi, et surtout, durant la quarantaine d'années de vie professionnelle qui l'attend à son issue. Bien plus qu'une simple boite à outils de type purement scolaire, cet ouvrage va vous aider à répondre à la question que chacun devrait se poser avant de frapper à la porte d'une grande école (ou de toute autre formation) : suis-je fait pour de telles études et métiers ?

11/2022

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Faits de société

Ould Haram. L'enfant du péché

Jamil, s'angoissait, il allait rencontrer pour la première fois sa mère Latifa, une grande bourgeoise marocaine, qui l'avait échangé à la naissance contre sa tranquillité, lui l'enfant du pêché, et qu'il avait retrouvée et piégée sur les réseaux sociaux, 20 ans après. Il pensait avec tendresse à la bonne Khadija, dont il savait maintenant qu'elle n'était que sa mère adoptive. Une maîtresse femme, la Mouille l'avait élevé avec amour, dans cette banlieue française, selon les principes berbères les plus rigoureux mais aussi les plus archaïques, en résistance au mode de vie des " gwères ". Il s'agissait avant tout de ne pas donner prise au persiflage des commères voisines, que ne manquerait pas de relayer, jusqu'au bled, le téléphone arabe. Jusqu'ici, Khadija et son époux avaient réussi à construire une réputation sans faille qui suscitait le respect du voisinage. Pour Jamil et ses soeurs, tiraillés entre deux cultures qu'un gouffre sépare, le difficile combat pour l'intégration s'amorçait. D'autant qu'à cinq ans, à l'heure de ses premiers pas à l'école, Jamil ne parlait encore que le berbère ancien. A douze ans, il avait été troublé par le chaleureux sourire dugendarme quinquagénaire qui l'avait pris sous son aile dans le camp disciplinaire où il avait été envoyé. A quinze ans, en vacances au bled, il découvre l'amour charnel avec un cousin éloigné, le bel Abdelkeb, le " toubib aux plantes ", un quadragénaire de la vallée de Zagora. Dans la cité son copain de classe, Abdou le Gazou, le caïd et tombeur de filles aux yeux de gazelle le prend en affection et devient son protecteur. Il lui avouera son amour. Hélas, Jamil n'aime que les hommes en pleine maturité. Il en rencontre beaucoup, tous des " gwères " cultivés et influents, dans la force de l'âge. Une inclination pour les amours masculines qu'il est impossible d'avouer dans le contexte de la cité. Et surtout pas à sa famille. Latifa arriva très en retard dans le salon de thé. Elle, toisa l'intrus, visiblement venu directement des cités françaises dont il portait l'uniforme. Elle jeta un regard méprisant à la casquette posée sur la banquette et prit place avec un sourire contraint. D'entrée, elle doucha ses espoirs : nous appartenons à deux mondes différents. Tu n'es pas le bienvenu ! Jamil était dévasté. Deux mondes différents, certes. Il réalisa que l'un d'eux était celui de la dissimulation, de l'hypocrisie, du renoncement de soi par peur du regard des autres. Il n'en voulait plus. Bientôt, il rencontrerait Bertram, l'homme de sa vie, son Pygmalion. Ensemble, ils feront le voyage en Californie où naîtront leurs deux adorables bambins, les enfants de l'amour.

02/2022

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Critique littéraire

Georges Haldas. L'invisible au quotidien

La lecture du dossier " politique " de Georges Haldas conservé aux Archives fédérales à Berne, point de départ de cet ouvrage, a fait ressortir par contraste à l'interlocuteur de ces entretiens la vraie présence de l'écrivain. Les rapports des inspecteurs, plus il s'y plongeait, plus vain, inconsistant, lui apparaissait leur contenu. Les raisons de cette surveillance sur plus d'une quarantaine d'années ne transpiraient jamais dans les documents "officiels", qui les avait commandés, qui les supervisait?, et leur utilisation éventuelle restait inconnue. Seul régnait, reflété dans la première partie de cet ouvrage, état de meurtre, un climat de lourde suspicion à l'endroit de celui qui était considéré comme trop à gauche, donc dangereux, pendant la période de chasse aux sorcières communistes qui avait caractérisé l'après-guerre. Mais comment lui reprocher, sans tomber dans le ridicule, ses déclarations politiques qui encourageaient les hommes à se consacrer à la paix? A travers les propos rapportés par les fonctionnaires scribouillards, apparaissent avant tout les traits d'un personnage enclin à témoigner sa sympathie pour les plus défavorisés. Georges Haldas, en définitive, n'a jamais été un homme d'action mais, tout simplement, "un homme qui écrit", selon l'expression qu'il affectionne. Quelles actions retenir dès lors contre cet être inoffensif ? Par contrecoup, ce fichage absurde conduisit l'interlocuteur insensiblement à se nourrir d'éléments bien plus essentiels, abordés dans ses conversations avec Haldas. Une eau précieuse irrigua soudain le désert des lignes fixées dans les classeurs fédéraux. Elle portait la voix d'un écrivain habité par la graine qui illumine sa vie quotidienne, cherchant à créer un pont entre le dedans et le dehors des êtres rencontrés en transcrivant le plus fidèlement possible leurs résonances en lui. Ainsi se précisa peu à peu son cheminement vers l'écriture, depuis ses premiers balbutiements à la sortie du collège jusqu'à ses formes les plus abouties et qui dessinèrent les contours, sujet de la deuxième partie, état de poésie, auquel lui est indissolublement attachée la fraternité obscure des vivants. Une parole démarquée d'une surveillance policière, libre alors de ses mouvements, se développa, toute d'inspiration, de nature à rendre l'homme plus ouvert à son intériorité, à mille lieues du monde matériel qui écrase notre société assoiffée de biens de consommation. Elle prit son envol dans état de résurrection, troisième et dernière partie, pour devenir nourricière, christique, traduisant les questions fondamentales de la vie, de la mort, etc., et d'où germèrent, bien plus tard, ces entretiens, accompagnés d'extraits de textes souvent inédits, dédiés à tous ceux pour qui l'imprévisible, l'infini, l'invisible gardent un sens. Comme l'écho du miracle que constitue chaque jour pour nous tous le simple fait d'exister, sur cette planète, sans savoir pourquoi.

11/2012

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Cinéma

Sous tant de paupières. Bergman avant la mondialisation des écrans

Sous tant de paupières qui ne sont plus une magique exaltation de la pure contradiction de la rose ni la volupté de n'être le sommeil de personne, mais plutôt le joint visible derrière la caisse des salles obscures du monde entier qui vendent, fort chères, des images de nulle part et de partout, répétitives, le spectacle continue. Désireuses, au départ, d'éveiller peut-être l'esprit du spectateur, elles abrutissent à coup sûr, maintenant, les foules conditionnées par le marketing de compagnies internationales déterminées à supprimer la nature et la civilisation pour enrichir leurs bilans. Marée noire de la conscience universelle, une telle mondialisation détruit à l'ordinateur sophistiqué ce qu'autrefois les humains constituaient bien ou mal en valeurs, pour ne récolter que l'argent, système transcendant qui n'aboutit, évidemment, qu'à l'argent. Tout le reste ne sera, dès lors, que le tableau des performances idéalisées et sponsorisées, culturelles ou sportives, emblèmes de la transformation des sociétés post-modemes. Le rêve commun, auparavant, fabriqué par la technologie et déposé photographiquement sur la pellicule, offrait aux auteurs, pauvres ou disposant de studios faramineux, le choix des instants privilégiés de l'époque afin d'exprimer au mieux ce qu'ils voulaient dire, malgré de considérables facteurs commerciaux redoutables et, néanmoins, détournables. Après la fin de la Deuxième Guerre mondiale, en sept décennies consacrées à la conservation, illégale souvent, des films officiellement voués au pilon et à l'appréciation personnelle de leurs qualités ou de leurs défauts, j'ai vécu le cinéma comme un art véritable qui me portait vers les livres, la peinture et les autres écritures susceptibles d'améliorer ma compréhension de la vie. Or, depuis la mort d'Ingmar Bergman et celle de Michelangelo Antonioni pendant l'été 2007, puis du montage prodigieux d'Histoire(s) du cinéma de Jean-Luc Godard, la rétrospection émouvante s'enflamma tandis que l'avenir parut s'éteindre à l'ombre d'Internet. La situation multiplia, par bonheur, la quantité des pays producteurs cités en désordre ici avec une insistance sur les thèmes abordés qui discutent la tonalité permanente de la servilité nourrie par les astuces de la publicité, du faux bonheur et du mensonge médiatique. A travers de petites ouvertures, néanmoins, qui s'efforcent de clamer ce que les peuples refusent d'entendre et qui butent devant la télévision massive et l'énorme flux iconographique aux méthodes pavloviennes, des cris et des chuchotements parviennent encore jusqu'au solitaire citoyen de même que chez Lévi-Strauss après les pages de Tristes Tropiques (titre exact de notre planète funeste) " dans le clin d'oeil alourdi de patience, de sérénité et de pardon réciproque qu'une entente involontaire permet parfois d'échanger avec un chat ".

11/2010

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Fantasy

Le septième guerrier-mage

Prix Imaginales des lycéens 2016 J'ai pillé, brûlé, tué. Puis j'ai déserté l'armée la plus puissante du monde. Je voulais être libre, vivre la belle vie loin de cette foutue guerre... Mais voilà que je dois défendre un village de paysans contre cette même armée dont je portais les couleurs. Des milliers de soldats sont en marche. Former des combattants, monter des fortifications, trouver des armes... Ces culs-terreux croient dur comme fer que je porte le pouvoir d'un Guerrier-Mage. Moi, je ne donne pas cher de nos peaux. Mais il y a au moins une personne dans cette vallée que je ne pourrai jamais abandonner, alors j'irai jusqu'au bout. Mon nom, c'est moi qui l'ai choisi : je suis Jal, celui-qui-ose. " Un roman passionnant qui arrive à vous accrocher dès la première page. Original, bien rythmé, bien écrit, au style simple, limpide - on tombe sous le charme des personnages. " Gamalive " Imaginez les Sept Samouraïs de Kurosawa, le tout revisité à la sauce western avec un déserteur bad ass qui n'a rien d'un enfant de choeur. " Jean-Sébastien Guillermou, auteur des Pirates de l'Escroc-Griffe Court extrait : Sache, dit-elle, que je suis le seigneur de ces lieux. Je défends la vallée de Thorkel, depuis la tête d'elfe taillée dans le roc jusqu'au col de l'aigle. La moindre brindille, le moindre caillou, est sous ma protection, ainsi que tous ceux qui vivent ici. Je l'écoute à peine, car elle vient de glisser un brin d'herbe-de-prince dans ma bouche et je suis bien trop occupé à essayer de l'avaler. Sa douce brûlure épicée envahit mon corps, et la douleur de mes blessures s'estompe peu à peu. S'il vous plaît... protégez Gloutonne... Dame Rikken se penche sur moi. Que dis-tu, Sudien ? Ses yeux d'un bleu glacial me ramènent à la réalité. La douleur a reflué, je flotte comme sur un nuage. Où sont... mes deux compagnons ? Morts. Chienne de guerre. Et les cavaliers du roi... , dis-je dans un murmure. Eux aussi, ils sont... ? Plus que morts. Ils sont démembrés, déchiquetés, en miettes, répond-elle avec un étrange sourire de connivence. Quoi ? C'est vous ? Qui... qui les avez tués ? Le sourire disparaît. Elle me jette un regard étonné. Bien sûr que non. Qui, alors ? C'est toi. Tous les quinze. Tu ne t'en souviens pas ? Hein ? Moi ? Elle hausse les épaules. Maintenant, joli coeur, je vais arracher la lance d'un coup sec. Je te préviens, ce sera douloureux. " Il n'y a pas de combat sans souffrance ", disait Maître Hokoun. © Bragelonne 2015

