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Ce nouveau documentaire que publient les Editions aborde le sujet inépuisable et récurrent de l'adolescence mais, par sa conception graphique déjà, semble vouloir se démarquer un peu. Léger, drôle et sans gravité apparente, la couverture  et le titre de l'ouvrage annoncent la tonalité : . C'est un passage incontournable pour devenir adulte, plein de changements, de découvertes inattendues, parfois déconcertantes ou déstabilisantes mais jamais insurmontables et surtout pas hors-normes.

Ainsi la finalité de ce guide, élaboré à partir de plus de 70 questions, est de s'épanouir, de se révéler en tant qu'homme ou femme, de prendre confiance en soi, en comprenant pourquoi et comment notre corps se transforme. Sans tabou, de manière objective et instructive, le livre éclaire sur les doutes, rassure sur les peurs et inquiétudes, apaise le sentiment de honte ou de culpabilité fréquents chez l'ado, participe à son émancipation dans le respect de la loi, sans le contraindre autrement. Ni morale, ni jugement, ni direction imposés : l'ado est libre d'agir comme il l'entend, avec les informations qu'il a reçues, s'en départir ou s'en servir pour grandir et se construire, parvenir à être en accord avec la vie qu'il mène, au mieux avec ses choix.

A la fois sérieux et drôle, bienveillant et doucement provocateur, il est une aide utile non seulement pour les jeunes mais également pour les parents, parfois désarmés pour répondre à certaines questions, devenus eux-mêmes souvent amnésiques face à leurs propres angoisses d'ado et peut créer l'opportunité d'échanges nouveaux moins complexés, moins maladroits entre ces générations.

A l'origine allemand, ce documentaire, rédigé par la journaliste indépendante Antje Helms a été adapté pour la France par Jessie Mangana, auteure des Mots indispensables pour parler du Sexisme (Syros) et est illustré dans la bonne humeur par des photographies représentant 30 jeunes en mouvement et plutôt gais, très contemporains, vifs et expressifs, à l'opposé des caricatures amorphes et taciturnes de l'ado mal dans sa peau.

Grâce à un langage courant accessible, des explications souvent concises et directes, l'ouvrage aborde avec beaucoup de naturel, différentes problématiques relatives à la puberté, aux différences fille-garçon, au sentiment amoureux, au sexe et à la reproduction et alterne questions académiques (Comment se manifeste la puberté ? A quelle fréquence surviennent les règles ? Les préservatifs sont-ils fiables ? Qu'est-ce qu'un orgasme ?) et questions plus inattendues ou plus intimes (Est-ce que c'est grave de se raser ou de s'épiler dès 11-12 ans ? Les tampons font-ils mal ? Comment on embrasse ? Combien de fois par semaine peut-on se masturber ? Ai-je le droit de regarder des films pornos sur mon téléphone ?)

Les réponses apportées sont volontairement libérées des contraintes de langage, évitent tout conformisme ou jugement moral, s'efforcent d'être le plus objectives et explicatives possible, préviennent des risques éventuels et rappellent la loi, le cas échéant, mais ne condamnent ni ne blâment. L'essentiel est d'atténuer un éventuel désarroi (Que faire quand quelqu'un m'aime et que je ne l'aime pas ? Est-ce que toutes les filles saignent la 1ère fois ?), relativiser certains changements corporels (Que faire contre les boutons d'acné ?) ou émotions exacerbées (Pourquoi se sent-on plus fort qu'avant ?) et d'aider de manière concrète le jeune parfois confronté à certaines épreuves plus difficiles (Que faire si on est enceinte et qu'on ne veut pas le dire à ses parents ? Que faire si mon amoureuse est enceinte ?)

Un ouvrage qui devrait libérer la parole, lever des tabous, percer quelques mystères.  Rassurant, respectueux et tolérant  mais sans excentricité. A mettre entre toutes les mains dès 11 ans.

Sans un mot, Patrice Killoffer déroule sous nos yeux ébahis le quotidien émouvant, tantôt routinier et banal, tantôt festif d'un dessinateur et de son robot domestique : cette intelligence artificielle sur pattes est le meilleur ami de l'homme, semble-t-il. Mais comme le disent les philosophes (on les paie mal pour ça, d'ailleurs) : rien n'est éternel en ce bas monde : le robot passe la carte-mère à gauche et le pauvre dessinateur est d'un coup saisi par un étrange sentiment de solitude et de vacuité. Il faut qu'il trouve à nouveau l'âme sœur digitale...

