L'assassinat, Christophe Dufossé (chapitre 4)
Ce texte est une fiction. La distanciation existant entre l’auteur et les propos comme les actions de son personnage interdit en conséquence, on l’aura compris, toute assimilation à des personnes réelles comme toute intention dolosive de la part de l’écrivain.
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4
À la vérité, cet homme au milieu du monde est un anonyme.
Comme vous, comme moi.
Une nature ordinaire.
Comme l’anarchiste Caserio surgissant d’un défi lé à Lyon en 1894 pour donner un coup de poignard mortel à Sadi Carnot, comme Ali Agça en 1981 lorsqu’il tire sur le pape, comme John
Hinckley Jr. qui décharge son revolver sur Ronald Reagan la même année, il appartient à la cohorte des meurtriers spectacles, de ceux qui surgissent de la foule dont ils sont les enfants écartés.
On tuait autrefois pour obtenir le pouvoir. Aujourd’hui, le seul pouvoir dont cet homme pourrait s’emparer, c’est celui attribué par l’attention médiatique.
Ironie du sort, il s’élèverait un instant à la hauteur de celui dont le règne vient d’abaisser la valeur politique pour la laisser surclasser par les médias. La boucle serait bouclée. Car quel autre moyen, sinon le coup de pistolet qui marque les esprits, terrorise le pouvoir, pourrait faire sortir les masses de leur léthargie ?
Bien plus tard, comme pour Kennedy, on parlerait de complot, d’implication de plusieurs personnes. Même s’il a une famille, des enfants, peut-être des amis, cet homme ne dépend que de lui-même. Seul un acte d’une portée immense pourrait le relier encore aux autres. Les mêmes hommes qui attendent que quelqu’un le fasse, qu’un autre qu’eux-mêmes accepte cette tâche comme une épreuve personnelle, un défi à l’ordre des choses.
Cet homme n’est finalement pas si seul.
21/02/2009 - 13:30