05/2022

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Poésie

Le Soleil d'Alexandre. Le cercle de Pouchkine 1802-1841

En Russie, depuis deux cents ans, chaque écrivain, chaque courant, chaque époque peut se retrouver dans Pouchkine, car celui-ci est un miroir, le lieu de la reconnaissance de toute personne de langue maternelle russe. André Markowicz propose dans cet ouvrage de découvrir en quoi la conversation que Pouchkine a établie par textes interposés avec les poètes de sa génération a durablement marqué la littérature et la pensée russes jusqu’à nos jours. Cet ouvrage remarquable par son ambition vient rendre hommage à la génération brisée par le 14 décembre 1825, jour du coup d’Etat manqué contre le tsar Nicolas ier, coup d’Etat qui avait été organisé par de jeunes aristocrates, pour la plupart officiers des guerres napoléoniennes, indignés par le servage et l’absolutisme. La répression qui s’ensuivit fut d’une ampleur inégalée, et le règne de Nicolas ier devint celui de la censure, de la délation et des arrestations. Des poètes et écrivains qui faisaient partie de ce que l’on appellera les décembristes, la plupart mourront avant d’avoir passé la cinquantaine, victimes de la violence du régime. Mais ils n’ont cessé, tout au long de leur vie, de se fréquenter, d’échanger, de s’écrire et d’écrire en réponse les uns aux autres, entretenant une conversation destinée à devenir le fondement de la culture russe. C’est de cette conversation – qui n’a pas d’équivalent dans la littérature occidentale puisqu’elle s’est poursuivie, au-delà de la mort, à travers les textes et la mémoire, avec tous les écrivains russes qui ont suivi – que Le Soleil d’Alexandre voudrait donner un aperçu, en plaçant au centre celui qui n’a jamais quitté cette place depuis son apparition, à quinze-seize ans, dans les cercles littéraires : Alexandre Pouchkine. Depuis deux cents ans en effet, Pouchkine a toujours été au centre de tous les débats intellectuels, de toutes les interrogations et affirmations identitaires en Russie – de son vivant et, bien plus encore, après sa mort. Pas un seul écrivain (à part Tolstoï et Tchekhov) qui ne lui ait consacré un texte – de Gogol à Dostoïevski, de Blok à Maïakovski, des futuristes les plus radicaux à Anna Akhmatova, de Mikhaïl Boulgakov à Marina Tsvetaïéva, de Soljenitsyne à Siniavski… Quant à Tolstoï et Tchekhov : qui peut lire Anna Karénine sans penser aux lettres de Tolstoï affirmant qu’il s’est lancé dans la composition de ce roman après avoir relu toute la prose de Pouchkine ? Et qui peut lire Les Trois Sœurs sans voir le rôle qu’y joue le prologue de Rouslan et Lioudmila ? En décembre 1917, Mandelstam écrivait dans les strophes de “Cassandre”, avec d’autres poèmes de révolte et de combat, devant l’avènement de la dictature bolchévique et l’écroulement de l’ancien monde qu’elle portait en germe : Malade, silencieuse Cassandre, je n’en peux plus, pourquoi, Luisait le soleil d’Alexandre, Voici cent ans, luisait pour tous ? Le soleil d’Alexandre, c’est celui d’Alexandre Pouchkine.

09/2011

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Sciences historiques

Une description inédite de la cathédrale de Tournai au siècle des Lumières. Les écrits du chanoine Denis-D. Waucquier, 1742-1752

A l'occasion des travaux de stabilisation et de restauration de la cathédrale, nous avons trouvé judicieux de rendre ces témoignages accessibles à tous par le biais d'une édition scientifique, étant donné que l'importance de ces écrits qui se situent à la charnière entre ceux du chanoine Jean Cousin (1620) et les destructions consécutives à la Révolution française. Il est vite apparu que la personnalité de l'auteur méritait une approche pluridisciplinaire : une équipe de chercheurs s'est mise en place pour introduire l'édition par des analyses portant sur le personnage, sa bibliothèque et le regard qu'il portait sur les transformations esthétiques de "sa" cathédrale. Florian MARIAGE a scruté la biographie surprenante de ce chanoine natif du diocèse de Cambrai : ses premières années à Tournai, ses titres universitaires et l'appui de l'évêque de Tournai qui lui confère une prébende au chapitre cathédral, ses traits de caractère (moraliste, misogyne, confident, assidu aux offices), le protecteur des privilèges et du patrimoine culturel, le témoin de son temps, le compilateur, l'historien, le nostalgique. Claude SORGELOOS voit en Waucquier le plus discret des bibliophiles du chapitre Notre-Dame de Tournai, dont le nom n'apparaît qu'au moment de la vente de ses livres en 1763, de manière posthume mais éclatante : le catalogue de vente ne compte pas moins de 263 pages, énumérant 3 924 lots ! Une bibliothèque richissime qui dépasse largement les 10 000 documents. Dans ce qui fut la plus grosse vente de livres à Tournai au XVIIIe siècle, on découvre le théologien, le juriste, le scientifique, le mondain, le gourmand, le géographe, l'amateur de belles lettres, d'estampes, d'architecture, de musique et de manuscrits. Selon Caroline HEERING, le témoignage de Waucquier sur l'état de la cathédrale et de son mobilier au milieu du XVIIIe siècle est exceptionnel. L'auteure l'inscrit dans le paysage architectural des anciens Pays-Bas, qu'elle brosse à larges traits. Elle fait aussi émerger deux caractères des écrits de Waucquier qui reflètent les positions défendues par le "clergé des Lumières" : d'une part, une nécessité d'embellir les cathédrales en suivant les principes du "bon goût" du XVIIIe siècle, et d'autre part, une grande admiration pour l'architecture du passé, en particulier gothique. L'édition des écrits inédits de Waucquier (par Jacques PYCKE) comporte la description minutieuse de la cathédrale qu'il avait sous les yeux, et qu'il connaissait particulièrement bien en tant que maître de la Fabrique : le bâtiment, le mobilier, le décor de marbre, les vitraux, les tapisseries, les pierres tombales et les épitaphes avant leur suppression en 1742 en raison de leur vétusté, ainsi que les usages et les dévotions particulières des chanoines. Comme à l'accoutumée, cette publication a pu compter sur la générosité, la compétence et le talent de Marie VAN EECKENRODE (mise en page), d'Ingrid FALQUE (couverture) et de Benoît DOCHY (illustrations).

11/2017

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Histoire de France

L'énigme du massacre de Katyn. Les preuves, la solution

Avril 1943 : trois mois après la défaite nazie à Stalingrad et alors que la Wehrmacht reflue vers l'ouest, Joseph Goebbels annonce que l'armée allemande a exhumé à Katyn, prés de Smolensk, un charnier contenant plusieurs milliers de prisonniers de guerre polonais. Souhaitant sans doute ainsi diviser le camp allié, il impute ces massacres aux Soviétiques en les datant du printemps 1940, soit avant l'invasion allemande du 22 juin 1941. Dès le début, le rapport nazi, concocté visiblement à la va-vite, présente des incohérences, notamment le fait que les douilles des balles retrouvées sont de marque allemande. Les Soviétiques récusent aussitôt les allégations allemandes ; le gouvernement polonais en exil à Londres, en revanche, s'empresse de valider la version nazie. Septembre 1943 : ayant reconquis la région de Smolensk, les Soviétiques entament une contre-enquête ; ce sera le rapport Bourdenko qui atteste du fait que les Allemands ont capturé ces prisonniers de guerre polonais après l'invasion de l'URSS et les ont exécutés en 1941. Des documents trouvés sur les cadavres, postérieurs au printemps 1940, sont ainsi présentés aux observateurs internationaux. La propagande de Goebbels devient néanmoins, surtout à partir du maccarthysme, un dogme anticommuniste de la guerre froide. En 1992 les antisoviétiques exultent lorsque Boris Eltsine remet ou gouvernement polonais un dossier secret attestant prétendument de la culpabilité des Soviétiques. Dès 1995, ce rapport est néanmoins invalidé par des enquêteurs russes indépendants, qui montrent notamment que le tampon utilisé sur rune des lettres contenues dans le dossier secret est celui du PCUS (nom du parti communiste à partir de 1952), alors qu'en 1940 le parti portait encore le nom de Parti communiste pansoviétique (bolchevik). C'est ce tampon pour le moins anachronique que nous reproduisons en couverture du présent livre au-dessus du cartouche de titre (voir aussi la légende de l'illustration de cette couverture en page 2). On aurait pu en rester là, n'eût été la découverte faite, en 2011 d'un charnier à l'Ouest de l'Ukraine à Volodymyr-Volynskyï. Le site présente des balles allemandes datées de 1941, porte la marque indéniable des méthodes utilisées par le SS Jeckeln et contient les dépouilles de femmes exécutées avec leurs enfants — alors que les Soviétiques, contrairement aux nazis, n'ont jamais, nulle part, exécuté d'enfants. Mais on y trouve aussi deux badges de policiers polonais qu'on avait présentés comme ayant été tués lors des massacres de Katyn et enterrés à 1 200 kilomètres de là. Cela atteste du fait que les prisonniers de guerre polonais n'ont pas été exécutés en 1940 mais ont été capturés puis assassinés par les nazis après l'invasion de 1941. La thèse de la culpabilité soviétique à Katyn s'effondre. Dans ces conditions, une question se pose : continuera-t-on encore longtemps d'enseigner dans nos écoles la propagande de Joseph Goebbels ?

12/2019

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Littérature française

Fred - un instituteur laïque sous la Troisième République

Jean-Paul Colin, nous propose de (re)découvrir un roman de Victor-Eugène Magdelaine, son grand-oncle né en 1876 à Chamblay dans le Jura. Un ton d'autrefois vient se mesurer à celui d'aujourd'hui sans aucune honte ni discordance. Puis on fait la connaissance de Fred, héros de ce roman, élève de l'Ecole normale laïque d'instituteurs de Lons-le-Saulnier, sous la Troisième République. Avec lui, nous franchissons le seuil d'écoles dans lesquelles l'aspect éducatif revêtait un aspect religieux et militaire et où "? labeur et vertu sont prônée ? " aux dépens de valeurs et d'enseignements réels. Fred, esprit talentueux et libre va se battre de toute sa jeunesse contre les pouvoirs oppressants de ceux qui les détiennent et dirigent. Il ne peut se contenter d'être une petite lampe dans la rue du village, il veut aussi écrire et "? peupler des déserts ? ", les siens en l'occurrence. Ils étaient là, de trente-cinq à quarante, dans une salle étroite et longue, aux murs peints en vert et qui, malgré la lumière qu'elle recevait en abondance, avait un aspect sévère et triste. Ils étaient là, de trente-cinq à quarante jeunes gens, qui aspiraient à l'Ecole normale. Courbés sur de vieux pupitres en chêne que le temps et l'usage avaient mordorés, on ne voyait que leurs dos et le dessus de leurs têtes : têtes aux chevelures de nuances variées ; dos puissants ou malingres. Et dans le silence on entendait le crissement des plumes, le frottement des semelles ferrées sur le parquet, des toux nerveuses, des soupirs de contentement ou de désespoir. Ils commentaient la parole de Vauvenargues : "Les grandes pensées viennent du coeur" . Ils écrivaient, biffaient, ajoutaient, et les phrases se suivaient, boiteuses, incohérentes, insignifiantes, énigmatiques ; mais ce débordement de phrases, cette multitude de mots allaient, couraient vers l'horizon brumeux et lointain où était écrit : "Les grandes pensées viennent du coeur" . Assis au bureau, M. Rachel, professeur surveillant, lisait. Tandis que sa main gauche tournait les feuilles, sa dextre tortillait une barbe noire correctement taillée. Fred avait remarqué qu'il portait une bague où rutilait un diamant, et que deux minuscules boutons en or se détachaient sur la blancheur immaculée de son plastron de chemise. Mais son admiration déjà fort excitée n'eut plus de bornes lorsque, M. Rachel circulant dans la salle, il constata qu'il laissait après lui des effluves discrets d'héliotrope. Cependant les aiguilles de la pendule tournaient ; midi allait bientôt sonner. Pendant quatre heures, les candidats avaient successivement raisonné leurs problèmes, écrit une dictée, composé une dissertation ; mais bien qu'inhabitués à d'aussi longs efforts, la matinée leur avait paru courte. Ils jetaient un dernier coup d'oeil sur leurs copies, corrigeaient une faute, mettaient une virgule, rectifiaient une lettre ; tous ces gestes accusaient la fatigue et l'énervement. - Encore cinq minutes, messieurs ! annonça M. R

05/2017

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Poésie

Mémoire vocale. 200 poèmes allemands du huitième au vingtième siècle stockés et modérés par Thomas Kling, Edition

En 2001, l'éditeur DuMont Verlag pose à Thomas Kling la question suivante : "De quels poèmes en langue allemande avons-nous besoin en ce début de siècle ? " C'est en tant que réponse à cette question qu'il faut lire le choix présenté ici : une sélection de poèmes indispensables pour le poète qu'est Thomas Kling, non une anthologie de plus. Mémoire vocale a valeur de programme poétologique : des formules magiques de Mersebourg aux poètes et poétesses d'aujourd'hui, sont présentés ici des textes destinés à mettre en valeur toutes les ressources qu'offre l'allemand sur une dizaine de siècles, dans la diversité de ses registres : langue incantatoire, jargons et hybridations telles que le rotwelsch, l'argot des classes marginalisées, mêlé d'allemand, de néerlandais et de yiddish et parlé surtout dans l'ouest de l'Allemagne, qui a toujours fasciné le Rhénan qu'était Kling. Si la plupart des noms attendus sont présents (Bachmann, Brecht, Celan, Goethe, Hölderlin, Jandl, Nietzsche, Novalis, Rilke...) Il s'agit là d'un choix singulier, à contre-pied du canon littéraire, notamment par la place limitée faite à la tradition classique et romantique, mais qui offre une part belle à la poésie du Moyen Age, aux audaces de la poésie "baroque" , à la diversité inventive des écritures modernes et contemporaines. Celui pour qui le poème est "instrument optique et acoustique de précision qui provient et se met au service de la perception, la perception exacte de la langue" assume ici la subjectivité d'un choix moins de poètes que de textes admirés, ce qui peut expliquer les surprises que réserve Mémoire vocale : la poétesse d'origine juive Gertrud Kolmar, morte en déportation, est placée dans l'immédiat voisinage de Josef Weinheber, un poète autrichien controversé en raison de sa collaboration avec le régime nazi ; Hans-Magnus Enzensberger, dont Thomas Kling n'a jamais fait mystère du peu d'intérêt qu'il portait à sa poésie de "gardien de musée" , est représenté, alors que Nelly Sachs, lauréate du Prix Nobel de littérature en 1966, ne l'est pas. De même l'Autrichien Hugo von Hofmannsthal, qui a été un représentant important du symbolisme allemand, est absent de cette anthologie, Kling lui préférant son ami Rudolf Borchardt, un strict formaliste, théoricien d'une "Restauration créatrice" nourrie d'Antiquité et de classicisme. Si "mémoire vocale" n'échappe pas au statut de "haie hégémonique" propre à toute anthologie, en ce qu'elle fixe et valorise un corpus par délimitation d'un jardin clos dans lequel s'épanouit un choix de fleurs, il importe de replacer ce florilège dans le contexte de la poétique de Kling qui considère que "la poésie procède du flux de données, elle est - si elle réussit, si elle fonctionne -, un flux dirigé de données et déclenche un tel flux chez le lecteur" . C'est à la reconfiguration d'un tel flux dynamique que travaille mémoire vocale.

