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Fessart

Extraits

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Poésie

Essart

Quelle est cette terre que Gabriela Mistral cherche à essarter, à défricher ? Celle de son Chili natal, de la Cordillère des Andes, des légendes Mayas ? Ou la terre des exils et des ombres ? Essart est un livre mystérieux ; on lit ces poèmes comme on marche sur une terre ouverte, dont on embrasse les sommets du regard, cheminant au plus près d'une parole dense et profonde, rustique et mystique. Gabriela Mistral hisse ses poèmes vers la fable, au moyen d'une langue bruissante d'hommes et de dieux, de traditions et de légendes, de dialectes archaïques. Nous sommes séparés, Mistral nous rassemble dans la circulation interne d'un pouls, d'un sang à la pulsation puissante qui a le mouvement d'un fleuve. On se perd dans un "hallali de pierres roulées" , au milieu des iguanes et des tortues, des cerfs et des colombes, avec cette étrange impression d'être "toujours blessé, jamais chassé" . Essart opère une transfiguration de l'enfance en odeurs, des fantômes en brumes, des hommes en paysages, des visages en fables, des peuples en fleuves, des corps en zodiaques et des dieux en rêves, en une lumière qui mystifie tout. Dans ces poèmes où vivre et mourir, dans cette confession plus vaste que soi, des profusions de monde aux "quarante points cardinaux" tiennent dans un mot, dans une langue habitée, c'est à dire peuplée de souvenirs, de charmes, de fleuves, d'oiseaux et de fleurs, de disparitions et d'esprits, vaste comme un horizon ou un ciel étoilé. Cette voix qui nous soulève vers la liberté, nous berce entre les épiphanies et les pleurs avec "le pur rythme tranquille des vieilles étoiles" semble ne jamais vouloir interrompre son chant, ne jamais briser le sortilège et c'est ce qui nous tient, nous emmaillote à ces lignes : la crainte d'une magie dissipée, le retour brutal sur la terre vide et nue, inconsolables de la fable. Aussi nous ne quittons ni les anges, ni le rêve de cette poésie qui "regarde le monde aussi familièrement que si elle l'avait créé".

08/2021

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Notions

Dialectique du bien commun. La pensée politique de Gaston Fessard

Gaston Fessard (1897-1978) fait partie des penseurs politiques qui se sont livrés à une actualisation de l'antique notion de bien commun. Cette actualisation, qui s'opère au croisement de la philosophie hégélienne et de la théologie chrétienne, confère à la notion de bien commun une fonction à la fois de compréhension historique et de discernement politique. Fessard montre par exemple en quoi la dialectique des catégories du bien commun explique la destinée des sociétés depuis la Révolution française jusqu'au conflit des idéologies qui traversent le XXe siècle. Il expose également la manière dont la dialectique de ses contenus fournit des critères pour juger du gouvernement de Vichy et fonder une résistance en conscience au pouvoir du maréchal Pétain. Cet ouvrage présente la pensée du bien commun de Fessard à travers ses sources (Thomas d'Aquin, Hegel et Marx) et concepts, son application durant la Seconde Guerre mondiale, les controverses dans lesquelles elle fut impliquée (avec Kojève et Mounier) ou par rapport auxquelles elle mérite d'être située (querelle du personnalisme). Il propose aussi une actualisation critique de cette pensée politique, quant au rôle international de l'Eglise ou encore aux exigences de la démocratie. Car Fessard n'invite pas seulement à jeter un regard rétrospectif sur de "sombres temps", mais également à examiner notre propre actualité historique.

04/2022

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Autres langues

Parlons pachto. Langue et culture de l'Afghanistan

Le pachto, ou "afghan", est une langue comprenant beaucoup de mots perses, indiens, turcs et arabes. Elle a une grammaire et un fonds lexical indo-européen plus archaïques que l'iranien (farsi). Ce manuel contient des clefs pour l'apprentissage des sons, une description des lettres et de leurs ligatures, des tables de déclinaison et de conjugaison ainsi que des exemples d'usage, quelques éléments de conversation que l'on retrouvera dans la cassette vendue avec ce livre. Outre l'étude du pachto - langue des Pachtounes ou Pathans, en Pakistan et en Inde - ce livre expose des faits relatifs à la civilisation originale de ce peuple de plus de 16 millions d'âmes, situé dans la zone de fracture des grandes puissances de l'Asie, au carrefour des invasions et du commerce.

01/1994

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Philosophie

Autorité et Bien commun. Edition revue et augmentée

Autorité et Bien commun est un des plus grands essais sur la destinée historique des sociétés humaines. Le Père Gaston Fessard (1897-1978) l'a rédigé durant les années noires de l'occupation allemande (1941-1942), publié après la libération (1944) et réédité en 1969. A partir des idéologies qui ont cherché à organiser le monde (Libéralisme, Communisme, Nazisme) avant de le conduire à une guerre totale, ce livre propose une réflexion sur les fondements de l'autorité et de l'obéissance, essentielles à toute communauté, et sur la nature des sociétés. Cette nouvelle édition critique - avec introduction, notes, index et documents annexes inédits - permettra au lecteur contemporain de comprendre pourquoi la crise des autorités institutionnelles et les fractures nouvelles d'une société pluraliste se déterminent mutuellement ; il découvrira aussi quelles sont les attitudes pour y remédier. Il pourra également réfléchir à la destinée du projet européen qui, si ses responsables persistent à minimiser ou pire à ignorer la réalité nationale, est voué à l'impuissance, voire à une nouvelle division entre les peuples européens, comme les régimes totalitaires l'ont engendrée dans une mesure monstrueuse. Enfin, le lecteur soucieux des questions internationales pourra avoir recours à l'analyse du Bien commun universel et à son principe de solution, sommet du livre, pour envisager un monde de plus en plus multipolaire qui, pas moins qu'en 1942 ou en 1969, recherche les modalités économiques, politiques et idéologiques de son unité. Peut-être reconnaîtra-t-il la pertinence rationnelle de la conception chrétienne de l'humanité et la nécessité du rôle historique de l'Eglise pour aider le monde entier à s'unifier pacifiquement.

