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Histoire régionale

Dictionnaire historique de la Franche-Comté sous les Habsbourg. Tome 2, les matieres. 1493-1678

Ce Dictionnaire historique de la Franche-Comté sous les Habsbourg (1493-1678) comprend trois tomes : Tome 1 : les personnages ; parfois connus ou célèbres, il s'agit surtout d'hommes et de femmes représentatifs de leur milieu social ou pro­­fessionnel. Tome 2 : les matières, dans tous les domaines : géographie, politique, diplomatie, administration, religion, économie, société, culture, art, sciences naturelles. Tome 3 : les lieux ; villes, bourgs, forteresses, abbayes, prieurés, etc. ; un atlas complète la présentation. Ce dictionnaire ambitionne de rassembler toutes les connaissances accu­­mulées par diverses recherches depuis une trentaine d'années. L'époque des Habsbourg a été peu étudiée. Il n'existe, pour l'instant, aucune synthèse globale, depuis le règne de Philippe le Beau ou celui de Charles Quint jusqu'à l'annexion de la province par le roi de France Louis XIV. Cinquante historiennes et historiens ont participé à la réalisation de cet ouvrage. Ce dictionnaire en trois tomes est d'abord un instrument de travail. Il ambitionne de rassembler toutes les connaissances accumulées par diverses recherches depuis une trentaine d'années. L'époque des Habsbourg a été peu étudiée. Il n'existe, pour l'instant, aucune synthèse globale, depuis le règne de Philippe le Beau jusqu'à l'annexion de la province par le roi de France Louis XIV. Tout reste à faire, grâce aux archives abondantes disponibles. C'est la raison pour laquelle nous avons accordé beaucoup d'importance à la bibliographie, aux livres et aux articles. Chaque notice est suivie, si possible, d'une ou plusieurs références. Chemin faisant, nous voulons aussi lever des malentendus, défendre quelques idées fortes, mettre en évidence des caractères originaux : La Franche-Comté, correspondant au comté de Bourgogne, n'était pas un Etat indépendant, autonome ou souverain, mais une province. Cette province était unie aux Pays-Bas (issus des anciens Etats bourguignons des ducs Valois), d'où l'abondance et la fréquence des liens avec les Flandres, terme familier pour désigner à l'époque l'ensemble des Pays-Bas. La Franche-Comté n'était pas espagnole ou hispanique mais elle avait des liens très étroits et très fréquents avec les souverains espagnols, puisque les comtes de Bourgogne étaient aussi (très souvent) en même temps rois de Castille et d'Aragon. En dépit de ce rattachement dynastique, la Franche-Comté ne fut pas hispanisée ; en réalité, les influences politiques, religieuses, artistiques, économiques, situent la province au coeur des liaisons entre les Pays-Bas (Malines, Bruxelles, Louvain, Lille, Arras, Tournai, Valenciennes, etc.) et les Etats de l'Italie du Nord (Milan, Gênes, Turin, etc.). L'hostilité envers le royaume de France n'empêchait nullement les échanges économiques et sociaux ; les possessions de fiefs de part et d'autre de la frontière, les déplacements de population, la fréquentation des universités françaises, les influences artistiques et les approvisionnements alimentaires (aux foires de Lyon et par la Saône, au port d'Auxonne) en témoignent. La "guerre de Dix Ans" n'a pas existé, pas en tant que telle ; il s'agit de la partie comtoise de la grande déflagration européenne appelée guerre de Trente Ans (1618-1648). Les liens entre la Franche-Comté et la couronne espagnole se sont fortement renforcés à partir de 1635 et surtout entre 1668 et 1678. Enfin, Besançon, cité impériale et métropole (siège d'un archevêché), était une enclave qui entretenait des liens étroits avec le comté de Bourgogne mais aussi avec les institutions de l'Empire des Habsbourg, notamment la Diète et la cour impériale.

05/2023

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Histoire internationale

Dans l'ombre de l'Occident et autres propos / Les Arabes peuvent-ils parler ?

Avec Yasser Arafat et Mahmoud Darwich, Edward W. Saïd est sans doute l'un des trois palestiniens les plus célèbre du XXe siècle. Bien que la plupart de ses textes soient traduits en français, la pensée de ce Palestinien de nationalité américaine, dont Tzvetan Todorov disait qu'il était l'un des intellectuels les plus influents du monde, est encore peu connue du public non académique francophone. À l'heure où éclatent les révolutions arabes, où les nationalismes s'affirment sans fard un peu partout en Europe, où la France est en proie aux polémiques sur « l'identité nationale », la pensée d'Edward Saïd s'impose dans toute sa puissance, son acuité politique, et permet de porter un regard critique sur l'actualité occidentale ; manière, en somme, de regarder sous le tapis d'un occidentalo-centrisme décadent. Blackjack éditions publie ainsi Dans L'ombre de l'Occident, titre générique d'un recueil de trois entretiens, inédits en français (extraits du recueil Power, politics and culture, interviews with Edward W. Saïd, publié en 2004 par Bloomsbury) qui offrent une approche transversale de l'univers d'Edward Saïd et permettent de comprendre comment le statut d'exilé est intrinsèquement lié au développement de cette réflexion originale. Edward Saïd parle depuis l'exil, sa parole est « entre mondes ». Et c'est de cette position qu'il critique les systèmes de représentations, la manière dont l'Occident construit des images de l'Orient, du Moyen-Orient. Il discerne, par extension, la manière dont l'Occident construit son rapport à l'Autre. Ces constructions se révèlent radicalement politiques, directement dominatrices. Edward Saïd montre ainsi comment la culture, dans son ensemble, est travaillée par les rapports de forces et d'instrumentalisation. Émanciper l'altérité au sein même des représentations, introduire la parole d'un Autre qui ne serait pas réductible ou manipulable, tel est sans doute l'enjeu majeur de l'oeuvre de Saïd dont il est question dans ces entretiens. « Pris entre “salamalecs” et “charabia”, les Arabes n'intéressent pas “le monde”. Les musulmans non plus. Si l'islam retient politiquement l'attention, le “monde arabe” est décor et paysage ». À travers ce texte au titre provocateur, Seloua Luste Boulbina, philosophe et politiste, ne se demande bien sûr pas si les Arabes sont, dans l'absolu, en capacité de parole, mais cherche des territoires où les paroles des Arabes peuvent trouver des résonances singulières dans une culture occidentale historiquement dominatrice. « Les frontières coloniales, écrit-elle encore, ne sont pas géographiques, elles sont avant tout humaines ». Dès lors, les « entre-mondes », concept forgé par Edward Saïd, ces lieux de l'art et de la littérature, deviennent un fil conducteur pour dire les déplacements et les migrations qui permettent de construire un langage commun et d'instaurer une réelle esthétique de la parole. Dans Les Arabes peuvent-ils parler ?, Seloua Luste Boulbina engage des dialogues, met en écho des voix aussi diverses que celles de Frantz Fanon, Sigmund Freud, Joseph Conrad, Edward Saïd, Hannah Arendt, Henri Michaux, Mallarmé, Arjun Appaduraï, Jean Josh Rabearivelo, Victor Segalen, Jacques Derrida, Frantz Kafka, Yoko Ogawa, Theodor Adorno, René Descartes, Samuel Beckett, Michel Foucault, Gilles Deleuze, Mahmoud Darwich, Sayed Kashua, Marcel Detienne, Amin Maalouf, Nietzsche, Joyce, Clément Rosset, Edgar Poe, Charles Baudelaire, Alexis de Tocqueville, Roland Barthes ou encore d'Ovide. La diversité des figures de l'exil met alors en question anciennes divisions coloniales et stéréotypes contemporains. Ici, les Arabes sortent de l'ombre, trouvent place dans l'expérience commune. Les philosophes, écrivains, poètes, artistes, exilés dans leur propre langue, seraient-ils tous des Arabes se demandant en français s'ils peuvent parler ? Entre esthétique et politique, le texte de Seloua Luste Boulbina est comme une respiration, au style précis, organique : il nous invite à tendre l'oreille.