02/2023

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Révolution française

Mademoiselle de Corday

Au matin du 13 juillet 1793, Charlotte Corday achète un couteau dans un magasin situé sous les arcades du Palais-Royal. Vers 11 h 30, un fiacre la dépose devant le domicile de Marat, au 30 de la rue des Cordeliers. Le XIXe siècle, chez les royalistes, fera de Charlotte Corday une icône, une martyre de la contre-révolution. Jean de La Varende, dès le plus jeune âge, a été fasciné par cette jeune fille. Mais les termes par lesquels il l'évoque semblent analyser aussi la genèse de son besoin d'écriture sur cette personne. "Charlotte de Corday, assure l'écrivain, reste dans mes présences constantes. Je me suis occupé d'elle peu à peu, lentement, toujours, sans nulle volonté livresque : elle m'attendait, enveloppée de son mystère insistant ; de sa force, de sa beauté, de son courage, et surtout de cette mélancolie divine, où, même enfant, je savais qu'il pouvait se cacher de bien puissants arômes" . "Fille de soldats-gentilshommes, païenne, vierge viking, vierge tout court ; ajoutons normande, et nous aurons, si ce n'est le portait moral de Charlotte, au moins son explication cohérente" . Dans ces quelques lignes, La Varende résume ce qui lui paraît l'essence de Charlotte Corday. Il se place un ton en-dessous, en revanche, pour évoquer son royalisme. C'est que, sans le reconnaître vraiment, l'auteur des Manants du roi et de Man d'Arc, chantre de la fidélité totale à la monarchie française, n'est pas à l'aise avec le royalisme de Charlotte Corday, car ce royalisme est pour partie incertain, et n'est pas le sien, lui le contre-révolutionnaire viscéral. Charlotte, c'est une Girondine dont le premier mouvement a été d'adhérer à la Révolution et qui ne s'est détournée de celle-ci qu'en raison des flots de sang qui ont commencé à couler en 1792-1793. Quant au père de Charlotte ("Il lui faut six pages pour développer le lieu commun") et au milieu dans lequel elle baignait à Caen ("Des jobards de la bonne intention"), l'écrivain ne se prive pas de manifester le mépris dans lequel il les tient... C'est ici que se trouve la leçon d'histoire de Mademoiselle de Corday : avec ce livre, Jean de la Varende, ce vieux chouan, est obligé de convenir qu'il y eut d'autres formes d'opposition à la Révolution française que celle, indéfectiblement fidèle à Dieu et au roi, de son ancienne France terrienne. Jean Sévillia AUTEUR Membre de l'académie Goncourt et de l'Académie de marine, Jean de La Varende (1887-1959) est un écrivain enraciné en Normandie, avec une prédilection particulière pour la mer et les marins. Il est notamment l'auteur d'hagiographies parmi lesquelles Don Bosco, réédité par Via Romana en 2015, et Le Curé d'Ars et sa passion en 2019.

01/2022

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Critique littéraire

Histoire de la poésie française. Tome 4, La poésie du XVIIIe siècle

Un siècle sans poésie ? Voire. Disons qu'elle se déplace, qu'elle s'affirme plus volontiers dans la prose : Diderot, Marivaux, Montesquieu, Laclos, Jean-Jacques, Chamfort, Saint-Pierre, Restif, Sade, Buffon, Lacépède, Volney, Cazotte, Mercier le Prophète, Cousin de Grainville. Des esprits curieux (Fabre d'Olivet, Court de Gébelin, Plis) poussent très loin l'étude des correspondances. Qui lit encore l'oeuvre versifiée du roi Voltaire ? Apprécié, lu, discuté en son temps, poète par éclats avec des formules déjà hugoliennes, lassant, futile ou accordé à l'histoire, qui aurait cru que ce serait le prosateur qu'on retiendrait ? N'existe-t-il plus de poètes en vers ? Les strophes de Jean-Baptiste Rousseau annoncent Valéry. Louis Racine a de rares envolées. Voltaire croit que Saint-Lambert passera à la postérité. La Motte fait la distinction entre poésie et vers. Voici Je discret Fontenelle et le joyeux Piron fils, Sainte-Aulaire, Sénécé. Ils ne valent pas un inconnu, Claude Cherrier, avant-goût de Jacques Prévert. Et puis Gentil-Bernard, Marmontel, Rulhière parfois vigoureux, Voisenon frétillant, Bernis acceptable en partie, le bon Pompignan, le charmant Gresset, Dorat et Moncrif, le maçon Sedaine, cent autres. De l'esprit en petite monnaie, des épigrammes, de la crème fouettée. Quelques joyeux compères : Vade, Collé, Panard. Des poètes bizarres. Des épopées ridicules. Autour de Florian, un flot de fabulistes. On ne rejette pas d'emblée la poésie didactique. Delille, Roucher, Rosset, Watelet et leurs comparses font un effort pour poétiser arts, sciences, industrie, nature. Ils sombrent, parfois étonnent. La poésie mnémotechnique invente de curieux enseignements. Célèbres à d'autres titres, Jean-Jacques, Diderot, Helvétius, d'Alembert écrivent au besoin en vers. Et aussi les économistes comme Turgot, Condorcet et Dupont de Nemours qui transcrit en vers le chant des oiseaux. Et Marivaux, Beaumarchais, Chamfort, Rivarol, rimeurs occasionnels sont parfois significatifs des tendances. Hors des frontières, il se passe déjà quelque chose : en Belgique, en Suisse, au Québec, en Amérique. Les princes d'Europe, les grands étrangers s'expriment en vers français. On rencontre la poésie féminine, le théâtre en vers, la survivance occitane, les provinces. Le romanesque annonce le romantisme. Gessner, Thompson, Gray influencent les Français. Voici Colardeau le sentimental, Feutry le sombre, Malfilâtre l'exquis, Gilbert l'infortuné, La Harpe élégiaque. Des poètes venus des îles : Léonard l'idyllique, Bertin le sensuel, Parny père du poème en prose. Legouvé, Millevoye, Arnault, Cubières, Chênedollé, Thomas peuvent étonner le lecteur : on pense à Lamartine, Hugo, Musset. André Chénier plus parnassien que romantique reste mal connu. Et aussi son frère Marie-Joseph. On les rencontre longuement. Mauvais, l'Organt du jeune Saint-Just ? Cette épopée étrange, mal faite, licencieuse, avec des airs de complainte rabelaisienne, exprime cependant le sentiment d'une jeunesse exigeante comme le fera Rimbaud. La Révolution : les poètes sont mal préparés pour répondre à l'événement. La chanson populaire, anonyme souvent, prend le relais. Les hymnes, les pamphlets, les chants contre l'esclavage des noirs par exemple rythment l'histoire. "Il nous faut un barde !" s'écrie Bonaparte. Chateaubriand et Mme de Staël sont ailleurs. L'académisme pompier fleurit : folies didactiques, héroïques et théâtrales ampoulées, ridicules. Mais déjà quelques-uns osent un oeil vers les poètes des nations voisines. Dès la chute de l'Empire, des enfants, des adolescents sont présents au monde. Ils se nomment Lamartine, Hugo, Vigny, Sainte-Beuve, Musset. Le phénix va brûler pour renaître de ses cendres. La plus belle période va naître. Tout recommence.

10/1990

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BD tout public

Dans ma maison de papier

La grand-mère, la petite fille et la mort... Basée sur une pièce de théâtre de Philippe Dorin (Dans ma maison de papier, j'ai des poèmes sur le feu, ed. L'Ecole des loisirs), Dans ma maison de papier est un huis-clos à trois personnages qui se joue des contraintes de temps et d'espace. La mort vient rendre visite à une vieille dame, il est temps... Tel Antonius Block dans Le septième sceau d'Ingmar Bergman, la vieille dame (nommée Emma), engage un dialogue avec le funeste visiteur. Est-ce pour retarder l'échéance ou n'est-ce, l'espace d'un instant, que le questionnement métaphysique sur sa vie passée et son sens ? Une petite fille du nom d'Aimée, apparaît, les souvenirs affluent, la curiosité de l'enfant se déploit, les lieux changent... la mort attend. Qu'ont en commun les personnages d'Aimée et Emma ? Leur complicité, à la fois ludique et fusionnelle, teinte d'émotions positives ce face-à-face avec la mort. Pierre Duba est auteur de bandes dessinées et réalisateur de films. Il est né en 1960 à Bradford, en Angleterre. Il a grandi en Alsace. Après quelques années de travail en usine, il entre à l'école des Arts Décoratifs de Strasbourg en 1981. Il s'oriente ensuite vers l'illustration et la bande dessinée. Son travail reconnu comme l'un des plus original de la bande dessinée contemporaine lui a valu plusieurs prix et distinctions. Pierre Duba fait partie des auteurs qui réinventent la bande dessinée. Son dessin libre, affranchi de toute notion de style, toujours en mouvement, invente pour chaque livre un univers personnel et particulier. Sa recherche sur l'image l'a conduit à la réalisation de films qui prolongent ses livres dans un autre rapport au temps et au monde sonore. De livres en films, que ce soit adaptation littéraire (Quelqu'un va venir de Jon Fosse, Un portrait de Moitié-Claire de Philippe Dorin), fiction (Antoinette, L'Absente), traces de voyages (Kyôto-Béziers, A Kyôto) où réflexion autobiographique (Sans l'ombre d'un doute), il poursuit une recherche artistique exigeante qui rend son ouvre surprenante et inclassable. Philippe Dorin est né en 1956 à Cluny. De 1980 à 1988, il apprend son métier d'auteur de théâtre au Théâtre Jeune Public de Strasbourg. En 1994, il rencontre Sylviane Fortuny. Ensemble, ils fondent la Compagnie Pour Ainsi Dire. Ils créent leur premier spectacle en 1997. Depuis, ils ont créés huit spectacles, dont L'hiver, quatre chiens mordent mes pieds et mes mains qui obtient en 2008 le Molière du spectacle jeune public. Leurs spectacles tournent largement en France, mais aussi au Québec, en Suisse, en Belgique, en Russie et à La Réunion. Par ailleurs, Philippe Dorin collabore avec d'autres compagnons metteurs en scène, tel que Ismaïl Safwan, Michel Froehly, Thierry Roisin et Christian Gangneron. En 2004/2005, il est auteur engagé au Théâtre de l'Est parisien dirigé par Catherine Anne. En 2006, il est en résidence à la Chartreuse de Villeneuve lez Avignon. En 2009, il est Président du Prix d'écriture théâtral de la Ville de Guérande. La plupart de ses pièces sont éditées à L'école des loisirs - théâtre et Les Solitaires intempestifs.