Tour de force visuel En chair et en fer publié par Casterman poursuit le travail d'auto-exploration graphique entrepris par le dessinateur-scénariste dans 676 apparitions de Killoffer ou Killoffer tel qu'en lui-même enfin (tous deux à L'Association, en 2002 et 2015), confrontant à présent le double de l'auteur à la technologie et à la robotique. Pas besoin de paroles pour raconter en détail les liens subtils que peuvent tisser l'homme et la machine, pour exposer les problèmes de communication et les troubles de l'humeur...

Plus magistral que jamais, Killoffer s'en donne à cœur-joie pour dessiner les câbles et les rayonnages, les contours de meubles et les encadrements de portes. Le petit intérieur de son appartement habité par les robots se transforme en macrocosme qui boucle sur lui-même, entre rêve, itération et réalité, alors que chaque case tire une force incroyable du contraste exploité dans toute sa pureté entre le noir et le blanc.

Inspiré par l'essai Machines insurrectionnelles de Dominique Lestel que le dessinateur avait illustré, ce récit comique, malin, profond et touchant invite les lecteurs à plonger, en robe de chambre et scrotum à l'air, dans le petit monde bedonnant des machines qui s'humanisent et des humains qui se... comprennent enfin, dans la contemplation de leur double cybernétique.

Un album bluffant.

Joe – Hélène de son véritable prénom – a une grande passion dans la vie : lady Oscar. Mais si, souvenez-vous, cette héroïne de dessin animé japonais des années 80, capitaine de la garde royale. Joe rêve de vivre les mêmes aventures héroïques que son idole.

Elle vit dans un quartier populaire peuplé de marginaux, parfois tout droit sortis de l'asile. Parmi eux, il y a Roger, un vieux monsieur, solitaire, qui attend la mort. Entre les deux, une profonde amitié va naître.

La vie n'est pas facile. L'argent manque souvent et la petite Joe n'hésite pas à mettre la main à la pâte. Du haut de ses 8 ans, elle livre les journaux avant d'aller à l'école. Puis elle devient serveuse lors des soirées bingo. Un petit boulot difficile, mais Joe n'est pas du genre à se laisser abattre.

Et la vie suit son cours, avec son lot de malheurs : Roger doit être conduit à l'hôpital ; Margot, une des trois sœurs de Joe, se fait renverser par une voiture ; le père, professeur incapable de se faire respecter par ses élèves, sombre dans l'alcoolisme…

Et au fil des aventures de lady Oscar, Joe grandit, tandis que la mort rôde…

Alors, soyons honnêtes, il faut s'accrocher au début de , car les dialogues en québécois entre Joe et Roger ne sont pas toujours simples à comprendre pour nous autres, pauvres Français, même si un petit glossaire, en fin de roman, nous aide un peu. Mais quelle histoire tendre et touchante sur les désillusions de l'enfance ! Même si sa vie n'est pas toujours rose, Joe ne baisse jamais les bras, bien consciente qu'elle n'a finalement pas à se plaindre.

Après son succès au Québec (Mr Roger et moi a été finaliste en 2011 du Grand Prix du public Archambault, du prix France-Québec et du prix des Cinq Continents de la Francophonie), nous ne doutons pas que Marie-Renée Lavoie va séduire les lecteurs français, avant de s'attaquer à un public plus large puisque les droits cinéma ont été achetés. À suivre…

Brutes !!!

Cette magnifique séquence du Tour de Gaule d’Astérix est ce qui m’est spontanément venu à l’esprit à l’issue de la lecture de ce petit ouvrage collectif qui a fait pas mal le buzz lors de sa récente parution.

Derrière des témoins assez médiatisés par l’envergure de leur combat, comme Naomi KLEIN, sans pour autant en faire l’égérie d’un mouvement dans lequel de nombreux représentants des Première Nations du Canada sont également très largement impliquées, c’est de la destruction (« Brutes !!! ») d’une immense zone naturelle fragile, par des société internationales, pour en extraire des hydrocarbures (« Brut ! ») que traitent les témoignages de chacun des auteurs ayant collaboré à l’ouvrage.