11/2011

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Immigration

Vacances au bled. La double présence des enfants d'immigrés

- Un nouveau regard sur les transformations de l'immigration algérienne, en restituant conjointement les politiques d'Etats (Français et Algériens) et les contextes sociaux de part et d'autre de la méditerranée. - Une ethnographie concrète et attachante des descendant. e. s d'immigrés dans leurs voyages en Algérie et en s'appuyant sur une série de documents et d'objets orignaux : les usages des albums photographiques, de la maison, de la langue, du bronzage, du mariage... Débats politico-médiatiques et études scientifiques ont longtemps questionné l'appartenance à la nation française des enfants de l'immigration postcoloniale. Ce livre propose un renversement de perspective en étudiant le sentiment d'appartenance à la nation algérienne. Que signifie " être algérien " quand on a toujours vécu en France, et qu'on a gardé avec ce pays un lien surtout indirect, réactivé à l'occasion de courts séjours sur place, dans l'enfance et en tant qu'adulte ? Que vont chercher ces Français d'origine algérienne qui partent en Algérie à l'occasion de séjours de vacances ? C'est l'expérience binationale que ce livre entend éclairer en allant enquêter du côté du pays d'émigration des parents, en Algérie. Ce parti-pris implique aussi de s'intéresser aux politiques mises en oeuvre par l'Etat algérien à l'égard de ses ressortissants, politiques qui évoluent entre les années 1960 et les années 2000, et qui contribuent à remodeler l'idée du retour chez les descendants d'immigrés et leur famille. A partir d'un matériel original d'archives, des observations et des entretiens, cette enquête donne à voir comment les populations binationales vivent leurs sentiments d'appartenance. L'analyse des pratiques de vacances, et des discours qu'elles suscitent, permet d'accéder à une définition plus éclatée des identités : on peut se sentir davantage lié à une ville, un quartier ou un village qu'à un pays dans son ensemble ; des appartenances autre que nationales s'expriment dans ces séjours, en premier lieu des affiliations familiales. Plutôt que de se concentrer uniquement sur des " spécificités culturelles " potentiellement entretenues ou activées pendant ces séjours (langue arabe, religion musulmane), l'auteure analyse plus largement les manières d'être en vacances, incluant le style vestimentaire, l'emploi du temps de la journée, le type d'alimentation privilégiée, les modes d'hébergement ou encore les sociabilités. Ces pratiques vacancières se rapportent alors tout autant, si ce n'est plus, à la trajectoire sociale globale de ces personnes (origine sociale, niveau de diplôme, sexe, âge, situation familiale) qu'à leurs origines nationales. Enfin, ces appartenances renvoient plus largement à un double positionnement dans des hiérarchies de classe, de sexe et ethno-raciales partiellement disjointes, entre la société française et la société algérienne. Ce point de vue invite à faire éclater la fausse homogénéité de cette catégorie des " descendants d'immigrés " en constatant la différenciation des pratiques selon les trajectoires sociales familiales et individuelles. Parallèlement, cette approche implique d'appréhender autrement la société algérienne, en ne la définissant pas centralement par des critères culturalistes comme la religion (aujourd'hui vue comme l'opérateur central de distinction entre sociétés) mais en portant une attention particulière aux hiérarchies sociales propres à cette société. Les séjours passés sur place jouent le rôle de révélateur des dynamiques de mobilité sociale qu'occasionnent les déplacements entre deux sociétés nationales. Ce livre propose à la fois de voir comment les vacances passées en Algérie prennent des formes distinctes selon les caractéristiques sociales et sexuées des personnes rencontrées, mais aussi comment en retour, ces séjours modifient temporairement, ou de manière plus durable, leurs positions dans les rapports sociaux.