02/2014

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Histoire internationale

Comprendre l'histoire politique du Congo-Brazzaville (1958-2020)

Ce texte est né d'une obstination à entrer dans la lecture des événements qui ont émaillé l'histoire politique du Congo-Brazzaville, depuis l'adoption de la Délibération 112-58 qui portait création de la République du Congo, le 28 novembre 1958. Malgré les promesses liées à cette création qui fut un tournant historique, cet Etat institutionnalisé à la décolonisation n'a pas permis aux différentes composantes des populations du Moyen-Congo de le faire leur, suite aux conséquences dues à un double malentendu : - A partir de la Loi Cadre-Defferre de 1956, qui définissait la personnalité politique des territoires d'AEF, d'AOF et de Madagascar et leur accordait une certaine autonomie, et surtout la Constitution du 04 Octobre 1958 qui instituait la Communauté, les élites de ces territoires, et notamment la République du Congo, projetaient d'atteindre un certain statut, l'indépendance, alors que pour la puissance coloniale, il s'agissait d'un simple transfert de certaines compétences consistant à leur concéder les "signes extérieurs" de l'indépendance, tout en bridant par les accords de coopération toute possibilité de détermination des termes du développement économique et industriel. Ainsi, la première République, sous la présidence de l'abbé Fulbert Youlou, en fera les frais avec le projet du barrage du Kouilou. - Bien que le gouverneur Deriau, entérinant au nom de la France ladite Délibération 112-58, déclarait qu'"... il vous appartient en conséquence de définir la structure que vous entendez donner à vos nouvelles institutions quant à la composition, au mode de désignation et aux compétences des pouvoirs législatif et exécutif...", les élites congolaises, au lieu d'une invention démocratique qui devait prendre en compte la réalité de "la diversité des populations du Moyen-Congo" constitutives de ce nouvel Etat, s'étaient contentées de l'Etat unitaire, la République une et indivisible héritée du jacobinisme français. Dès lors, le Congo va vivre les limites de son action politique. Au fil de ces six premières décennies de sa vie commencée le 28 novembre 1958, il va ruiner toutes ses chances de se présenter et de se promouvoir comme un pays, compte tenu de l'incapacité politique des élites de reconnaître et d'assumer la vérité historique, c'est-à-dire l'incompatibilité entre le système de l'Etat jacobin et la diversité des populations congolaises proclamée dans l'acte de naissance dudit Etat. L'Etat, une institution qui a la prétention de garantir à la fois l'unité et la permanence de ce corps politique en constitution, doit s'inscrire dans un projet politique qui l'identifie et lui donne sens puisque, dans le contexte des indépendances, il était censé ouvrir à une configuration politique nouvelle ; laquelle demeure une invention démocratique, qui doit se concevoir à partir de l'exploration de voies politiques nouvelles qui vont dans le sens d'une décentralisation, d'une régionalisation, ou encore d'un fédéralisme à assumer, pour dépasser les limites politiques du jacobinisme ; un système politique qui, dans le contexte analysé de cette histoire politique, est favorable à la dictature d'un parti unique.

01/2021

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Famille

Mères sans filtre. 8 récits intimes de déclics féministes pour libérer la parole sur la maternité

Dépression du post-partum, charge maternelle, fatigue extrême, inégalité dans la répartition de la sphère domestique... 8 autrices reconnues partagent le déclic féministe qui a accompagné leur expérience de la maternité, un recueil de récits intimes illustré avec délicatesse pour libérer la parole sur le sujet. Cinq ans après la vague #metoo qui a relancé le débat féministe et remis la libération de la parole à l'ordre du jour, cinq ans après la bande dessinée choc de la dessinatrice Emma qui a popularisé le concept de charge mentale, les mères mettent-elles au monde des bébés dans un monde égalitaire ? Apparemment pas constatent avec stupeur les huit autrices de ce recueil confrontées à une réalité loin de l'image d'Epinal de la mère parfaite et sa vie sans nuages qu'elles pensaient vivre. Comment traverser l'expérience de la maternité quand celle-ci se révèle une plus grande épreuve que prévue ? Pourquoi a-t-on tant de mal à parler des difficultés maternelles lorsqu'on y fait face personnellement ? Comment se détacher d'un récit collectif qui passe sous silence les inégalités dans la parentalité ? Une prise de conscience qui mène à un déclic féministe dont les autrices nous livrent le récit, chacune avec sa plume acérée et au travers de sa propre histoire. Ces témoignages émouvants dans lesquels de nombreuses femmes se retrouveront permettront de démystifier la maternité et de penser autrement le rôle de mère, car il est temps de poser un regard féministe sur l'intime. Les autrices contribuent ainsi à la libération de la parole sur la maternité, sujet resté dans l'angle mort du féminisme durant des années, et s'ouvrent ici sur des sujets variés : dépression du post-partum, charge maternelle, fatigue extrême, éducation égalitaire, parentalité queer. Camille Abbey lève le tabou social qui entoure la fatigue des mères. Anne-Sophie Brasme : après avoir frôlé le burn-out maternel, elle s'attaque au mythe de la mère parfaite qui élève un " enfant réussi ". Elodie Font : après un parcours de PMA, elle questionne le rapport ambivalent qu'elle s'est mise à entretenir avec son corps depuis qu'elle est mère. Renée Greusard raconte comment sa dépression post-partum lui a fait prendre conscience de la charge affective et mentale qu'elle portait, avant de s'en libérer Julia Kerninon parle de l'équilibre de vie pro-perso mis à mal par l'arrivée de son bébé, et du déclic féministe qui lui a permis de reprendre le pouvoir et revendiquer sa carrière. Gabrielle Richard : ayant construit une famille queer, elle s'interroge sur les attentes sociétales et patriarcales derrière le mot " maman ", qui norment le rôle de parent. Claire Tran nous confie la difficulté d'adopter une éducation non sexiste, et le déclic qui l'a poussée a cofonder l'association Parents féministes. Illana Weizman traite de l'injonction au silence qui est faite aux jeunes mères par la société, et qui l'a conduite à prendre la parole sur les réseaux et à cocréer le hashtag #MonPostPartum.

03/2023

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Critique littéraire

Histoire romaine. Tome 5, Livre IX, Le livre illyrien ; Fragments du livre macédonien, Edition bilingue français-grec ancien

Ce livre, le neuvième de l'Histoire romaine, marquait une étape importante dans la série des guerres étrangères puisqu'il racontait comment les Romains, intervenant pour la première fois dans le bassin oriental de la Méditerranée, avaient vaincu et soumis Philippe V puis anéanti la monarchie macédonienne après la défaite de Persée à Pydna. Appien lui avait donc donné le titre de "Livre macédonien" et avait ajouté une sorte d'appendice, le "Livre illyrien", où il exposait les circonstances de la conquête, achevée par Auguste, des régions qui formeront l'Illyricum. Fâcheusement, le Livre macédonien fut perdu, peut-être dès le IXe siècle de notre ère et le Livre illyrien aurait sans doute connu le même sort si les éditeurs byzantins ne l'avaient pas inséré à la suite du livre V des Guerres civiles. Paradoxalement, nous avons donc perdu ce qu'Appien considérait à juste titre comme le plus important et conservé un appendice moins travaillé. Heureusement, les Extraits constantiniens nous ont conservé les passages du Livre macédonien relatifs aux négociations entre Romains et Macédoniens à l'occasion des trois guerres qui les opposèrent. On constate qu'Appien suivait une tradition différant sensiblement de celle qui prévaut depuis Polybe et, en particulier, qu'il n'était pas dupe des accusations portées contre Persée par des adversaires décidés à l'anéantir, quoi qu'il fît. Il était donc utile de rééditer et de traduire ces pages où il apparaît qu'Appien jugeait justifiée la rancune de Philippe V, ulcéré de l'ingratitude des Romains qu'il avait loyalement soutenus contre Antiochos III, et portait sur Persée un jugement favorable en montrant que ses qualités l'avaient rendu suspect aux Romains. Le Livre illyrien, malgré sa brièveté, reste une source historique de première importance. Dans la première partie du livre, consacrée aux guerres menées par les Romains dans la région de l'Adriatique contre des populations pratiquant la piraterie, Appien suit une tradition originale fort éloignée de Polybe, en particulier pour tout ce qui concerne Démétrios de Pharos. Dans la seconde partie, la plus détaillée, Appien relate, d'après les Mémoires d'Auguste, les opérations menées par celui-ci dans les Balkans après sa victoire sur Sextus Pompée et l'élimination de Lépide. Même s'il ne s'agit que d'un résumé, d'ailleurs plus complet que celui que Dion Cassius donne des mêmes événements d'après la même source, nous remontons à travers Appien au témoignage d'Auguste, qui, dirigeant les opérations et participant aux combats, donna de ces guerres engagées contre des populations mal connues une relation qui s'apparentait, semble-t-il, aux fameux "Commentaires" de César. Bref, en dépit des accidents de la tradition manuscrite qui ont entraîné la perte d'une partie de sa substance, et plus particulièrement le récit des fameuses batailles de Cynoscéphales et de Pydna, ce livre IX de l'Histoire romaine reste une source documentaire de première importance dont la réédition sur des bases scientifiques solides et la traduction en langue française paraissent entièrement justifiées. Le commentaire a bénéficié d'un concours de premier ordre, celui du professeur Pierre Cabanes, le meilleur connaisseur français des questions illyriennes.

11/2011

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Littérature étrangère

L'ingénieux Hidalgo Don Quichotte de la Manche

J'ouvris la porte de l'atelier de mon père un beau matin pour découvrir son ami l'éditeur Jacques Schiffrin un genou à terre tenant un balai dans sa main droite. Schiffrin fixait des yeux le haut de notre atelier avec un air menaçant alors que mon père fronçait les sourcils en dessinant dans un calepin. J'avais sept ans. On me pria de quitter les lieux, ce que je fis discrètement. Une heure plus tard, mon père lut un chapitre de Don Quichotte où le héros se confrontait à un mystérieux personnage. Je compris tout de suite que Schiffrin et le héros chevalier de la Manche ne faisaient qu'un et que le balai représentait une lance ! Bien plus tard, j'ai reconnu la silhouette osseuse de Schiffrin sur les plaques de cuivre. Après le déjeuner, mon père avait l'habitude de lire à haute voix le dernier chapitre du livre qu'il était en train d'illustrer. Ma mère, mes amis ou même notre plombier ou la femme de ménage restaient assis sans dire un mot jusqu'à ce que la lecture soit terminée. Après quoi, mon père riait, chantonnait ou bien songeait pendant de longues minutes en regardant les branches des arbres à travers la verrière avant de se tourner vers ceux dont il aimait connaître la réaction. J'entendais de loin leur voix jusqu'à ce que la porte claque, que le silence revienne et que mon père monte lentement dans la chambre où il gravait. Il m'en permettait l'accès à condition de ne rien dire et de rester debout à sa droite. De temps autre, il me regardait et disait : "Qu'est-ce que tu en dis ?" C'est ainsi que je découvrais les rêves qui ont inspiré mon père pour créer ses gravures. Dix ans plus tard, la Seconde Guerre mondiale éclatait. Le destin des cuivres, qui étaient entreposés à Fontenay-aux-Roses dans l'imprimerie d'Edmond Rigal, était en question. Lorsque nous traversâmes l'Espagne pour prendre un navire à Lisbonne qui nous mènerait à New York, il nous dit avec amertume : "Ah ! ma chère Espagne sera-t-elle épargnée ? Et mes cuivres le seront-ils eux aussi ?" Nous savions qu'il pensait à l'année où, après avoir reçu le contrat de son éditeur espagnol, il traversa la Mancha avec un petit rucksack sur le dos dans lequel il portait son carnet de croquis et quelques vêtements. Il revoyait sûrement le jour où il prit le même train que le roi d'Espagne qui fuyait vers la France pour échapper à la révolution qui venait d'éclater. A notre retour des Etats-Unis, en 1946, il apprit que les Rigal avaient réussi à cacher les cuivres de façon que les Allemands ne les prennent pas pour les faire fondre. "Edmond a dû les mettre dans son matelas !" dit mon père en poussant le bouchon d'une bouteille de champagne. Jusqu'à sa mort, en 1982, je n'entendis plus mentionner le nom de don Quichotte. Aujourd'hui, enfin, je suis délivrée du lourd fardeau qui m'accablait. Svetlana Rockwell Alexeïeff

10/2012

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Littérature française

Mères malgré tout

Un recueil de nouvelles, de récits, de moments de vie qui ont boulversé l'existence de deux femmes. Après de nombreux mois d'essai et plusieurs fausses-couches précoces, quand ce bébé s'est enfin accroché, j'y ai vraiment cru., jusqu'à ce jour de septembre où tout a basculé. Malgré l'issue funeste, je me suis vraiment sentie mère. Je suis la "Elle" de ces textes. Si aujourd'hui, j'ai tourné la page, la vie me fait régulièrement croiser des mères endeuillées. Et je réalise que malheureusement, elles se prennent encore de plein fouet les mêmes réflexions que j'ai si souvent entendues. Fausses-couches précoces, GEU, accouchements prématurés. Peu importe le nom employé. Derrière ces mots, essayez de ne pas oublier qu'il y a une femme qui s'est sentie mère dès l'instant où elle a su qu'elle portait la vie. Nelly Topscher. Maman de deux enfants, a malgré porté la vie trois fois.. Et cela, jamais je ne l'oublierai.. Ce statut de Maman pour ce bébé sera ignoré. Arraché à moi, car extra uterin...~~~Un foetus n'est plus un embryon, lui aussi aurait dû être officiellement reconnu... Mots difficiles à accepter, quand pourtant, la vie doit continuer... Laissez-vous toucher par ces récits auto-biographiques et découvrez les épreuves que deux femmes, deux mères, ont dû traverser. EXTRAITMarion, Qui aurait cru un jour que je parviendrais à coucher tout cela sur le papier. Ta naissance a été le plus beau jour de ma vie. Beaucoup vont me dire que c'est morbide de dire ça. Si tu savais comme maintenant je me fous des bien-pensants. Là où ces propos me détruisaient hier, ils me rendent plus forte aujourd'hui. Avoir vécu les douleurs de l'accouchement n'est pas la pire chose. Ce qui a été l'enfer à l'état pur c'est de voir nos proches te nier totalement.«?Ce n'était pas un bébé?», «?Elle n'est pas vraiment née?», «?C'est pas grave tu en feras un autre », ou les si cruels, « Il te faut oublier?», ou «?Vous en ferez un autre?». Toutes ces phrases dites, alors que j'étais encore à la maternité, m'ont fait bien plus mal que d'accoucher de toi. Ton père et moi avons entendu ces mots si souvent que nous pouvions même les deviner avant même qu'ils ne soient prononcés.À PROPOS DES AUTEURSSophie Leseure - Née en 1980, je suis passionnée de lecture et d'écriture depuis mon plus jeune âge. Auteure de romances, de livres pour enfants, je me lance enfin dans le triller, ma lecture de prédilection. Née en juillet 1974, à Montpellier, Nelly Topscher a longuement hésité à donner vie à ses romans. Ses deux premières romances sont restées en gestation durant 20 ans avant qu'elle se décide, au hasard d'une participation à un concours de nouvelles, à les terminer. Depuis, elle ne cesse d'écrire. Textes courts ou romans peu importe tant qu'elle assouvit sa passion.