Laisser-faire politique, aveuglement financier opéré par l’illusion de ce nouvel eldorado, cynisme entrepreneurial, inexpérience et isolement des Autochtones sont les ingrédients (pas les seuls malheureusement) de ce désastre que l’exploitation débridée des schistes bitumineux par de nombreuses compagnies pétrolières internationales dans le nord de l’Alberta, avec la complicité du Gouvernement Canadien, est en train de provoquer localement. Mais aussi, du fait de l’ampleur des opérations engagées, plus largement à une échelle mondiale.

L’occasion pour les auteurs d’en appeler au changement des mentalités, au changement de paradigme vis-à-vis de l’économie, de l’énergie, des ressources renouvelables et de l’environnement. Avec la remise en cause du concept du Throwing away (l’acte du « jeter », la notion de « déchet ») qui est le symbole de la civilisation capitaliste et néo-libérale ? Concept qui est totalement absent chez les autochtones d’Amérique du Nord (mais de bien d’autres endroits sur terre aussi) pour qui tout fait partie de cycle de la vie et s’intègre dans un processus d’utilisation circulaire où l’away n’existe pas.

L’occasion de montrer comment l’offre de ces emplois exilés permet aux entreprises de bénéficier d’une main d’œuvre totalement indifférente à l’avenir d’un sol que leurs pieds ne foulent que momentanément, le temps d’amasser assez d’argent et retourner vivre chez eux, dans un ailleurs qui a ainsi pu être préservé. Alors que les occupants historiques de ce sol dévasté n’ont plus d’ailleurs qui puisse les accueillir.

L’occasion de proposer une nouvelle réflexion sur le futur par la lunette du Small is beautiful.

Un livre à faire connaître partout autour de soi, même si, personnellement, je ne peux que regretter l’épaisseur du témoignage : si fin face à un sujet si épais.

Brutes !!!

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Katell ne respecte pas les règles de jeu les plus simples : on joue à cache-cache pour être trouvé, non pour rester dissimulé des heures entières. Katell n'invente pas des histoires de petites filles où une coccinelle se transforme en princesse. Non, elle « voit » des choses que les autres ignorent, ça lui passe par la tête. Mais est-ce un don ou une malédiction ? Ses parents s'inquiètent, se demandent si leur fille n'est pas devenue un peu « zinzin » ! Pourtant Katell est heureuse avec son monde à elle, alors pourquoi ne pas la laisser tranquille ?

Un album fort qui questionne l'imaginaire enfantin, la singularité comme un défi au monde adulte. Par les auteurs duTerrible six heures du soir.

Sylvie, à presque 16 ans, est en rupture totale avec sa famille. Elle se réfugie dans son monde et passe le plus clair de son temps à lire ou à rêver.
Thomas, lui à presque 18 ans, s'entend très bien avec son père mais tente de trouver sa place dans la société et de comprendre le monde qui l'entoure.
Sylvie habite en France, Thomas à Berlin. Leurs pères sont amis. La jeune fille ira donc passer l'été chez Thomas pour se changer un peu les idées.
Nous sommes en 1973.
Roman historique et roman d'initiation, est double. Il nous entraîne dans les profondeurs de la société berlinoise des années 70 et nous montre à quoi pouvait ressembler une ville coupée en deux par un mur. Loin des clichés, le personnage de Thomas se fait guide et fait découvrir à son amie Sylvie, tout ce qui a pu faire de cette ville un endroit à part. Elle se retrouve face à une jeunesse qui parle politique, révolte, théâtre alternatif, occupation américaine, nazisme. Elle traverse le mur aussi, et rencontre des habitants de Berlin Est entre satisfaction du aux conditions de vie et regrets quant à la diminution de leurs libertés et les inégalités crées.

Mais Berlin 73 est aussi un roman sur l'adolescence, ses angoisses, ses frayeurs, ses complexes et ses espoirs. Et c'est là tout l'intérêt du roman : faire découvrir une réalité historique mais aussi des sentiments universels. L'éveil de Sylvie au monde qui l'entoure est très moderne, seuls les acteurs et les conditions ont changés.
Marie-Florence Ehret signe donc un très joli roman, plein de douceur, d'émotion et d'humanité qui permet de parcourir une page d'Histoire en compagnie de personnages attachants.

Leïla Pelfresne