11/2021

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Histoire internationale

Géopolitique de la Côte d'Ivoire

Le 21 mai 2011 à Yamoussoukro, se tenait la cérémonie d'investiture du Président ivoirien Alassane Ouattara en présence d'une vingtaine de chefs d'Etat dont Nicolas Sarkozy et de Ban Ki-moon, Sécrétaire général de l'ONU. Cet événement qui symbolise le retour à la démocratie en Côte d'Ivoire intervenait après dix années d'une crise qui, d'économique était devenue politique puis globale, car au cours de ces deux dernières années on avait pu constater l'effondrement du pays dans pratiquement tous les domaines. Le refus pendant cinq ans de Laurent Gbagbo d'organiser des élections présidentielles puis sa volonté par la suite d'en ignorer le verdict parce qu'il lui était défavorable, laissera sans aucun doute pour longtemps des traces profondes et traumatiques dans ce pays qui avait été le phare de l'Afrique noire francophone au lendemain des indépendances. Faut-il rappeler que cette ancienne vitrine de la coopération française est encore aujourd'hui confrontée aux problèmes du sous-développement, en même temps qu'elle doit relancer une économie tombée au plus bas et rasséréner des esprits encore choqués par des souvenirs de pillages, d'exactions, de déplacements de population. Certes, le milieu naturel ivoirien est riche. Mais il est aussi en danger. Certes, la population du pays est jeune, dynamique, de plus en plus citadinisée. Mais elle est demeurée un puzzle d'ethnies encore trop souvent rivales, comme l'a montré la guerre civile qui a ravagé ces dernières années les espaces et les esprits. Pourtant, le père de la nation, Félix Houphouët-Boigny avait su en faire un pays en plein essor en choisissant dès le début de l'indépendance l'économie de marché alors que plusieurs de ses voisins s'enlisaient dans les déboires d'un socialisme à l'africaine, disparu aujourd'hui. De fait, ce sont des turbulences économiques qui ont provoqué peu après la mort du " vieux " la fin du " miracle ivoirien ", et ce, parce que le pays était sans doute trop dépendant des cultures de rente. Cette dégradation a eu pour conséquence une lente désagrégation des structures politiques de la nation qui s'est parallèlement traduite par l'émergence d'une forte hostilité vis-à-vis des étrangers. Le pays allait même jusqu'à connaître la guerre civile, la partition et le jeu de pouvoirs factieux. Cela est d'autant plus étonnant que la tolérance politique et religieuse avait auparavant facilité l'installation sur le sol ivoirien de plus de 4 millions d'immigrés. On a pu croire un moment, à partir des années 2007, que la reprise économique était au rendez-vous dans un contexte national et international apaisé. Il n'en fut rien et ces deux dernières années furent sans doute les plus mauvaises que les Ivoiriens aient connues depuis l'indépendance, malgré les efforts développés par le gouvernement d'Union nationale dans l'attente d'élections présidentielles sans cesse repoussées. Enfin organisées, elles donnèrent la victoire à Alassane Ouattara. Les troubles qui s'en suivirent menèrent la crise à son paroxysme. L'arrestation de l'ancien chef d'Etat donna un coup d'arrêt à cette descente aux enfers. Exsangue aujourd'hui, la Côte d'Ivoire devra se relever, panser ses plaies tant physiques que morales et retrouver son unité. C'est la tâche ardue qui attend le Président Alassane Ouattara. Il reste aussi à espérer que revenue à la démocratie, la Côte d'Ivoire puisse, aidée par des pays amis et les institutions internationales, reprendre en matière économique sa place de " poumon vital " de l'Afrique de l'Ouest. Le pari est difficile. Il peut être tenu.

06/2011

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Beaux arts

Les Cahiers de l'Agart N° 2 : Machine

Avant-Propos au seuil du visible ses propres dispositifs discontinus : montage, déplacement, épinglage, techniques mixtes etc. : le brouillon et la bouillie. La technique s'installe dans la forme : forme et technique s'assemblent en une "bouillie" où Deleuze voyait l'action propre au dispositif. Je d irai p lutôt u ne "émulsion" : u ne p art résiduelle de la forme, proprement technique et fonctionnelle qui n'accède pas au visible, poursuit sa course au coeur de la durée processuelle : elle a une vie propre et peut donc déployer ainsi un mode d'exposition autonome, en soi. En ce sens dispositifs et machines occupent la place de "l'esquisse" à ceci près que leur destination n'est pas d'être simplement au service du projet mais de créer un lieu nouveau de l'oeuvre, entre l'oeuvre elle-même et les conditions de sa réalisation. Ils sont ainsi une "nouvelle expression artistique" , ni dessin, ni peinture, ni sculpture, ni photo, ni cinéma, mais un lieu commun à toutes ses disciplines : à la fois "machine à comprendre" (expériences de Brunelleschi) et "machine à voir" (le Modulateur spatial de Moholy-Nagy). La mémoire, par sa nature même est le modèle intégrécomplexe de tout dispositif. Sa mécanique s'exerce depuis la plus ancienne antiquité, depuis Simonide de Céos jusqu'à Giordano Bruno, dans l'art de la rhétorique. Au Moyen- Age la Machina Memorialis e st un outil e ssentiel pour la pensée théologique ou philosophique, pour l'histoire, l'art et la poésie. Elle est sans doute la raison, en grande partie perdue aujourd'hui, de ce qui dans l'enluminure trame la lettre à l'image. Le collage adopte un grand nombre de ses fonctions, articulations, découpages, ainsi que sa structure faite de couches superposées. Il est aussi contemporain de l'invention de la psychanalyse et de La Recherche du temps perdu, deux modes de réactualisation de l'ar t de la mémoire. Le collage serait un troisième mode : l'inscription de la Machina Memorialis d ans le corps d e peinture. "Méditatif : Il est (tisonne-t-on), un art, l'unique ou pur . . ". . Mallarmé, "Crayonné au théâtre" . "Le mouchage de torche est la trace charbonneuse laissée par l'homme préhistorique après avoir frotté la torche sur les parois pour enlever la partie carbonisée qui asphyxiait la f lamme et la raviver". Si le dispositif est selon Deleuze "l'unité artificielle... d'un ensemble multilinéaire" , i. e. au minimum le lien construit (imposé par décision ou s'imposant de lui-même, par sa nature) entre au moins deux effets diffractés à partir d'une source commune, ne faudrait-il pas voir dans le "mouchage" le paradigme du dispositif pictural : une marque laissée sur une paroi de grotte avec la seule intention de ranimer le tison, et perçue dans un second temps comme trace, c'est-à-dire comme déjà du dessin ? Et si le dessin, tout au long de l'histoire, éclaire à sa manière, par la distinction des formes, c'est qu'il conserve en lui à travers son outil, le fusain et sa trace charbonneuse à la surface de la paroi, la mémoire du feu dont il est une mutation. A l'autre bout de l'histoire Matisse renouvelle la scène primitive dans une chambre, qui est une sorte de grotte, où, alité, on le voit tracer au plafond les figures de ses petits-enfants à l'aide d'un fusain attaché à une perche. On voit un même phénomène inaugural, la terre et l'eau pour médium cette fois, avec les traces de doigts creusant l'argile molle des parois de la grotte : d'abord une empreinte de la main posée accidentellement puis par insistance et répétition, par plaisir, le glissement de l'index dans l'épaisseur de la matière molle, poussant en avant et abandonnant sur ses bords le léger relief qui comme un talus ou les rives d'un ruisseau encadre sa marche en avant au but indécis. On retrouve ce doigt errant avec Miss Froy dessinant son nom dans la buée d'une vitre de wagon-restaurant. Ce nom -fantôme, apparaissant ou disparaissant selon le degré d'humidité ou de ventilation de la pièce est l'objet énigmatique de Lady vanishes d'Hitchcock. Le dispositif minimum conserve la "multilinéarité" qui a présidé à sa construction : il est maintenant le pivot de récits multiples que seule la résolution de l'énigme va réunir en un seul. Sans doute aussi la parole a erré longtemps dans le labyrinthe des sons purs et des onomatopées, jusqu'au Livre de Mallarmé. Face à ces dispositifs minimums fondamentaux et quasi originaires, à portée de mains, le collage introduit, historiquement et stratégiquement, une complexité maximale qui pulvérise la traditionnelle et antique unité et homogénéité du geste pictural en laissant affleurer