01/2019

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Littérature érotique et sentim

L'envol du papillon

L'arrivée d'Elisa d'Albert dans la haute société française provoquera de nombreux troubles... Elisa d'Albret est dévastée : ses parents l'envoient vivre une année complète chez sa tante, la comtesse de Bressac, qu'elle n'a plus vue depuis dix-sept ans. La jeune femme devra quitter la simplicité et la félicité des plages de la Guadeloupe pour apprendre les us et coutumes de la haute noblesse française du milieu du XIXe siècle. Alexandre de Noyal, jeune comte plus fasciné par les aventures que par les bals et les mariages, est chargé d'escorter la jeune femme du port au château de Bressac. Dès le premier regard, les jeunes gens sentent une attraction indéniable... mais qu'ils devront refréner : Alexandre n'est autre que le promis de Mathilde de Bressac, la cousine d'Elisa... Nadine Deconinck-Cabelduc signe une magnifique romance historique. Elle réunit tous les ingrédients pour vous assurer un beau moment : des personnages attachants au caractère bien trempé, un grand réalisme et respect du contexte historique, une histoire d'amour passionnante, des robes et des décors fastueux, le tout lié par une écriture addictive ! EXTRAIT Elisa sentit son coeur s'emballer. Elle allait enfin le revoir et découvrir s'il lui tenait rigueur de son opposition avec le comte de Noyal. A en croire sa soeur, il n'était plus pressé de partir découvrir le monde alors que ce projet lui tenait à coeur. Quelle en était la raison ?? Elle aimait croire qu'elle y était pour quelque chose, mais se traita aussitôt de sotte. Elle se donnait beaucoup trop d'importance. D'ailleurs, il n'avait pas cherché à la revoir et sa présence ici n'était due qu'à l'affection qu'il portait à sa soeur et non à son désir de goûter sa compagnie. - Bonsoir Mélanie. Mathilde. Le regard d'Alexandre ne s'attarda qu'un court instant sur Elisa. - Mademoiselle d'Albret. Voilà, elle était fixée. Il ne lui témoignait qu'une froide politesse. Il avait été déçu par son attitude et ne voulait plus lui accorder aucune attention. Elle sentit ses joues s'enflammer sous l'affront muet et son coeur se dessécher. Pourquoi diable n'était-elle pas partie comme elle en avait eu l'intention ?? S'éloigner de lui aurait été préférable plutôt que de subir son total désintéressement. CE QU'EN PENSE LA CRITIQUE "Cela faisait bien longtemps que je n'avais pas eu l'occasion de me détendre en compagnie d'une agréable romance mais L'Envol du Papillon a su combler ce manque et m'offrir un moment de pur ravissement". - Coeur de givre sur Le soupir du roman. "Je trouve qu'avec ce roman , Nadine n'a rien à envier à Sarah Lark, Tamara McKinley... son imagination, ses recherches et l'univers du roman dévoilent au contraire à quel point l'auteure est a l'aise. Sa plume naviguant avec poésie et charme tout au long du récit". - La lectrice compulsive sur Booknode. A PROPOS DE L'AUTEUR Jeune quinqua débordante d'imagination, Nadine Deconinck-Cabelduc inventait déjà des histoires enfant, avant de prendre la plume à l'adolescence pour écrire des nouvelles. Depuis, elle n'a cessé d'écrire. Après Une seconde chance, une romance mêlée de suspense, l'auteure se lance dans une romance historique : L'envol du papillon.

03/2020

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Ecrits sur l'art

Dialogues

Les trois dialogues entre Marguerite Duras et Jean-Luc Godard réunis dans ce volume constituent une parenthèse ouverte en octobre ? 1979 (premier dialogue, à l'occasion du tournage du film de Godard Sauve qui peut (la vie)) puis septembre ou octobre ? 1980 (second dialogue, pour un projet de film sur l'inceste) et refermée en décembre ? 1987 (troisième dialogue, pour l'émission de télévision "? Océaniques ? "). Il s'agit à la fois, entre l'écrivain et le cinéaste, d'un rapport de fond et d'une histoire circonscrite. Godard dit, dans un entretien de 1997, qu'il a connu Duras "? pendant deux ou trois ans ? ", formule qui rappelle le titre de son film, Deux ou trois choses que je sais d'elle. Pendant quelques années, ils se croisent et échangent "? deux ou trois choses ? " qui les aident à penser ? : leur seconde rencontre a lieu après la publication par l'un et l'autre de recueils de réflexions sur le cinéma, Duras avec Les Yeux verts, Godard avec Introduction à une véritable histoire du cinéma. On retrouve dans leurs dialogues à peu près tout ce qui traverse ces livres ? : la question des relations entre l'écrit et l'image, de la représentation de ce qui est jugé irreprésentable (à des titres différents, les camps de concentration et l'inceste), des considérations sur l'enfance ou sur la télévision. On y retrouve aussi une même passion profonde, une manière de faire littéralement corps avec leur médium, d'en parler avec un lyrisme fulgurant entrecoupé de remarques sèchement ironiques, portés par une conviction qui leur fait parcourir l'histoire, convoquant tour à tour Moïse, Rousseau, Faulkner ou Sartre. [... ] Ces trois dialogues enserrent aussi un autre échange. Dans les années 1980, Godard revient à un cinéma plus visible, après dix années d'oeuvres militantes et d'essais vidéo, à l'écart des circuits classiques de distribution ? : il connaît alors "? une deuxième vie dans le cinéma ? ". Simultanément, Duras revient à une écriture séparée de la réalisation de films, après plus de dix années de textes majoritairement liés au cinéma. Le succès littéraire de L'Amant (1984) correspond à la fin de son activité de cinéaste ? : elle réalise son dernier film, Les Enfants, en 1985. C'est au moment de ces changements qu'ils se rencontrent, Godard venant interroger l'écrivain qu'il dit n'avoir jamais pu être, et Duras se confronter à celui qui est pour elle "? le plus grand catalyseur du cinéma mondial ? ", le plus grand créateur d'un art qu'elle s'apprête à quitter et dont elle n'aura pas acclamé beaucoup de noms. L'un comme l'autre ignorent d'ailleurs presque totalement, au fil de leurs dialogues, les cinéastes qui partagent la même interrogation croisée des mots et des images ? : Philippe Garrel et Jean Eustache sont rapidement évoqués par Godard dans la conversation de 1987, mais ni Jean-Marie Straub et Danièle Huillet, ni Chantal Akerman ou Hans-Jürgen Syberberg. Il y a là un signe de leur splendide isolement, en même temps que d'un reflux esthétique. Le temps des grandes oeuvres cinématographiques fondées sur des disjonctions radicales de l'image et du son est en train de s'achever, seuls Godard et les Straub poursuivant le chemin jusqu'à aujourd'hui. La parenthèse que constituent ces dialogues entre Marguerite Duras et Jean-Luc Godard coïncide avec le moment de reflux de ces oeuvres. Elle est aussi l'un des témoignages les plus forts de la réflexion qui les portait. Cyril Béghin

08/2021

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Europe

Dictionnaire amoureux de l'Ukraine

Un Dictionnaire amoureux qui nous immerge dans l'âme de l'Ukraine (histoire, littérature, poésie, musique, peinture, géographie, gastronomie...) par Tetiana Andrushchuk, violoniste ukrainienne qui fut professeur au Conservatoire national supérieur de Kiev et Danièle Georget, auteure et rédactrice en chef adjointe à Paris Match. " Nous sommes un peuple de 42 millions d'habitants sur un territoire plus vaste que la France ou qui l'était, jusqu'à ce que la presqu'île de Crimée lui soit arrachée. Notre civilisation est plus ancienne que celle de la Russie, nos liens avec la France remontent au Moyen Age. L'Ukraine était un royaume avec Kiev pour capitale quand Moscou n'était qu'un bourg au milieu de nulle part. Pendant plus de trois siècles, nous sommes passés pour la province d'un empire qui nous avait pris jusqu'à notre nom. Mais lorsque les murailles de l'Union soviétique sont tombées, notre " terre qui n'est pas la nôtre " comme l'écrivait le poète, s'est réveillée. Enfin, elle allait pouvoir choisir son destin et cesser de suivre celui imposé par les autocrates de l'Est. Vingt-deux ans plus tard, Vladimir Poutine a cru pouvoir mettre un terme à cette " récréation ". Au nom d'un génocide, sorti de son imagination, contre les russophones, il a cru que ses soldats seraient accueillis avec le pain et le sel. Pour annexer l'Ukraine, il suffisait de cent cinquante mille hommes et d'un déluge de bombes. Ecrase-t-on une idée avec un marteau ? Je suis née à Kiev. Mon père est mort pendant la Seconde Guerre mondiale. Il portait l'uniforme soviétique, comme près de sept millions de soldats ukrainiens. Près de la moitié ont été tués. Violoniste, professeur au Conservatoire national supérieur de Kiev, j'ai reçu, à Moscou, les conseils du meilleur des hommes, un des rares violonistes dont les Français connaissaient le nom : David Oïstrak, né en Ukraine où il a étudié et commencé sa carrière. Et j'ai aimé de toute mon âme d'artiste la culture ukrainienne, de Chevtchenko, notre Hugo, à Silvestrov, comme j'ai aimé la culture russe, de Tchaïkovski à Tolstoï et Dostoïevski. Dans l'après-guerre, ma mère qui avait été chanteuse à l'opéra de Kiev, voulut me faire apprendre le français... " A quoi cela lui servira-t-il ? " lui demandait-on. Personne ne pouvait alors quitter l'Union soviétique. J'aimerais aujourd'hui raconter aux Français pourquoi notre identité n'est pas une invention de Maïdan, et pourquoi les Ukrainiens, tenaces, têtus, courageux, à l'image du boxeur Klitchko, montagne des rings qu'aucun coup ne parvenait à ébranler, font envers et contre tout, et depuis si longtemps, le choix de l'Europe et de la démocratie. Une nation est, comme un diamant, composée de milles facettes, si scintillantes que parfois elles nous aveuglent. Nous sommes le passé, le présent, les vivants et les morts, l'histoire et la géographie, la poésie, les oeufs peints de Pâques, les chemises brodées, le bortsch. Et la passion. La Russie, si prompte à renouer avec ses vieux démons, nous accuse du crime de fascisme : mais qui se trompe d'époque ? Aux femmes qui ont accouché sous les bombardements, à ceux qui se sont terrés dans leurs caves, à ceux qui ont passé leur rage en fabriquant des " cocktails ukrainiens ", à ceux qui tiraient les missiles stinger, à ceux qui distribuaient la nourriture dans les supermarchés, à ceux qui posaient les garrots, à ceux qui les fabriquaient, au sniper qui abattit le général Tchétchène, à tous ceux qui se sont battus, à ceux qui ont attendu. Et même à ceux qui doutent encore que l'Ukraine existe, je dédie ce livre. "

