Un professeur de l'université du Nebraska, Matthew Jockers, s'est mis en tête d'analyser 40.000 romans, à l'aide d'un superordinateur doublé d'un logiciel analysant les différentes émotions contenues dans les ouvrages. Les résultats ont distingué 6 trames narratives, convoquant différentes émotions dans un ordre à peu près similaire pour chacune des catégories. Le reste n'est que variations...
Le 27/02/2015 à 17:24 par Antoine Oury
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27/02/2015 à 17:24
« Man in Hole » et « Man on Hill », descente et élévation, les deux principales trames narratives des romans analysés
40.000 romans ont été introduits dans la machine, et le logiciel Syuzhet s'est chargé d'analyser les différentes émotions évoquées dans les textes. Les résultats ont ensuite été structurés par le professeur Jockers, qui a distingué deux trames narratives principales, divisibles en trois sous-catégories chacune. Au total, donc, pour couvrir ces 40.000 textes, seulement six trames narratives.
Les deux principales sont dénommées « Man in Hole » et « Man on Hill », et se distingue par leur progression : la première, la « descente », propose des émotions positives, puis négatives, avant un retour vers un peu plus d'optimisme. L'autre, « l'élévation », propose le cheminement inverse, avec un départ négatif, un passage vers des émotions plus positives, et un basculement final qui s'assombrit.
La « descente », « Man in Hole », correspondrait à 45,99 % des romans étudiés, dont le Portrait de l'artiste en jeune homme de James Joyce, Moby Dick de Herman Melville ou Recherche jeune femme aimant danser de Mary Higgins Clark. En face, on trouve donc 54,01 % des ouvrages dans la catégorie « élévation ». Les différentes sous-catégories établissent plus précisément les moments où les émotions sont positives ou négatives, selon la progression dans l'intrigue.
Ainsi, Un simple génie de David Baldacci correspond à un archétype de la trame « Man in Hole » (« descente »), où les émotions positives occupent environ 20 à 30 % des premières pages du roman, suivies par une descente et un retour à des émotions plus positives sur les 20 à 30 % de la fin du récit.
L'analyse d'Un simple génie de David Baldacci, mise en parallèle avec une trame archétypale
L'ordinateur, signale Jockers, se retrouvait parfois devant une impossibilité de classer une trame narrative dans une des six catégories créées, et une septième faisait donc parfois son apparition, pour environ 10 % des textes. Une page GitHub a été créée par Jockers, afin que chacun puisse analyser des textes littéraires.
Cette fouille de textes a été inspirée par Kurt Vonnegut, qui, lors d'une conférence, avait expliqué que la « forme simple des histoires » pouvait être analysée par des ordinateurs. C'est d'ailleurs Vonnegut qui avait proposé les deux modèles dominants « Man on Hill » et « Man in Hole ». Dès le XVIIIe siècle, le dramaturge Carlos Gozzi avait établi 36 catégories dramatiques, dont la révolte, la folie, le crime involontaire ou l'autosacrifice.
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