06/2019

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Sociologie

Pierre Bourdieu. Points de vue

Si la collection "Champ social" des éditions du Croquant réédite le n°47-48 de février -mars 2015 consacré à Pierre Bourdieu de la revue Regards sociologiques, c'est à la fois parce que ce numéro est devenu introuvable, mais surtout parce qu'il rassemble un dossier d'une grande diversité et d'une exceptionnelle densité. La revue Regards sociologiques avait consacré un numéro à Pierre Bourdieu pour honorer une dette symbolique à un chercheur dans lequel elle se reconnaissait et qui l'avait soutenue dès ses débuts, mais surtout parce qu'elle voyait, comme beaucoup d'autres, dans le travail de Bourdieu une contribution majeure au développement de la sociologie. Les contributions rassemblées dans cet ouvrage, agrémentées de l'oeuvre d'artistes qui se sont intéressés à Bourdieu, multiplient les perspectives sur son oeuvre : étude des conditions de production des enquêtes, des concepts et des modèles, développement des concepts-clés, construction d'un modèle cohérent de l'Etat, retour sur tel aspect de la domination masculine, explicitation de ce qu'implique un engagement politique réflexif, restitution de la vivacité de ses cours et de la cérémonie de remise de la médaille d'or du CNRS, exploration des rapports de Bourdieu avec l'oeuvre de Mauss, de Wittgenstein et de Marx, etc. Un premier ensemble d'articles montre dans quelles conditions Bourdieu réalise ses premiers travaux en Algérie où il est confronté aux effets du colonialisme, du racisme et de la guerre. La contribution d'Andrea Rapini retrace les déplacements de Bourdieu et de Sayad au cours de leur enquête sur Le Déracinement. Elle est complétée par un entretien de Tassadit Yacine avec Jacques Budin (un étudiant enquêteur de l'équipe de Bourdieu et de Sayad). Christian de Montlibert met en évidence un triple combat dans les travaux "algériens" de Bourdieu : contre la méconnaissance des cultures qui coexistent alors en Algérie, contre le mépris raciste et contre des conceptions politiques dont il pensait qu'elles risquaient d'obérer l'avenir. Dans le contexte des années 1980, Remi Lenoir s'interroge ensuite sur "le dit et l'écrit" dans l'oeuvre de Bourdieu : quel statut accorder aux transcriptions de ses cours et séminaires ? Comment restituer par écrit la vivacité verbale qui caractérisait Bourdieu enseignant ? A propos du discours qu'il prononce à l'occasion de la cérémonie de la remise de la médaille d'or du CNRS, Loïc Wacquant souligne l'accent qu'il met sur les tensions entre science, autorité et pouvoir, la puissance symbolique de l'Etat et les raisons qui conduisent le sociologue à s'engager dans le débat civique. Rémi Lenoir développe les différents niveaux impliqués dans le concept de capital social et montre l'importance qu'a eue pour Bourdieu l'oeuvre de Mauss. A propos du concept d'habitus Gaspard Fontbonne met en évidence les effets épistémologiques de la lecture de Wittgenstein. Quant à la domination masculine, Rose-Marie Lagrave éclaire les contradictions, paradoxes et malentendus engendrés par ce livre : il faut tenir compte, selon elle, du contexte scientifique et du rapport de Bourdieu aux recherches féministes. Un autre ensemble de travaux présente son modèle d'analyse de l'Etat et s'interroge sur l'engagement politique de Bourdieu. Patrick Champagne analyse le cheminement de Bourdieu pour penser la construction de l'Etat au fil d'un double processus de concentration des différentes espèces de capital dans un petit nombre de mains. En grande partie par le système scolaire, l'Etat unifie, homogénéise, standardise les manières de faire et de penser. A propos d'une intervention de Bourdieu sur la crise de l'Etat, Rémi Lenoir souligne l'importance qu'il attribuait aux transformations des représentations des agents dominants. Lucien Braun, alors directeur des Presses Universitaires de Strasbourg, questionne Bourdieu sur l'avenir de l'autonomie universitaire dans un contexte où l'édition universitaire est de plus en plus dépendante de groupes financiers. Cet ouvrage se clôture par des analyses de la dimension critique de la sociologie de Pierre Bourdieu qui n'a pas cessé d'insister sur la nécessité d'une démarche réflexive. Après avoir rappelé les prises de position "messianiques" de Marx sur l'avènement d'une société sans classes, Gérard Mauger souligne l'importance accordée par Bourdieu au "travail de représentation" dans toutes mobilisations collectives, à commencer par celle du "peuple" , objet de prédilection pour des intellectuels. Après avoir rappelé les confusions autour de l'appellation "sociologie critique" , Louis Pinto montre qu'elle n'est ni un accessoire, ni un abus de pouvoir, mais une sorte de nécessité qui conduit à s'interroger premièrement sur les pouvoirs, les limites et les prétentions de la connaissance, deuxièmement sur les capacités à dire le vrai des connaissances "indigènes" , troisièmement sur les effets de dévoilement de l'ordre social. Enfin ce livre est ponctué par le travail de deux artistes, Joëlle Labiche et Yves Carreau, qui offrent leurs interprétations des "regards" de Pierre Bourdieu : de ceux de prédécesseurs, de contemporains et de membres de ses équipes de travail.