05/2022

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Littérature comparée

Revue de littérature comparée N° 375, juillet-septembre 2020

Neus ROTGER : Le roman comme théorie de l'histoire : théories de l'écriture historique en France au XVIIe siècle (en anglais) Cet article traite de la relation entre l'historiographie et le roman dans la France moderne. Il remet en cause la vision établie qui minore le rôle du roman dans le débat historiographique du dix-septième siècle et avance au contraire que la fiction en prose a joué un rôle important dans la configuration des paramètres théoriques de l'histoire (de la même manière que nous savons comment l'écriture de l'histoire détermine les origines du roman). L'examen d'une série de traités d'épistémologie de l'histoire, allant de Sorel à La Mothe Le Vayer, à Le Moyne, Saint-Réal, Saint-Evremond et Rapin permet de montrer comment le roman participe au processus de réhabilitation d'une discipline en crise. François GENTON : Gellert en France : une bibliographie et quelques réflexions Que reste-t-il de l'oeuvre de Christian Fürchtegott Gellert en France et en français ? Aucun des livres de cet auteur n'est disponible sur le marché du livre en France. Aucune traduction n'a été publiée en France depuis la moitié du XIXe siècle. Ce texte tente de faire le bilan des traductions françaises d'oeuvres intégrales de Gellert ou d'extraits tirés de ses oeuvres et esquisse une description de l'importance en français et en France de cet auteur et de son oeuvre. Ignacio RAMOS-GAY : "An Ingrained Antipathy" : Traduire et adapter le théâtre français en Angleterre, du pillage à la suprématie culturelle (1843-1886) L'objectif de cet article est d'analyser la pratique de la traduction et de l'adaptation d'oeuvres françaises pour la scène londonienne pendant près d'un demi-siècle de la période victorienne (1843-1886). A partir des témoignages de dramaturges, de critiques, d'acteurs et de chroniques journalistiques, il est possible d'observer comment le recours au matériel étranger est conçu, dans un premier temps, comme un exemple de pillage intellectuel qui affaiblit la construction de l'identité nationale autour de l'art dramatique. Dans un deuxième temps, au fil du siècle, ce "vol" ou "pillage" sera conçu en termes positifs, laissant place à une "renaissance" de l'art dramatique britannique. Dans les deux cas, le fondement de l'activité créatrice dans les oeuvres créées en France confirmera ce que certains critiques ont appelé la suprématie culturelle française au XIXe siècle. Aurore TURBIAU : Traversées québécoises en littérature féministe : influences états-uniennes et françaises. Cet article propose d'étudier la manière dont la littérature féministe québécoise s'est constituée, dans les années 1970, en relation avec les productions théoriques et littéraires françaises et américaines. Les Québécoises voyagent aux Etats-Unis et se nourrissent de ce qu'elles y apprennent ; les essais militants les intéressent, ceux de K. Millett, S. Firestone, B. Friedan ; mais le rapport d'influence avec les Etats-uniennes est unilatéral, les Etats-uniennes se souciant assez peu de ce qui se passe au Québec. En revanche, on peut parler de vrais échanges entre féministes françaises et québécoises ; elles partagent essais historiques et féministes, textes psychanalytiques ou littéraires ; elles participent aux mêmes revues et se retrouvent dans des congrès internationaux. Ainsi, au moment des années 1970, on peut parler de "traversées québécoises" : même si la littérature féministe québécoise ne s'est jamais placée en situation de dépendance par rapport aux créations états-uniennes et françaises, elle les a visitées pour en tirer de quoi se construire elle-même, avec ou sans leur participation active. Victor TOUBERT : La bibliothèque inquiète : représentation des bibliothèques chez W. G. Sebald et Pierre Michon Cet article propose de revenir sur la notion de "fantastique de bibliothèque" avancée par Michel Foucault pour étudier les rapports entre savoirs et littérature. Les représentations des bibliothèques chez W. G. Sebald et Pierre Michon semblent en effet ne pas pleinement correspondre au rapport fantastique avec le savoir dont Flaubert était, pour Foucault, le principal représentant. L'étude de ces représentations permet alors de comprendre certaines évolutions des rapports entre les écrivains et les savoirs : construits sur des usages originaux de l'intertextualité, ces représentations comportent une charge ironique et critique, et illustrent un rapport inquiet au savoir.

02/2021

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Sciences politiques

Victor Fay (1903-1991). Itinéraire d'un marxiste hétérodoxe au sein du mouvement ouvrier français

Malgré les antagonismes, qui le perturbent, le monde est un, bien que multiple et divers. Il faut s'en accommoder, sans jamais renoncer à l'améliorer, sans jamais désespérer de ses virtualités de progrès. Et en attendant ces progrès souhaitables mais nullement certains, il faut le prendre tel qu'il est avec ses forces et ses faiblesses. Inconnu du grand public, même au sein du milieu universitaire, Ladislas Faygenbaum dit Victor Fay, d'origine polonaise mais naturalisé français, est pour beaucoup de militants et d'historiens du mouvement ouvrier une "légende" . Armand Ajzenberg, éditeur, journaliste et ancien élève de Victor Fay fait de ce dernier un portrait éloquent au soir de sa vie : Imaginez la perplexité, et la curiosité, d'un modeste militant à l'idée de rencontrer une légende [... ] avoir été l'un des fondateurs des Jeunesses Communistes en Pologne dans les années vingt, s'être expatrié en 1925 pour échapper à la prison et devenir, en France et en 1929, responsable de la formation des cadres du PCF, chroniquer à L'Humanité et collaborer avec d'autres publications communistes ... Avoir été l'un des dirigeants actifs lors des grèves du Nord, y découvrir une jeune fille courageuse et combative dénommée Jeanne Vermeersch, et plus tard, être l'agent innocent de sa rencontre avec Maurice Thorez... Avoir formé politiquement une certaine Danielle Casanova mais aussi un certain Jean-Pierre Timbaud ... Avoir découvert, encore, un horticulteur hors du commun : Waldeck Rochet, cela relève de l'histoire et déjà de la légende . Ce portait élogieux témoigne de la sympathie et de l'admiration que suscite Victor Fay, et de l'image que certains de ses contemporains se font du personnage. Cette "légende" du communisme français est aussi un opposant qui participe, au milieu des années 1930, avec André Ferrat et Georges Kagan, à la revue d'opposition Que faire ? , quitte le Parti communiste en 1936, au moment du premier procès de Moscou, pour adhérer à la Section française de l'Internationale ouvrière (SFIO) l'année suivante. On le retrouve ensuite résistant pendant la Seconde Guerre mondiale, entre Marseille, Toulouse et le Chambon-sur-Lignon en Haute-Loire, rédacteur en chef du journal clandestin L'Appel de la Haute-Loire puis de Lyon Libre, organe du Mouvement de libération nationale, dirigé par son ami André Ferrat. Journaliste politique de profession, il assure jusqu'en 1950 la rédaction de Combat, journal fondé pendant la guerre par des résistants, puis travaille, à partir de 1952, pour la Radiotélévision française (RTF), au service des émissions vers l'étranger. Critique de la politique coloniale de la SFIO, il fait partie de ce courant minoritaire qui fait scission en 1958 pour fonder le Parti socialiste autonome (PSA) qui devient, en 1960, le Parti socialiste unifié (PSU). Engagé dans la construction de ce nouveau parti, il entre en 1964 dans son Bureau national. Après l'arrivée de Charles de Gaulle au pouvoir, il est rapidement interdit d'antenne à la RTF : ses propos dérangeaient. Il demande son renvoi et l'obtient en 1967. De 1968 à 1980, à la retraite, il continue d'écrire et de militer au sein du PSU jusqu'à l'élection de François Mitterrand, en 1981 : il fait alors le choix de rejoindre le nouveau Parti socialiste. Il s'éteint le 29 juin 1991 à Créteil. Victor Fay n'est pas un "désenchanté4" du communisme. Le prologue de ses mémoires, rédigé en 1968, se veut clair : "nul regret, nul désenchantement" , simplement la conscience que le socialisme "tel qu'il est" a détourné les travailleurs de la lutte, que le nom de socialisme a été "galvaudé" par ceux qui s'en réclament. Sa volonté clairement affirmée de poursuivre la lutte pour un socialisme peut être "utopique" mais peurteur d'un "avenir meilleur" , le distingue ainsi de cette frange de la génération de 1917, emportée par le "souffle d'Octobre6" , profondément troublée par l'évolution du régime soviétique après la mort de Lénine, évincée dès les années 1920 au profit d'une génération plus jeune et séduite par la radicalité politique du PCF bolchévisé. Au coeur même de la guerre froide, Fay refuse obstinément "la fausse alternative entre la démocratie bourgeoise et le monolithisme stalinien" pour rechercher, infatigablement, les moyens d'accès à la démocratie directe ouvrière. Victor Fay est un personnage si ce n'est emblématique du moins représentatif des aspirations et des vicissitudes de la gauche française au XXe siècle, à l'époque où "la gauche et le socialisme se vivaient comme des avenirs nécessaires et bientôt victorieux" . Il fait l'expérience des différents conflits qui divisent le mouvement ouvrier et social français et l'empêchent tout le long du siècle de former un bloc uni contre la droite. L'étude de son itinéraire, qui s'inscrit dans l'histoire de la gauche socialiste française, du mouvement communiste international et de ses dissidences, constitue un "indispensable complément de l'analyse des structures sociales et des comportements collectifs" du mouvement ouvrier et social français. L'objectif cet ouvrage, tiré de mon mémoire de Master, n'est pas de faire une biographie de Victor Fay au sens strict mais de rendre compte de la construction des différentes cultures politiques qui composent la gauche française du siècle dernier à travers l'itinéraire politique d'un militant ayant fait successivement l'expérience du Parti communiste, de la SFIO, du PSU et de leurs oppositions. En ce sens, la biographie est capable de montrer la signification historique générale d'une vie individuelle. Il s'agit également de valoriser le fonds d'archives déposé par sa fille à La contemporaine (ex BDIC) qui conserve essentiellement les écrits, publiés ou non, de Fay, des journaux et des revues militantes sur une période allant de 1936 jusqu'aux années 198010. Ce fonds ne comprend que peu de sources concernant les relations familiales et amicales de Fay et les témoignages ou la correspondance datant d'avant 1945 sont rares. La grande majorité de ses archives a été saisie par les nazis à son domicile en 194011. En raison de ces lacunes archivistiques, auxquelles ne remédie que partiellement l'autobiographie de Fay, sa vie privée pendant l'entre-deux-guerres demeure difficilement accessible à l'historien. Son itinéraire de militant communiste, au sein des Jeunesses communistes en Pologne puis à la SFIC en France de 1925 à 1936, est mieux connu, mais les sources demeurent lacunaires. Il est difficile d'inventorier ses écrits durant cette période parce qu'il écrivait sous divers pseudonymes utilisés par d'autres militants. Il figurait sur le fichier "Antifa" sur la base duquel les Allemands ont opéré les premières perquisitions. Créé en 1938, ce fichier recensait des réfugiés fuyant l'Allemagne nazie et des militants antifascistes de différentes nationalités13. Le PCF a par ailleurs cherché à reléguer dans l'ombre cet opposant communiste : sa rupture n'a jamais été officialisée, le parti ayant préféré nier son existence. Ainsi explique-t-il dans ses mémoires : "Du jour au lendemain, mon nom disparut du parti. Je n'existais plus, je n'avais jamais existé". En effet son nom n'apparaît nulle part dans les archives du PCF.

10/2023

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Gestion des ressources humaine

Un compromis salarial en crise. Que reste-t-il à négocier dans les entreprises ?

