Face à la constante macabre des règlements de compte liés au trafic de drogue, Mohamed Bensaada, issu des quartiers nord de Marseille et engagé politiquement à gauche depuis toujours, propose une solution radicale : la légalisation du cannabis. Il publie un petit ouvrage éclairant sur la question.
Le 17/04/2023 à 15:30 par Victor De Sepausy
352 Partages
Publié le :
17/04/2023 à 15:30
352
Partages
Depuis plusieurs années, la litanie des règlements de compte liés au trafic de drogue semble se dérouler sans réaction de la part de l’ensemble de la société française. Il y a comme une fatalité sur la question. Parfois, le nombre particulièrement important de morts, notamment dans les quartiers nord de Marseille, pousse à une action coup de poing. Mais on ne va pas au-delà. C’est pourtant ce que souhaite faire Mohamed Bensaada, dont l’histoire personnelle est profondément liée à la cité phocéenne.
Né à Meknès au Maroc et arrivé à quatre ans dans la cité du parc Corot, dans le 13ème arrondissement de Marseille, Mohamed Bensaada a constamment lié sa trajectoire de vie avec un engagement profond pour faire évoluer le destin des quartiers qui l’ont vu grandir. Fondant des collectifs dans une dynamique de démocratie participative, tout en marchant aux côtés des Verts, du Parti Communiste et, enfin de La France Insoumise, il cherche à rebattre les cartes. Candidat malheureux aux élections législatives de la troisième circonscription des Bouches-du-Rhône, il vient porter une proposition de loi en faveur d’une légalisation du cannabis.
Il faut dire que ces derniers temps, les actions se multiplient pour faire bouger la législation, la France commençant à regarder du côté de ce que mettent en œuvre d’autres pays pour faire face à la consommation de cannabis. Avec un commerce de graines qui se joue des frontières, notamment grâce à Internet, il devient illusoire de lutter contre la plantation clandestine. En parallèle, la consommation de CBD ne connaît pas la crise, et des sites comme La ferme du CBD, https://www.lafermeducbd.fr/, font le plein, le législateur ayant ouvert la porte à une complète légalisation de ce type de produits très faiblement dosés en THC. Il resterait donc un pas à franchir, mais qui semble, pour l’instant, difficile à envisager avec une majorité politique plutôt classée à droite. Or, c’est rarement la droite, sur ce sujet, qui s’est montrée la plus en pointe.
Pour accompagner cette démarche soutenue par La France Insoumise comme une réponse pragmatique face au trafic, Mohamed Bensaada vient de publier aux éditions La Courte échelle un petit ouvrage de 128 pages (10 €) éclairant sur le sujet. Intitulé LEGALIZE IT ! (avec pour sous-titre « Pour une législation sociale du cannabis et de ses usages »), ce livre s’inscrit dans les pas de la mission parlementaire qui avait conclu, après une très vaste consultation, à la mise en œuvre d’une légalisation régulée face à une prohibition qui échoue à permettre de résoudre le problème.
Pour Mohamed Bensaada, les mesures actuelles, qui prônent un renforcement de la présence policière, ne font qu’alimenter la violence, dans une forme de spirale infernale. La véritable solution se situerait ailleurs. Pour donner une chance d’être étudiée à la proposition de loi conduite par La France Insoumise, il est mis en avant le gain potentiel d’une telle mesure : un milliard d’euros. Il faut dire qu’on pourrait aisément transformer une perte en gain. D’une part, les unités des forces de l’ordre affectées à la lutte contre le trafic de stupéfiant pourraient être allégées, et d’autre part, une taxe prélevée sur la vente générerait un profit pour l’État.
Cependant, le point de vue portée par Mohamed Bensaada est loin de faire l’unanimité. Du côté de la police, on rétorque que le taux de THC sera limité sur les produits légalement vendus, ce qui poussera les consommateurs à se rabattre sur le trafic illicite qui se spécialisera sur la vente de stupéfiants proposant une teneur très élevée en THC. L’autre question, et non des moindres, est celle du manque à gagner gigantesque pour de nombreuses cités à travers le pays. Comment et dans quoi se reconvertiront les trafiquants actuels dépossédés d’une partie du marché du cannabis ? Le spectre d’un développement accru des drogues dures est toujours mis en avant dans ce cadre.
A cela, Mohamed Bensaada répond que les retours de ce qui se fait déjà au Portugal, en Uruguay, et dans certains états américains sont plutôt rassurants. On aurait à la fois des rentrées fiscales importantes et un gain sécuritaire non négligeable. Mais l’auteur va plus loin en mettant en avant une démarche sociale à organiser autour des petites mains actuelles du trafic, qu’il faudrait aider à se reconvertir dans les différents domaines qui recruteront pour développer une offre légale, que ce soit dans la production ou la vente.
Ce livre, écrit pour faire avancer la société française, vient s’inscrire dans un débat qui n’en finit pas de faire couler beaucoup d’encre. Mais, il reste à déterminer si la France est prête à avancer sur le sujet du cannabis, ou si la tradition répressive va continuer de l’emporter.
Crédits illustration Pexels CC 0
Commenter cet article