10/2022

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Théâtre - Pièces

Théâtre 2002-2017. Tome 2

Ce volume fait suite à Théâtre 1987-2001 et reprend huit pièces de Pascal Rambert déjà publiées entre 2005 et 2017. Mon fantôme (cantate), Toute la vie, L'Art du théâtre, Répétition, Lac, Libido sciendi, Argument,. Mon fantôme (cantate) (2005) Où est la nuit ? qui m'aimera ? et la girafe ? et le grand cerf ? et les abeilles ? et l'ours et les colonies de choses volantes et rampantes ? et le ciel ? et l'étendue ? qui peindra l'étendue ? Pour s'endormir, un enfant s'invente un personnage imaginaire avec lequel il discute. Il l'appelle Mon Fantôme. Commande de France Culture, ce texte est à destination des enfants. Toute la vie (2007) Tu m'aimes je t'aime on s'aime on est qui quand on s'aime on est qui ? on est où quand on s'aime ? on est où ? on est qui ? on est devenu qui ? Ah ! parcourt le monde. Ah ! parcourt des formes artistiques. La question : "Qu'est-ce qu'être soi-même ? " rythme son voyage. Une seule réponse : "J'avance" . Pièce d'anticipation, Toute la vie est une fresque à jouer, danser et chanter dans le futur. L'Art du théâtre (2007) L'Art du théâtre est construite en parallèle de Toute la vie. Dans cette pièce, présentée tel un manifeste par Pascal Rambert, un acteur raconte l'art du théâtre à son chien cocker. Les deux textes peuvent être indépendants ou se monter ensemble, le premier étant comme un petit Dogma du second. Répétition (2014) Je suis issu du rêve de Denis qui lui-même est issu du rêve d'Emmanuelle qui elle-même est issue du rêve d'Audrey. Nous sommes chacun des habitants du rêve de l'autre nous croyons vivre dans le monde réel mais nous vivons notre vie nous la passons dans le rêve des autres Dans l'intimité d'une répétition de théâtre, quatre acteurs s'observent. L'un après l'autre, ils prennent la parole et enflamment une mèche dévastatrice qui ne s'éteindra qu'après que les mots aient accompli la tache précise qui leur était assignée. Lac (2015) Je pensais que je ne pouvais imaginer beaucoup on m'avait toujours dit ne rêve pas on m'avait toujours dit l'imagination c'est bien beau on m'avait toujours dit ce genre d'idioties or j'ai décidé de monter sur le théâtre pour combattre cela et ça me paraît aussi important en tout cas pas moindre que de s'engager sur des terrains de conflits réels dont la mort est la sanction Pascal Rambert a écrit cette pièce pour les étudiants comédiens de la Manufacture (Bachelor Théâtre, 2012-2015), après les avoir rencontrés. "Une histoire de langue mettant en ligne seize corps moins un face à la mort, au sexe et au crime" (PR). Libido sciendi (2015) Ils montent l'escalier ils s'arre^tent ils regardent le lustre Giacometti ils respirent elle enle`ve son tee-shirt il enle`ve le sien elle de ? boutonne son pantalon les pantalons tombent ils respirent je vois la rampe en fer forge ? dix-septie`me ils se regardent ils sont nus dans le grand escalier elle monte quelques marches elle respire il la regarde elle e ? tire ses bras elle respire ils regardent le lustre Giacometti Libido sciendi est une pie`ce de danse créée au festival Montpellier Danse en 2008, dans une mise en scène de l'auteur, réactualisée en 2014 au Musée Picasso à Paris. Argument (2015) Cessez voulez-vous Annabelle ce chant funèbre l'air est lugubre le ciel bas la nuit épaisse j'ai peur si je ferme les yeux j'entends j'entends si je me concentre bien fermez les yeux écoutez écoutez entendez-vous ces coups de canons ces tirs secs des fusils l'air comme un gaz porteur met dans nos oreilles les sons de Paris écoutez écoutez on s'y bat les murailles cèdent les corps tombent on dresse la barricade ça claque l'artillerie sera sortie elle aura anéanti vos amis aux grandes idées Argument renvoie à l'histoire de la Commune, au travers d'une scène tragique et magique où les convictions conservatrices s'opposent aux forces révolutionnaires, sur fond imaginaire de toile de Jouy. Une vie (2017) Pourquoi on va au théâtre ? Pour dévorer du visage. C'est des cibles mouvantes les acteurs. On les regarde. On les suit comme ça. Ces déplacements. C'est fantastique. On voudrait pouvoir les descendre comme des cols-verts en plein vol. Pan. Pan. Leur prendre leur jolie petite gueule et les fixer. C'est ça que je fais. Je fixe. Je fixe pour les autres. Pour que les autres voient. La porosité entre l'art et la vie, entre la vie et la mort, est au centre de cette pièce qui se déroule dans un studio de radio, le temps d'une émission monographique sur un artiste. Création par La Comédie-Française dans une mise en scène de l'auteur.