Présentation des auteurs François Alfandari est docteur en science politique, membre du laboratoire Triangle, ses travaux portent sur l'étude du syndicalisme et des relations professionnelles, ainsi que sur l'engagement et les mobilisations collectives. Il a récemment publié " Transmettre un syndicalisme politique. La CGT dans un hôpital psychiatrique publicA ", La nouvelle revue du travail, 22, 2023 et a participé avec le Collectif Mosaïc à la direction d'un ouvrage méthodologique, Enquêter sur les relations professionnelles, ENS Editions, 2023. Sophie Béroud est professeure de science politique à l'Université Lyon 2, membre de Triangle. Ses travaux de recherche portent sur les transformations contemporaines du syndicalisme, les conflits du travail et les formes de mobilisation des travailleurs précaires. Parmi ses publications récentesA : A En luttesA ! Les possibles d'un syndicalisme de contestation, Paris, Raisons d'agir, 2021 (avec Martin Thibault)A ; A Sur le terrain avec les Gilets jaunesA : approche interdisciplinaire du mouvement en France et en Belgique, Presses Universitaires de Lyon, Lyon, 2022 (co-direction avec Anne Dufresne, Corinne Gobin et Marc Zune). Chloé Biaggi, docteure en sociologie (ENS de Paris), est actuellement chercheuse postdoctorante au LABERS (Université de Bretagne Occidentale). Ses travaux s'inscrivent dans le domaine de la sociologie du travail et des relations professionnelles. Sa thèse porte sur la gestion du fait syndical et des conflits au travail par les directions d'entreprises. Elle a récemment publié " Une négociation sans contrepartie ? Ethnographie d'un usage patronal de la négociation collective dans une filiale industrielle " (Socio-économie du travail, 2021) et " "J'en peux plus... j'arrête". Les ressorts de la (dé)mobilisation professionnelle d'un DRH" (La Nouvelle Revue du Travail, 2021). Charles Chamarre (ex-Berthonneau) est docteur en sociologie rattaché au Laboratoire d'Economie et de Sociologie du Travail (LEST). Il a réalisé sa thèse sur les formes d'engagement syndical dans des secteurs précaires et a publié plusieurs articles issus de cette recherche, dont " Un syndicalisme bridé. Expériences ordinaires de délégué·es dans des mondes du travail précairesA ", paru dans la revue Sociologie du Travail en décembre 2022. Il travaille aujourd'hui comme consultant en santé, sécurité et conditions de travail pour les CSE au sein du cabinet 3E Acante. Baptiste Giraud est maître de conférences en science politique à l'Université d'Aix-Marseille et chercheur au Laboratoire d'Economie et de Sociologie du Travail (LEST). Ses recherches portent sur les recompositions des conflits du travail, du syndicalisme et des relations professionnelles. Il est notamment le co-auteur du manuel Sociologie politique du syndicalisme (Armand Colin, 2018), avec Sophie Béroud et Karel Yon. Il a récemment aussi co-dirigé l'ouvrage collectif Le travail syndical en actes. Faire adhérer, mobiliser, représenter (Editions du Septentrion, 2020) avec Yolaine Gassier. Tristan Haute est maître de conférences en science politique à l'Université de Lille et chercheur au CERAPS. Ses recherches portent sur le vote, dans le champ politique et dans le champ professionnel, ainsi que sur la participation des salariés en entreprise (syndicalisation, recours à la grève...) ou encore sur les attitudes des salariés à l'égard des syndicats. Parmi ses publications récentesA : " Diversité et évolutions des attitudes des salariés à l'égard des syndicats en France ", Travail et Emploi, 2021/1, n°164-165, p. A 137-160A ; avec Pierre Blavier et Etienne Penissat, " Du vote professionnel à la grève : les inégalités de participation en entreprise ", Revue française de science politique, 2020/3-4, n°70, p. A 443-467. David Sanson Après un doctorat en sociologie, David Sanson est actuellement professeur adjoint (eq. MCF) à l'Université du Québec à Montréal. Prenant appui sur une ethnographie longitudinale réalisée au sein de collectifs ouvriers et militants d'une grande entreprise française, sa thèse explore les effets politiques du néo-management, en étudiant tout particulièrement les dynamiques inégalitaires et les mécanismes d'aliénation que l'appareillage gestionnaire contemporain produit auprès des classes populaires. Ses travaux actuels développent une approche critique des pratiques managériales hégémoniques, attentive aux multiples rapports de domination, aux dynamiques de relations professionnelles (coopérations, conflits, négociations) et aux pratiques de résistances des salarié. e. s en organisation. Camille Signoretto est maîtresse de conférences en sciences économique à l'Université Paris Cité, chercheuse au laboratoire Dynamiques sociales et recomposition des espaces (Ladyss), et également membre affiliée au CEET-Cnam et associée au LEST. Economiste du travail, ses travaux de recherche portent sur les relations de travail et d'emploi, et plus particulièrement leurs évolutions dans un contexte de changements socio-productifs et de réformes législatives qui ont marqué le monde du travail ces dernières décennies. Elle a récemment dirigé un numéro spécial de la revue Socio-économie du travail s'intitulant " Le "dialogue social" en pratiques et en contextesA " (n°10, 2021-2)A ; ou encore publié avec Aurélie Peyrin et Philippe Méhaut " Flexibilité et transformation des relations d'emploiA : une segmentation des pratiques de gestion de la main-d'oeuvre ", dans Relations industrielles / Industrial Relations, 77(4), 2022. Argumentaire de présentation de l'ouvrage Au terme d'une trentaine d'années de réformes ininterrompues des règles du dialogue social, parachevées par les ordonnances Travail de 2017, la négociation collective d'entreprise s'est imposée comme le nouveau pilier du système des relations professionnelles. En lien avec les politiques de flexibilisation du marché du travail, le dialogue social en entreprise est légitimé comme le moyen de concilier de façon plus équilibrée et efficace les impératifs de compétitivité des entreprises avec la défense des intérêts des salariés. L'institutionnalisation accrue du dialogue social en entreprise comme son éloge politique apparaissent pourtant en fort décalage avec la fragilisation importante de la capacité effective des salariés et de leurs représentants à peser sur la répartition de la valeur et les règles du rapport salarial. Les syndicats ont en effet beaucoup perdu de leur ancrage militant dans un système productif profondément bouleversé, marqué par la précarisation de la condition salariale et le " despotisme du marchéA " qu'impose la financiarisation de l'économie. Le tissu productif français n'en reste pas moins composé de modèles socio-productifs distincts, tant du point de vue des types de marché des entreprises, du profil de leur main d'oeuvre, des modalités de leur encadrement que de la présence syndicale. Combinant analyse statistique et enquêtes de terrain, cet ouvrage collectif montre comment s'articulent dans ces différents contextes socio-productifs les formes de la domination patronale, de conflictualité au travail et de pratiques du dialogue social. Ce faisant, il donne à voir selon quelles modalités différentes se reconfigurent, sous l'effet des transformations du capitalisme et des réformes néo-libérales, les usages des dispositifs du dialogue social en entreprise, les logiques de construction du compromis salarial et la capacité des salariés et de leurs représentants à le négocier. Points forts de l'ouvrage : Revisiter les transformations du dialogue social par le croisement de plusieurs traditions d'étude et l'articulation de plusieurs méthodes de recherche Cet ouvrage réconcilie en effet deux traditions de recherche qui ont jusqu'alors eu tenance à se tourner le dosA : l'analyse socio-économique des modèles productifs d'un côté, la sociologie des relations professionnelles de l'autre. Le croisement de ces approches ouvre une perspective originale pour apporter à l'analyse des modèles productifs une plus grande attention aux dimensions politiques des rapports de domination et des logiques du compromis salarial qui les caractérisent. Il permet en retour d'apporter un regard renouvelé sur les dynamiques de recompositions des relations professionnelles et des pratiques du dialogue social en lien avec la transformation du capitalisme. L'ouvrage s'appuie en outre sur une pluralité de méthode, en articulant l'exploitation des données statistiques de l'enquête REPONSE avec des enquêtes de terrain en entreprise. 2 - Penser ensemble les transformations les logiques de domination du capitalisme et les recompositions des pratiques de dialogue social Alors que la sociologie des relations professionnelles a eu tendance à étudier les logiques de fonctionnement des dispositifs institutionnels de la négociation collective comme s'ils fonctionnaient de manière autonome, le décloisonnement théorique opéré dans cette recherche vise au contraire à montrer qu'une approche par les contextes socio-productifs, attentive à la manière différente dont se configurent les rapports de domination et de résistance au travail, permet de mieux rendre compte de la dynamique différente des conflits et des négociations qui se jouent dans les espaces de la représentation du personnel. Cette perspective donne en particulier la possibilité de mieux cerner comment s'articuler la variété des formes de capitalisme (capitalisme familial, capitalisme administré, capitalisme financier) qui composent le modèle productif français, la dynamique des conflits et des usages des dispositifs du dialogue social en entreprise, et les logiques des compromis salariaux qu'ils servent à construire. Cet ouvrage est ainsi tout à la fois une contribution à l'analyse des transformations du modèle productif capitaliste français et des recompositions des rapports de domination et de compromis qu'ils rendent possible. 3 - Un regard original sur les métamorphoses du syndicalisme En raison de l'érosion de ses effectifs, le syndicalisme français est souvent associé à l'image d'un monde en crise et son utilité régulièrement questionnée. L'ouvrage s'attache à cet égard à éviter un double écueilA : celui d'une vision enchantée du dialogue social d'un côté, celui d'une vision trop unilatérale du déclin de l'influence syndicale. Si l'enquête montre effectivement combien le syndicalisme est mis à l'épreuve par les transformations du capitalisme dans sa capacité à organiser les salariés et défendre leurs intérêts, elle montre cependant aussi d'abord que, loin d'être uniformément affaiblie, leur capacité d'agir reste très dépendante et variable en fonction des contextes socio-productifs de leur ancrage. Elle montre aussi les organisations syndicales restent pourvoyeuses de ressources qui expliquent leur capacité beaucoup plus grande que les élus du personnel non syndiqués à tenir leur rôle de façon autonome des directions et à prendre en charge la défense des intérêts des salariés. 4 - Une enquête élargie aux représentants du personnel non syndiqués La comparaison entre élus du personnel non syndiqués et syndiqués constitue une autre grande originalité du dispositif d'enquête. Alors que les premiers constituent un angle mort de la sociologie des relations professionnelles, ils sont en effet au contraire partie intégrante de notre recherche. Cela permet de mieux mettre en lumière la variété des conditions de formation des instances représentatives du personnel et des modalités d'engagement possibles dans des mandats de représentants des salariés. Ce détour apparaît d'autant plus nécessaire que les nouvelles règles de la négociation collective ont ouvert la possibilité aux directions d'entreprise d'engager des négociations avec des représentants du personnel non syndiqués, majoritairement présents dans les petites entreprises. Notre enquête permet ainsi d'apporter un éclairage sur les contraintes singulières qui déterminent les modalités d'appropriation des dispositifs de la négociation collective et du dialogue social dans les petites entreprises familiales notamment. 5 - Eclairer les modalités d'intégration du dialogue social dans les politiques de domination patronale Attentif à la structure organisationnelle et sociale des usages des dispositifs de la représentation du personnel, cet ouvrage est enfin une contribution à l'analyse de la variété des significations et des pratiques que recouvre le concept flou de " dialogue socialA " dans les stratégies des directions des entreprises. Si elles s'articulent dans certains contextes à la recherche de compromis avec les représentants syndicaux, elle s'arrime au contraire dans d'autres au maintien de stratégies de répression anti-syndicale. Cette enquête documente de ce point de vue la manière dont les recompositions des modalités d'organisation du travail, des politiques managériales de gestion du personnel et les modalités d'appropriation des dispositifs du dialogue social par les directions d'entreprise varient ensemble. Elle apporte ainsi un éclairage sur la façon dont les formes de la domination patronale se différencient et se reconfigurent en s'articulant autour de trois types d'usages des dispositifs de la représentation du personnel, selon qu'ils sont réinvesties dans une simple logique de légalisation des relations professionnelles, comme un instrument de management des relations avec les syndicats ou bien utilisés de manière plus offensive pour refonder le rapport salarial.

