En août 2021, Sony cassait sa tirelire pour s’offrir Crunchyroll : pour 1,1 milliard $, le Japonais réalisait de jolies emplettes, alors que la guerre du streaming et de la production fait rage. Et plus encore, celui de la production et des droits. Hasard des rachats et des fusions, dans l’escarcelle de Sony se trouvait également Anime Digital Network, plateforme cofondée par Média Participations et VIZ Media Europe. ADN rejoindra désormais le giron de l’éditeur, apportant dans cette période estivale un peu… d’animation ?
Le 28/07/2022 à 12:37 par Nicolas Gary
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Publié le :
28/07/2022 à 12:37
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Au commencement étaient genzai.fr et kzplay.fr, plateformes de vidéo à la demande appartenant à Média-Participations et VIZ Media Europe. Leur fusion en septembre 2013 aboutissait à la création d’Anime Digital Network, avec un catalogue de 4000 épisodes d’animes et une cinquantaine de films : Naruto, Fairy Tail ou encore Magi étaient au menu.
En une décennie, les acteurs ont bougé : Crunchyroll, filiale de Warner Media à l’époque, fusionnait avec VIZ Media Europe (qui compte l’éditeur de mangas et d’animes Kazé, entre autres) en 2019. Deux ans plus tard, Funimation Global Group, filiale de Sony, mettait la main sur Crunchyroll, et ses divisions. Rappelons tout de même qu’en s’offrant Kazé, en 2009, VIZ Media Europe (appartenant aux éditeurs japonais Shûeisha et Shôgakukan) s’ancrait dans une stratégie visant spécifiquement le territoire français. À ce titre, Kazé passait définitivement sous la marque Crunchyroll en juin dernier.
Mais les temps changent et les associés de jadis se séparent pour des lendemains plus heureux, car chacun de son côté. Crunchyroll cède ses parts dans la société ADN, qui devient alors pleine propriété de Média-Participations : quelques mois après avoir intégré le capital de Deezer, l’entreprise française décide de consolider son volet numérique.
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Pour l’anecdote, tout de même, rappelons que Crunchyroll avait commencé son activité en 2006 comme site de partage de vidéos – avec notamment des fansub – avant d’entamer un virage vers la distribution légale, deux ans plus tard. Or, le groupement d’intérêt général que représentait ADN était lui aussi motivé par l’impératif d’une offre légale, pour répondre au piratage…
Côté Crunchyroll, céder d’ADN facilite le travail en cours d’unification globale des services et des marques en Europe. Ainsi, quand la plateforme française Wakanim a fusionné avec Crunchyroll — mars 2022 —, il n’a pas fallu attendre longtemps pour que le catalogue soit versé directement dans les tuyaux de la maison mère.
Il en est allé de même avec Funimation qui avait signé pour une diffusion sur Crunchyroll en janvier 2016 et finira par être racheté en juillet 2017. Pour 143 millions $, Sony devenait actionnaire majoritaire, la suite des ramifications est connue. Au passage, Funimation pilote également Wakanim : le monde est petit.
ADN devient donc la plus importante plateforme de streaming française, consacrée à l’animation, avec des titres comme Naruto, One Piece, L’Attaque des Titans, Hunter X Hunter ou Demon Slayer — n’en jetez plus ! « La volonté d’ADN a toujours été de partager avec le marché français sa passion pour l’animation, qu’elle soit japonaise ou française. C’est pourquoi ADN proposera désormais un plus large éventail d’anime japonais, d’animation pour adolescents et adultes ainsi que des productions originales françaises », assure Julien Lemoine, directeur général de la structure.
Les conditions financières n’ont évidemment pas été communiquées, mais les projets ne manquent déjà pas : Ankama — dont Média-Participations est actionnaire depuis 2017 — et ADN collaboreront tant au niveau des œuvres que de la technologie. Le studio de création de jeux vidéo, qui s'est diversifié avec la publication de jeux de plateau, de livres puis l'animation, a également ajouté la corde webtoon à son arc, en mai dernier.