11/2023

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Poésie

Narcisse. Précédé du Dialogue du Prince et de la Chimère

Entre lyrisme, mysticisme et symbolisme : le "Narcisse" de Joachim GASQUET (1873-1921). Profondément philhellénistes ou cultivés, enclins aux questionnements de leurs époques, à la place que l'homme revêt sur terre ou encore habités par une étrange spiritualité, quelques grands artistes et écrivains ont revisité le cas Narcisse, mi-homme, mi-fou, mortel et divin, amoureux d'une image... Joachim Gasquet va lui aussi se pencher sur ce miroir, ce symbole : "ce mince monde" tel qu'il évoque à la fois la porte de la connaissance et le seuil d'un ailleurs, se focaliser sur l'hypothèse d'une Unité telle qu'elle n'existe qu'en nous ou plutôt dans l'instant suspendu de la révélation. Motivé par une lutte intérieure cherchant à réconcilier la réflexion et l'action et par celle extérieure offrant une controverse au symbolisme de salons, sa critique dérive en un chant gorgé de symboles innés, une cascade remplie d'échos, un hymne naturel et grandiose offert à la polyphonie des Idées. L'onde limpide renvoie l'image du corps mais aussi du microcosme intérieur en parfaite harmonie avec la nature, réfléchit le macrocosme et suggère la perfection qui les relie ; mais cette ressemblance (cet "à l'image du Tout") est fugace, insaisissable, l'effleurer suffit à la brouiller. Qu'en est-il alors de la vie, de la durée et de ce à quoi Narcisse aspire ? L'intérêt que l'auteur porte très tôt, aux Maladies de l'Imagination et sa découverte des cahiers verts d'un jeune aixois interné, vont donner légitimité à son lyrisme, lui permettre d'abuser des comparaisons, autoriser l'ambiguïté et provoquer la métaphore. Le langage devient passage, l'esprit de l'homme un verre transparent à mi-chemin entre la nature et le divin, et le "comme" s'efface au profit d'un déplacement, d'un monde vers un autre monde. L'imagination est en liberté, elle plonge, elle saute, elle défie le temps, elle enjambe les espaces brimés et confie ses résonances mystérieuses susceptibles d'interprétations multiples, elle métamorphose les préjugés. Est-il donc folie de se complaire en l'Amour puisqu'il est impossible ; folie de se réfugier en la Beauté perçue qu'on ne peut embrasser ; folie de s'acharner à maintenir la grâce en la Nature humaine ; folie de tenter une fusion entre panthéisme et monothéisme ; folie de recevoir autant d'informations simultanées, précises qu'on ne peut que parcimonieusement traduire ; folie de désirer le bonheur comme on rêve d'une femme, de le chercher à toutes les sources d'où pourra sourdre l'âme, la dulcinée, la quête... ? Joachim Gasquet appartient à ce Grand XXe siècle ébranlé politiquement et socialement, qui sort des guerres napoléoniennes, accumule les changements de régimes et se reconnaît dans un réalisme inspiré par les découvertes scientifiques ; il s'agit de peindre la société telle qu'elle est, entre cupidité et misère sociale, hérédité et modernité...Tout un programme contre lequel les poètes vont s'insurger... Entre 1891 et 1906, divers courants tentent de prononcer la mort du symbolisme et notamment celui que Mallarmé incarnait. L'Ecole romane, l'Ecole française, l'humanisme, le Naturisme, les Toulousains... tous participent finalement à l'essor d'une nouvelle vision, à cette unité possible entre l'homme et le monde, à cette harmonie musicale réconciliant le passé et l'avenir, la vérité et la beauté, les idéaux et leurs formes, le symbole et la vie. Le langage innove en rapprochant l'Antiquité, la nature, l'ésotérisme et les mystères, les légendes et les mythes, les sensations humaines et leurs correspondances qui deviennent synesthésie ! Quant au poète, il se fait mage ou chaman toujours investi de sa haute fonction visionnaire mais au service des Idées primordiales et du questionnement métaphysique (l'existence, l'essence, l'âme, l'origine et la fin...), il suggère et propose une énigme, il évoque les analogies infinies qui se tissent cachées entre le monde sensible et le Sens (entendu comme vérité ineffable -réalité de l'insensé), il dévoile alors une nouvelle langue ! Le romantisme allemand, avec Goethe ou le mysticisme de Novalis inspire ce possible contre-pied qui va justifier et conforter l'émergence du symbolisme de la fin du XIXe. Ce sera Maeterlinck et non Gide qui délivrera une traduction de Friedrich von Hardenberg (1772-1801) et qui inspirera le surréalisme. Tous se lisent et se côtoient, les salons vont bon train, la poésie classique est morte et le langage de la folie revendique le droit d'être plus "vrai" que le réalisme, d'être au plus juste s'il devient intuitif et ancré dans l'archaïque, le primitif, le légendaire, le mythologique, le passé, le rêve... Les "Narcisse" de Paul Valéry et Joachim Gasquet émanent de ce contexte, décliné en variations de 1891 à 1941 pour l'un, écrit et retouché de 1893 à 1921 pour l'autre. Tous deux symbolistes et disciples de Mallarmé, pétris par des Maîtres proches (André Gide ou Paul Cézanne), ou d'entourage (Edouard Manet et Frédéric Mistral), leurs destins de provinciaux se séparent pourtant dès 1894. Tandis que Valéry monte à Paris, délaisse la poésie et reste donc à l'écart des querelles (jusqu'à la parution de "La jeune Parque" en 1917), Gasquet lui, participe aux tentatives littéraires disparates de l'époque. Directement mêlé aux ascensions de groupes et aux dissensions, impliqué dans la direction de Revues, son syncrétisme poétique, philosophique et religieux ne sera pas compris qui englobe toutes ses lectures et toutes ses amitiés. Puis vient l'heure de la guerre également et Joachim lui seul, part et reviendra blessé, hors NRF, transformé encore et dédaigné ; maudit ? laissant à sa mort les fragments retouchés d'un Narcisse somptueux, pétales rassemblés et publiés à titre posthume par Edmond Jaloux en 1931. Le symbolisme réclame un "je" chercheur qui tente d'évoquer l'indicible, l'invisible, le voilé, l'étrangeté, l'indéfini et l'infini... il crée des ponts, rapproche des termes qui appellent des associations inédites, provoquent des connexions et convoquent l'irréalisé ! C'est ce que le poète et critique d'art aixois (ami de Paul Cézanne) nous propose en effet dans cette oeuvre lyrique délibérément rédigée en prose. Alors ce symbolisme tient au coeur plus qu'aux recettes de quelconques gloires, il est à NOUS TOUS, et s'éveille à la lecture d'oeuvres mystérieuses tel que le Narcisse de Joachim GASQUET, fussent-elles oubliées ou reconnues, anciennes ou à venir... Clarisse FRONTIN Publication web Apologie du poète Printemps des poètes 2016

12/2014

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Critique littéraire

Revue de littérature comparée N° 354, 2/2015 : Les Littératures du Nord de l'Europe