10/2023

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Généralités

La Méditerranée occidentale : Histoire, enjeux et perspectives

Cet ouvrage consacré au Maghreb et au partenariat avec les pays de l'arc latin de la Méditerranée est publié au plus fort d'une actualité marquée, d'une part, par l'existence d'une crise aiguë du couple algéro-marocain qui était envisagé comme le moteur d'une construction maghrébine, et d'autre part, d'une marginalisation de la Méditerranée occidentale dans la géopolitique mondiale que traduit ce conflit majeur opposant l'Europe et les Etats-Unis à la Russie. Ce paradoxe qui incite au désenchantement, n'est-il pas aussi le moment privilégié pour repenser et agir afin de réaliser un regroupement régional et promouvoir des formes de partenariat et de coopération entre les pays méditerranéens. Autrement dit, la crise géopolitique ne donnerait-elle pas l'opportunité aux pays du Maghreb de repenser leurs alliances, de mieux défendre leurs intérêts communs, et contribuer ainsi à mettre en oeuvre un nouvel ordre politique et économique plus propice au progrès et au développement de leurs peuples. Il s'agira pour eux de se hisser à la hauteur des nouveaux enjeux provoqués par les recompositions géopolitiques en cours et de dépasser des situations jugées aujourd'hui indépassables. Ce livre posthume de Noureddine ABDI qui est l'aboutissement de longues années de travail offre des matériaux précieux dans l'édification de ce projet maghrébin " sans cesse recommencéA " et/ou contrarié, car soumis aux aléas politique, à des conjonctures économiques internes et à des alliances économiques ou politiques contraires à la vocation unitaire du Maghreb. Avant d'entrer dans le coeur d'un sujet -le Maghreb et subsidiairement ses rapports avec la Méditerranée occidentale- qui fut dès les années 1980 au centre de sa réflexion et de ses recherches, un mot pour évoquer une dette personnelle qui nous avons contractée auprès de N. Abdi. Engageant au milieu des années 1970, une carrière de chercheur en économie agricole et rurale, parmi mes premières lectures figuraient en bonne place les articles que N. Abdi avait publié dans des revues (la Revue Algérienne ou d'autres revue étrangères). Il fut pour moi, l'un des premiers chercheur algérien (aux côtés de nos aînés que furent Tami Tidafi, Hamid Aït-Amara ou Claudine Chaulet) qui ont contribué à nourrir nos connaissances, et à nous initier aux questions agraires et paysannes. Celles-ci avaient occupé son activité intellectuelle tout au long de la période qui va du milieu des années 1950 à la fin des années 1970. L'autobiographie qui figure à la fin de l'ouvrage apporte des éclairages intéressants et nouveaux sur les contextes politiques et économiques de cette époque. Elle nous livre un témoignage inédit sur les conditions concrètes d'émergence de l'autogestion agricole en Algérie, les obstacles rencontrés et les luttes d'influence exercées au sein de l'appareil d'Etat, les motifs de son engagement auprès des ouvriers de l'autogestion ou les attributaires d'une réforme agraire qu'il avait appelé de tous ses voeux. Si le récit autobiographique, rédigé avec une modestie qui impressionnait les personnes qui l'ont côtoyé, évoque assez clairement l'engagement politique et syndical de l'auteur dans la lutte de libération nationale, elle témoigne aussi de son attachement émouvant à sa terre - et de ses lieux- d'origine, décrit les premiers pas de l'Etat algérien dès l'indépendance en mettant l'accent sur difficultés dans la construction de ses institutions nationales. Au cours de la période qui va suivre, celle qui commence dans les années 1980, N. Abdi va élargir la perspective en traitant essentiellement de la construction maghrébine, et focalise sa pensée sur " les perspectives d'un avenir régional communA ". Appartenant dorénavant aux deux rives de la Méditerranée (un entre-deux dont il faisait l'expérience), il fonde son engagement personnel à penser également le rapprochement des pays du Maghreb avec les pays méditerranéens de l'arc latin. Les processus de renforcement des unions régionales face à une mondialisation en marche, l'essor d'une coopération adaptée à leur échelle font aussi l'objet de ses préoccupations intellectuelles. Ces formes de coopération et de regroupement régional sont pensées comme " le meilleur moyen de peser dans les relations internationalesA ". Ces nouvelles recherches que l'auteur engage baliseront un parcours personnel et professionnel au sein d'institutions tels l'Institut d'Etudes du Développement Economique et Social (IEDES), le CNRS français, la Maison des Sciences de l'Homme ou de laboratoires de recherche de l'Université Paris VII. Abdi se dépensera avec énergie pour animer des forums, des débats ou des rencontres scientifiques réunissant des dizaines de chercheurs appartenant aux deux rives. Tous les travaux et toutes les contributions que N. Abdi signale dans cet ouvrage, sont les produits intellectuels de ces multiples activités ; elles ont fait l'objet de publications thématiques dans des revues, des compte-rendu de séminaires ou des ouvrages collectifs. Les sources d'inspiration les plus marquantes de ce parcours professionnel sont évoquées. Il y a en premier lieu l'auteur maghrébin par excellence que fut Ibn Khaldoun dont il est fait souvent référence dans ses travaux, mais aussi d'autres auteursA ; le marocain A. Khatibi, et le tunisien A. Meddeb- passeurs et penseurs comme lui de l'altérité- qui partageaient avec lui, une confiance dans la construction de ce " lieu de symbiose " qu'est selon lui le Maghreb. Il n'a cessé d'entretenir un dialogue ininterrompu, et jusqu'à leur disparition prématurée, avec ces deux auteurs qui cultivaient, selon son expression, une " maghrébinité commune ". Cet " entre-deuxA ", position qu'il assumait pleinement, et les liens socioculturels qui le rattachait aux deux rives de la Méditerranée, l'ont naturellement conduit à plaider pour un rapprochementA ; celui-ci qui se nourrissait d'échanges intellectuels avec d'autres auteurs (J. Berque ou P. Vieille) à la sensibilité méditerranéenne tout aussi affirmée que la sienne. Ce n'est, écrit-il " qu'en restituant parmi les autres dimensions du Maghreb, celle qu'il partage avec l'Europe latine, qu'on parviendra à saisir les réalités maghrébines telles qu'elles sont perçues par les Maghrébins eux-mêmes et plus particulièrement la société civile, de façon à que ce Maghreb réel puisse constituer notre véritable horizon de pensée ". Cette vision généreuse d'ouverture vers la méditerranée occidentale l'empêchera d'examiner les distances prises avec la rive sud, l'Europe méridionale préférant de fait coopérer avec les nouveaux pays (ex PECO) admis dans l'Union européenne. Elle est également silencieuse sur les approches nationales que chacun des pays du Maghreb engage avec les pays de l'Union européenne Aucune coordination n'est réalisée dans la mise en oeuvre des rapports politiques et économiques et politiques. A titre d'exemple, les accords d'association sont signés séparément et leurs évaluations -qui font ressortir des tendances à l'accentuation des asymétries économiques défavorables aux 3 pays du Maghreb- n'ont pas permis les rapprochements concertations pourtant nécessaires. L'engagement politique de l'auteur pour " féconder un Maghreb des citoyensA " est un engagement actif résolument orienté vers des processus de création et de production de richesses " au plan intérieurA ", et impulsé " au plan extérieurA " par " un esprit d'ouverture et de partenariatA ". Il s'agit, nous dit-il, " de dégager les perspectives d'un avenir régional commun pour qu'il soit davantage maîtrisé que subi, c'est-à-dire qu'il prenne la forme d'un essor autonome plutôt que celle d'un moindre développement et d'une dépendance accrue ". Empruntant à l'auteur des " AndalousiesA ", la formule de J. Berque, N. Abdi appelle lui également à des " Andalousies toujours recommencées, dont nous portons en nous les décombres amoncelés et l'inlassable espérance ". L'approche généreuse et profondément universaliste que N. Abdi adopte, reprend une idée empreinte d'humanisme, de cet autre penseur de la Méditerranée, Paul Valéry, qui concevait la Méditerranée comme un " dispositif à faire de la civilisationA ". La méditerranéïté, écrit-il, est ainsi intimement liée au processus de construction maghrébine, elle en est l'un des principes fondateurs, tout comme à l'inverse, " la maghrébinité en est tributaire ". Ces affirmations s'appuient sur une réflexion critique qui intègre l'analyse de la longue durée, et où N. Abdi expose avec lucidité le cheminement du projet politique de construction d'un Maghreb " lequel est en permanence fait et défait par les pouvoirs en place ", ce qui témoigne d'un clivage -qu'il subissait lui-même sur le plan politique nous dit-il-, et " qui se creusait entre le Maroc et l'Algérie proches l'un de l'autre ". Sa réflexion sur la vocation unitaire dans le Maghreb s'appuie sur l'examen minutieux desA critères à la fois socio-historiques et politiques, et en particulier la dimension ethno-culturelle de la région. Le Maghreb écrit-il " constitue un sujet historique ", en particulier dans les phases conflictuelles et de résistances. Il rappelle que l'Etoile Nord-Africaine qui fut créée à Paris en 1927, et qui traduira les premiers pas du nationalisme algérien, " vise à construire l'unité du MaghrebA ", " à ressusciter une unité ancienne que l'histoire a enregistrée et dont elle a témoignéA ". Il s'attache avec obstination à retracer le cheminement de l'idée maghrébine dans un passé plus proche de nous, en examinant les faits qui participent au développement de ce " sujet historique " dans les phases conflictuellesA ; ceux des années 1930 (de la création de l'Etoile Nord-Africaine à l'Association des Etudiants Musulmans Nord-Africains (AEMNA), ceux de la deuxième guerre mondiale, avec le mouvement syndical animé par le tunisien F. Hachad). Il traque enfin cette solidarité maghrébine partagée par les mouvements de libération nationale dans les années 1950. Il remarque bien que la proclamation de la construction du Maghreb à Tanger, en août 1959, et sa relance le 17 février 1989, n'empêche pas cet ensemble d'être toujours aussi divisé, notamment par une frontière algéro-marocaine fermée. Ce constat établi, l'incite naturellement à analyser, au-delà de la question du Sahara occidental, les raisons socio-politiques et économiques qui font ce Maghreb " écarteléA ". Ces discordes sont à rechercher, nous dit-il, dans la nature de régimes peu disposés à " concéder la moindre parcelle de leurA pouvoir dansA le cadre d'une unification du MaghrebA ", mais aussi dans l'état de sociétés politiques ou de sociétés civiles peu mobilisées par l'idée maghrébine. Ces questionnements de l'auteur ne le détournent pas de l'exercice de recension des éléments qui peuvent constituer les moyens de dépassement de ces situations de fait. Cette dernière posture illustre assez parfaitement l'optimisme raisonné de N. Abdi dans l'affirmation d'une maghrébinité possible et souhaitable pour l'avenir des peuples de la région. Elle le conduit à analyse avec rigueur les facteurs favorables à une intégration maghrébine, ou de ce que les prospectivistes appelleraient " les signaux faiblesA " favorables à une construction maghrébine. Les facteurs religieux et culturels d'abord, où N. Abdi qui, tout en attirant l'attention sur le recours vain à une " retraditionnalisationA " du fonds culturel et religieux de la région, invite, à mobiliser et/ou revivifier un fonds religieux et culturel maghrébin " avec ses institutions et ses références ancestrales propresA ". Il y a ensuite des facteurs sociaux avec " les passerellesA " que représentent les diasporas du Maghreb. C'est, nous dit-il, au sein de l'immigration que l'on rencontre " cette maghrébinité radicale ". Cette dernière ressource, facteur puissant d'intégration, est représentée par les populations originaires du Maghreb. Ces dernières font la découverte dans les sociétés d'accueil " de leur sentiment d'une appartenance commune ", de cette " identité partagée " et qui prennent " conscience de ce qui les unitA ". Après tout, s'interroge-t-il, " si nous considérons le fait que l'affirmation de l'indépendance du Maghreb a commencé à l'extérieur pendant l'entre-deux-guerres, pourquoi n'en serait-il pas de même du mouvement de reconstruction du MaghrebA "A ? Et Abdi d'explorer enfin les conditions économiques propices à l'intégration. L'existence d'un large marché fort de millions de consommateurs " qui aurait pour effet d'augmenter de 2 points le taux de croissance de la régionA ", le développement des infrastructures de transport (autoroute Trans maghrébine dont l'essentiel des tronçons sont déjà réalisés à l'intérieur de chacun des pays), l'énergie (électricité et gaz), de même que l'irruption dans l'espace économique, souvent appuyée par le développement des technologies de l'information et de la communication (TIC), de " nouveaux acteurs de l'intégration socio-économique du MaghrebA ", que sont les entrepreneurs et chefs de PME. Les facteurs d'intégration sont à cultiver au sein des communautés universitaires où " l'intelligentsia maghrébine devrait, où qu'elle se trouve, jouer un rôle moteur dans le cadre d'échanges et de collaborationsA "A ; dans les milieux d'affaires ensuite où la promotion d'une intégration peut être entreprise par des agents qui se situent au sommet de l'économie maghrébine. Le futur du Maghreb ne peut être toutefois pensé sans ce couple algéro-marocain qui est appelé à jouer un rôle décisif dans une construction maghrébine fondée sur " une réelle émancipation et un vrai progrès pour toutes ses populationsA ". " Ce qui importe le plus, nous dit-il, c'est avant tout de cultiver et de développer la maghrébinité au travers de relations maghrébines les plus favorables à l'épanouissement de l'homme ". Reprenant l'une desA premières propositions de KHATIBI formulé sur les relations de voisinage, il nous invite " à se regarder en face ", A à " construire un espace vie qui soit communA ", et à " aller vers le risque partagé avec l'autre, les autresA ". Une pensée généreusement humaine, anti bureaucratique par nature, s'appuyant sur une mobilisation citoyenne constitue le fil conducteur de ses analyses du Maghreb. C'est la même pensée que l'on retrouve dans ses travaux de jeunesse portant sur la construction du Maghreb conduites par le syndicaliste tunisien F. Hached, où dans le rôle joué par l'UGTA et la Fédération des travailleurs de la terre dans l'autogestion agricole algérienne. Les " constructions bureaucratiquesA " et les " approches technocratiquesA " seront en permanence vigoureusement dénoncées par N. Abdi. Ces approches dessaisissent, affirme-t-il, les acteurs sociaux, les producteurs ou les créateurs de richesses de leurs pouvoirs et freinent, nous dit-il le mouvement d'émancipation sociale, soit de la paysannerie du temps de l'autogestion agricole, soit les sociétés civiles et politiques dans la construction du Maghreb. Nous le répétons, la vision du Maghreb que propose N. Abdi est inséparable de son itinéraire de vie et de la fidélité à ses engagements politiques et syndicaux qu'il évoque. L'exil qu'il a choisi dès 1973, va le conforter dans un statut de chercheur qu'il n'aura jamais abandonnéA ; ce statut l'autorisait à exercer ses activités avec une liberté d'esprit à laquelle il était profondément attaché. S'il a inauguré un champs d'étude dans les années 1960-70 passionnant pour ma génération (celui des questions agraire et paysannes), il nous offre avec cet ouvrage posthume, un chantier de travail que l'on découvre avec un réel plaisir intellectuel et où l'érudition de l'auteur laisse aussi place à l'émotion suscitée par cette quête absolu d'un idéal de progrès et d'émancipation pour les peuples du Maghreb, cette quête de méditerranéïté faite de paix et de coopération à laquelle il rêvait. La lecture de ce livre nous laisse toutefois un grand regret. Celui de n'avoir pas croisé l'homme, celui de n'avoir pas échangé sur son expérience dans un domaine qui nous est cher à tous les deux, celui de la paysannerie qui fut son premier domaine de recherche ; mais au-delà, de cet intérêt tout personnel, la frustration de n'avoir pas eu l'occasion de dialoguer sur cette passion qu'il entretenait et cette cause qu'il défendait avec déterminationA A : celle du "Maghreb des peuples et des citoyensA ", dont il portait l'idée avec une conviction admirable. Omar Bessaoud, économiste agricole, professeur associé au CIHEAM-Montpellier. Montpellier, le 2 juin 2022.

10/2022