Reste que ce schisme devenait de plus en plus prévisible, comme nous le confirme Julien Papelier, directeur général adjoint de Media Participations. « Crunchy disposait de deux plateformes de diffusion, la sienne et ADN, ce qui n’avait pas beaucoup de sens pour le seul marché français. » Et, suite au rachat, Sony est arrivé dans la mêlée avec Wakanim dans ses bagages. De la sorte, Crunchy portait donc trois offres pour le territoire français — et l’avenir d’ADN nécessitait une prise de décision côté Média.
Certes, les discussions avaient commencé voilà quelque temps déjà, mais pour trouver un accord, une chaîne de validations juridiques et autres se met en place…
À cette heure, Média Participations se réjouit surtout de ce que la majorité de l’équipe d’ADN reste dans l’aventure. « Nous partageons ce sentiment d’avoir construit un actif performant, l’équipe est très connectée à ses abonnés et aux membres : il aurait été regrettable de ne pas pouvoir poursuivre avec eux », reprend Julien Papelier.
D’autant que les sujets ne manqueront pas, à commencer par le plus sensible : sécuriser les œuvres diffusées jusqu’à présent. « La France reste un pays de référence sur tout ce qui touche à la japanime, ce qui plaide en notre faveur. » Pour autant, l’enjeu est majeur : se rapprocher des partenaires japonais, anticiper et maintenir des offres concurrentielles. « Les investissements importent, mais le modèle de Média est celui d’une vision à long terme, impliquant également une gestion des marques. Nous avons des approches assez uniques à mettre en avant. »
Et des exemples de réussites comme Naruto, dont l’exploitation globale, depuis Kana comme éditeur des mangas en passant par les droits audiovisuels avec Médiatoon, « démontre une cohérence d’actions ». Ce qui n'empêche pas, au contraire, de regarder le prix de l'immobilier à Tokyo, juste au cas où il faille se rapprocher au plus près des éditeurs japonais...
En parallèle, ADN développera assez logiquement des créations originales — un impératif pour les offres de streaming qui se démarquent alors auprès des abonnés. Lors du festival d’Annecy, une première coproduction a été dévoilée : l’adaptation de Dreamland, édité chez Pika. Le succès de ce manga français a permis de placer de sérieux espoirs dans cette réalisation audiovisuelle — et bien entendu, d’autres sont à venir.
Dans les cartons, ADN vise surtout « la richesse des talents européens, qui ont construit une culture hybride, de leurs influences américaines, japonaises et franco-belges », note le DGA. L’intégration des équipes s’effectuera progressivement, avec une perspective clairement définie : « Face aux géants du numérique, américains, chinois ou japonais, nous avons besoin d’exister et entretenir une relation directe avec le public », souligne Julien Papelier. « Que ce soit vis-à-vis des lecteurs ou des spectateurs, cette connexion devient fondamentale. »
De là un spectre créatif élargi, et une offre sur ADN qui se doublera de séries pour adolescents et adultes. Chez Média, on a déjà un peu d’expérience en la matière — Tintin, Boule et Bill, Garfield ou encore le Marsupilami et Les Schtroumpfs en attestent. Doter la plateforme d’une capacité d’innovation ainsi que d’œuvres inédites ne pourra que renforcer son attractivité.
Et puis, difficile de passer outre les échanges avec Ankama. Brièvement évoqué, le studio partage en effet nombre de points communs, admet Julien Papelier. « Nous n’avons pas pour projet de regrouper les structures, parce que nous avons plutôt une culture de la diversité. En revanche, le rapprochement des forces est évident, parce qu’Ankama et ADN ont des univers qui se rejoignent. Le gaming, la fantasy, le manga et la japanimation communiquent constamment. » Sans oublier le webtoon et son essor...
crédits photo : ADN
1 Commentaire
Rieg Davan
29/07/2022 à 08:44
ADN aura donc surement la S4 de Wakfu, je vais suivre le développement d'ADN pour voir si je m'abonne