Sylvain BRIENS, La mondialisation du théâtre nordique à la fin du XIXe siècle. Le fonds Prozor de la Bibliothèque nordique de Paris lu au prisme de la sociologie de l'acteur-réseau, RLC LXXXIX, n° 2, avril-juin 2015, p. 137-150. Le fonds Prozor de la bibliothèque nordique de Paris témoigne de la percée du théâtre scandinave en France et en Europe à la fin du XIXe siècle. Par l'analyse du travail du traducteur Prozor, des porte-paroles et intermédiaires agissant comme médiateurs, des points de passage, cet article examine les mécanismes de diffusion internationale du théâtre nordique, il s'articule autour de trois acteursréseaux : Prozor dans sa fonction complexe d'agent littéraire ; Paris et ses chaines de traduction ; le réseau de théâtres libres dans sa fonction de diffusion mondiale du théâtre nordique. Thomas MOHNIKE, "Le Dieu Thor, la plus barbare d'entre les barbares divinités de la Vieille Germanie" . Quelques observations pour une théorie des formes narratives du savoir social en circulation culturelle, RLC LXXXIX, n° 2, avril-juin 2015, p. 151-164. En 1915, l'imprimerie d'Epinal, connue pour ses estampes amusantes, publia un résumé symbolique des événements de la première année de la Première Guerre mondiale. Sur cette gravure, le dieu norrois Thor est présenté comme le dieu du Kaiser allemand, détruisant des cathédrales gothiques et ainsi la civilisation. Thor symbolisait ainsi la nature prétendument barbare des Allemands. Cet article se propose de cartographier les chemins et opérations historiques qui conduisirent le dieu nordique Thor de l'Islande du XIIIe siècle en France du XXe siècle en le transformant en symbole de l'hostilité allemande. Des contextes importants sont l'Anneau de Nibelung de Richard Wagner et tout particulièrement la philologie comparée. Ces observations peuvent servir de point de départ pour une théorie des formes narratives du savoir social en circulation culturelle. Régis BOYER, Méditation sur Rosmersholm, RLC LXXXIX, n° 2, avril-juin 2015, p. 165-173. De l'avis de tous les connaisseurs, Rosmersholm (1886) est le chef-d'oeuvre d'Ibsen, même si ce n'est ni la plus connue ni la plus fréquemment jouée de ses pièces. On peut se demander pourquoi. Cette pièce, extrêmement difficile à jouer, est favorable à toutes les confusions ou erreurs d'interprétation possibles, pièce dont il est permis d'avancer qu'Ibsen n'est jamais allé aussi loin dans sa quête du tragique. Cet article cherche à élucider les modalités et les raisons d'un tel chef-d'oeuvre dans une perspective moderniste. Sans entrer dans la discussion sur le post-tragique, il s'agit de cerner ce qui fait en soi l'originalité moderne de cette étrange pièce. Corinne FRANCOIS-DENEVE, Anne Charlotte Leffler, dans l'ombre portée de Strindberg, RLC LXXXIX, n° 2, avril-juin 2015, p. 175-186. "Auteure" prolifique du "genombrott" suédois, "féministe" affichée, dont les pièces étaient davantage populaires que celles d'August Strindberg, Anne Charlotte Leffler a peu à peu disparu des anthologies de la littérature scandinave. En a-t-elle été chassée par des critiques phallocrates, comme ont pu le clamer les partisans des gender studies dans les années 1970 ? Son oeuvre était-elle trop datée ? La redécouverte récente de son théâtre, en Suède, puis en France, permet de recontextualiser cette "oubliée" qui a sans doute toujours des choses à dire. Harri VEIVO, Cosmopolite en crise. Décentrements de modernité et fractures de subjectivité dans les récits de voyage d'Olavi Paavolainen, RLC LXXXIX, n° 2, avril-juin 2015, p. 187-203. Dans les années 20 et 30, l'écrivain finlandais Olavi Paavolainen (1903-1964) s'est donné la tâche d'interroger et analyser la modernité dans toutes ses manifestations et dans tous les lieux où elle se fait ressentir. Ce projet l'amène à s'intéresser d'abord à la modernité jouissive et émancipatrice des années folles, ensuite à la montée du totalitarisme en Europe et, après ce tournant dysphorique, aux pays de l'Amérique latine, jugés capables de transcender les conflits européens. Les récits de voyage de Paavolainen produisent ainsi un décentrement de la modernité ; en même temps, ils expriment la crise de la subjectivité de l'auteur, fondée sur l'idéal européen du cosmopolitisme. Philippe CHARDIN, Un beau roman d'éducation estonien : Vérité et Justice d'Anton Tammsaare, RLC LXXXIX, n° 2, avril-juin 2015, p. 205-217. Le long chef-d'oeuvre de Tammsaare, écrit durant l'après-guerre et retraçant 50 ans d'histoire de l'Estonie, apparaît comme une synthèse extraordinairement originale de plusieurs genres européens différents parmi lesquels un roman rural dans sa première partie et un roman du Crime et du Châtiment, sorte de tragédie familiale du péché originel ; mais on remarque aussi de fortes analogies avec trois formes de romans d'éducation : un roman pédagogique tragi-comique à l'Ecole de M. Maurus, le roman d'une éducation sentimentale douloureuse et par-dessus tout un roman de la transformation d'un jeune homme qui vient de son village en intellectuel avec son ironie dévastatrice contre toutes les valeurs sociales et religieuses, sa "conscience malheureuse" et ses engagements à demi forcés dans la vie politique ou dans sa vie privée qui rappellent d'autres grands romans contemporains, de Musil, de Proust, de Thomas Mann et de Svevo. Frédérique TOUDOIRE-SURLAPIERRE, Phèdre et la Suède : un "décentrement de modèles" ?, RLC LXXXIX, n° 2, avril-juin 2015, p. 219-230. Cet article examine, à partir de la pièce de l'écrivain suédois, Per Olov Enquist, Till Fedra, les modalités et les enjeux de ce transfert culturel que constitue cette réécriture de la célèbre tragédie de Racine. Utilisant les ressources scientifiques de l'imagologie et de l'ethnocritique, cet article met en évidence les différentes opérations de ce que nous avons appelé un "décentrement de modèles" , par le biais de la déconstruction de la langue française, de l'oedipianisation du mythe, un transfert d'images et un déplacement de concepts. Mickaëlle CEDERGREN et Ylva LINDBERG, Vers un renouvellement du canon de la littérature francophone. Les enjeux de l'enseignement universitaire en Suède, RLC LXXXIX, n° 2, avril-juin 2015, p. 231-243. Même si la circulation de la littérature francophone est aujourd'hui en pleine expansion à travers le monde, sa diffusion et, par conséquent, sa place dans les circuits de canonisation, reste encore inégale. Cet article analyse la place octroyée aux lettres francophones dans l'enseignement universitaire du français langue étrangère en Suède. Proposant une réflexion sur le canon littéraire traditionnel et montrant la nécessité de reconsidérer sa valeur dans un contexte universitaire étranger, la Suède apparaît tantôt comme le pays promoteur de la haute-culture française tantôt comme le bastion des littératures francophones souvent contemporaines et/ou de la littérature couronnée de prix littéraires. Sylvain BRIENS, The globalization of Nordic Theatre. The Prozor collection at the Nordic library in Paris read through the Actor-network Theory, RLC LXXXIX (in French), no. 2, april-june 2015, p. 137-150. The Prozor collection at the Nordic library in Paris demonstrates the breakthrough of Scandinavian theatre in France and Europe at the end of the 19th Century. Through an analysis of Prozor's translations, the work of spokespeople and intermediaries acting as mediators, and points of passage this article will attempt to understand the mechanisms promoting Nordic theatre's international distribution. The study is centred on three actor-networks : Prozor in his complex function as literary agent ; Paris and its translation supply chains ; the network of free theatres in its role in the worldwide distribution of Nordic theatre. Thomas MOHNIKE, "The god Thor, the most barbarous of all barbarous gods of the Old Germany". Some observations for a theory of narrating forms of social knowledge in cultural circulation, RLC LXXXIX (in French), no. 2, apriljune 2015, p. 151-164. In 1915, the Epinal printing company, known for its often amusing illustrated one page prints, published a summary of the first year of the First World War, depicting the Old Norse God Thor as the god of the German Kaiser, destroying gothic cathedrals and thus civilization. Thor thus served as symbol for the supposedly barbarous nature of the Germans. In my article, I try to map some of the ways and historical operations that took the Old Norse god Thor from 13th century Iceland to 20th century France and transformed him to a symbol for German warfare. Major contexts appear to be Richard Wagner's Ring of the Nibelung and particularly comparative philology. These observations, I propose, could serve as a starting point for a theory of narrating forms of social knowledge in cultural circulation. Régis BOYER, Meditation on Rosmerholm, RLC LXXXIX (in French), no. 2, apriljune 2015, p. 165-173. In the opinion of all the experts, Rosmersholm (1886) is the masterpiece of Ibsen, even though it is neither the most famous nor the most frequently performed of his plays. One may wonder why. This piece, extremely difficult to play, supports all the confusions and errors of interpretation possible, and it is permitted to put forward that Ibsen never went as far in his tragedy quest. This article seeks to clarify how and why such a masterpiece in a modernist perspective. Without going into the discussion of the post-tragic, we try to identify what is in itself modern originality of this strange room. Corinne FRANCOIS-DENEVE, Anne Charlotte Leffler, the forgotten one, RLC LXXXIX (in French), no. 2, april-june 2015, p. 175-186. A prolific female writer belonging to the Swedish "genombrott" movement and a staunch feminist, Anne Charlotte Leffler, whose plays were even more successful than Strindberg's, slowly disappeared from Scandinavian literature anthologies. Did male critics expel her from them, as researchers in "gender studies" began to claim in the 1970s ? Or was it that her works were thought to be too old-fashioned ? Her theatre has been recently re-discovered, in Sweden as well as in France : it is high time to put again into perspective this "forgotten one" , who has still many things to say. Harri VEIVO, Cosmopolite in Crisis. Decentring Modernity and Fracturing Subjectivity in Olavi Paavolainen's Travelogues, RLC LXXXIX (in French), no. 2, april-june 2015, p. 187-203. In the 1920s and 30s, the Finnish writer Olavi Paavolainen (1903-1964) took up the task of exploring and analysing modernity in all its manifestations and in all the places where it was felt. This project focalised first on the emancipatory and joyful modernity of the années folles, then on the rising of totalitarism in Europe and, after this dysphoric turn, on Latin America, considered capable of transcending the European conflicts. Paavolainen's travelogues produce thus a decentring of modernity, while leading at the same to the crisis of the author's subjectivity, based on the European ideal of cosmopolitism. Philippe CHARDIN, Truth and Justice, a beautiful Estonian novel of education, RLC LXXXIX (in French), no. 2, april-june 2015, p. 205-217. Tammsaare's long masterpiece, written after the first world war and retracing 50 years of Estonian history, is an extraordinary and original synthesis of several different literary European genres among which in its first part a "Rural Novel" and also a novel of "Crime and Punishment", a kind of Tragedy of Original Sin in a family but there is also a strong analogy between Taamsaare's Justice and Truth and three kinds of Educational Novels : a tragi-comical pedagogical novel in Mr Maurus's College, a painful sentimental apprenticeship and above all the novel of a young man coming from his village who becomes an "Intellectual" with his devastating irony against all social and religious values, his "Unhappy Consciousness" and his half forced bad commitments in political or private life which recall other great contemporary novels by Musil, Proust, Thomas Mann, Svevo. Frédérique TOUDOIRE-SURLAPIERRE, Phaedra and Sweden : a "shift model" ?, RLC LXXXIX (in French), no. 2, april-june 2015, p. 219-230. This paper examines, from the part of the Swedish writer Per Olov Enquist, Till Fedra, terms and issues of this cultural transfer : the rewriting of the famous tragedy of Racine. Using scientific resources of imagology and ethnocritic, this paper shows the various operations of what we called a "shift model" through the deconstruction of the French language, the oedipalization of the myth, the image transfer and the movement concepts. Mickaëlle CEDERGREN - Ylva LINDBERG, Towards a renewal of the Francophone literary canon. The role of higher education in Sweden, RLC LXXXIX (in French), no. 2, april-june 2015, p. 231-243. Even though francophone literature is expanding its territory throughout the world, its status remains ambiguous on the global field and in canonization processes. The analysis is focusing on a re-evaluation of the literary canon in the academic context abroad. Various didactic demands are revealed as essential criteria for a selection divergent from the traditional canon. It is also found that Swedish universities promote both French high-status literature, extra-occidental francophone literature and prize-winning literature, which is often commercial.

09/2015