01/2015

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Théologie

"Pax Nostra". Examen de conscience international

" La guerre vient ! Elle est à nos portes ! " C'est par ce cri que Gaston Fessard introduit en 1936 son premier livre : " Pax Nostra ". Examen de conscience international. A tous ceux qui pressentaient le conflit et qui éprouvaient en eux-mêmes la lutte entre nationalisme et pacifisme, Fessard proposait une méthode de discernement de l'actualité historique. Eclairée par une lecture de l'histoire à la lumière du mystère du Christ, " notre paix ", cette méthode fournit sept étapes de réflexion pour passer de la division à la paix. Le philosophe Gabriel Marcel put, en ce sens, écrire : " C'est un livre qui changerait quelque chose dans le monde si on le comprenait. " Quatre-vingt-six ans après, l'ouvrage n'a pas pris une ride. L'humanité se trouve de nouveau déchirée par des inimitiés qui menacent la totalité des personnes et des peuples. La division de l'ordre international s'accompagne encore d'une scission des consciences et des communautés. Longtemps reportée, la réédition de " Pax Nostra " éclaire nos épreuves de force. Elle relève d'un témoignage rendu à l'espérance et proposé aux hommes de bonne volonté.

03/2022

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Philosophie

Hegel, le christianisme et l'histoire

Condense cinquante ans d'une confrontation constante de G. Fessard avec Hegel et sa postérité chez Marx et Kierkegaard.

04/1990

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Notions

Dessillement

Se dessiller – ouvrir les yeux – sur l'inutilité de Dieu est une expérience qui vaut d'être partagée. Il faut d'abord ouvrir les yeux sur la condition humaine : les hommes ne représentent qu'une petite partie du monde des vivants et ce monde n'est qu'une infime fraction du gigantesque univers. Les humains ne participent que brièvement à l'énergie stupéfiante de la vie car, comme tous les vivants, ils sont les victimes de la finitude, leur mal. L'origine et l'expansion de l'univers ne supposent pas l'existence de Dieu, pas plus que ne la requièrent l'apparition et l'évolution de la vie sur la Terre. En conséquence, il faut ouvrir les yeux sur le besoin d'une morale sans Dieu, une morale de la vie dont l'objectif central est la lutte contre le mal criminel, le mal dont les hommes sont responsables.

02/2022

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Littérature française

Vingt mille ans sur la Terre

John vivait dans un monde parfait, où chacun était heureux, transporté d'allégresse et de reconnaissance. Mais lui se posait la question : pourquoi ? Pour trouver la réponse, il lui fallait quitter ces lieux idylliques, et affronter la réalité d'un monde où tout était relatif. John, appelé aussi Johnny ou même Jim, parcourut la Terre entière, à la recherche d'un ciel perdu, là où l'attendait le fantastique. Il connut l'amitié, la souffrance et l'amour et résolut bien des énigmes. Parcours initiatique aux réflexions métaphysiques, l'aventure de ce héros pas comme les autres questionne la nature humaine et les choix qui dessinent le destin de chaque homme.

01/2012

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Biographies

Fables choisies, mises en vers. Tome 1

Fables choisies mises en vers, par J. de La Fontaine, nouvelle édition gravée en taille-douce, les figures par le sr Fessard, le texte par le sr Montulay, dédiées aux enfans de France. Tome 1, Volume 1 Date de l'édition originale : 1765-1775 Le présent ouvrage s'inscrit dans une politique de conservation patrimoniale des ouvrages de la littérature Française mise en place avec la BNF. HACHETTE LIVRE et la BNF proposent ainsi un catalogue de titres indisponibles, la BNF ayant numérisé ces oeuvres et HACHETTE LIVRE les imprimant à la demande. Certains de ces ouvrages reflètent des courants de pensée caractéristiques de leur époque, mais qui seraient aujourd'hui jugés condamnables. Ils n'en appartiennent pas moins à l'histoire des idées en France et sont susceptibles de présenter un intérêt scientifique ou historique. Le sens de notre démarche éditoriale consiste ainsi à permettre l'accès à ces oeuvres sans pour autant que nous en cautionnions en aucune façon le contenu.

02/2023

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Littérature érotique et sentim

Les soeurs de Saïda

Le psychiatre Krafft-Ebing utilisa le mot " masochisme " pour nommer ce qu'il considérait comme une pathologie. L'oeuvre de Sacher-Masoch fut marquée par des scènes de son enfance, terreau fertile de son " masochisme " : les récits de sa nourrice, dans lesquels les femmes jouent un rôle prédominant ; sa tante humiliant et cravachant son époux ; ou fessant le jeune Léopold surpris en position de voyeur ; des prostituées ricanantes, des vagabonds enchaînés et passés à la schlague, tous les jours, sous ses fenêtres. Mais en réduisant l'homme à un concept, Krafft-Ebing a sans doute contribué à faire oublier l'oeuvre. C'est grâce au travail remarquable du philosophe Gilles Deleuze que Sacher-Masoch est aujourd'hui reconnu comme un grand écrivain. Dans Les Soeurs de Saïda, un prince renonce à tout pour vivre reclus et aux ordres de la fille d'un tenancier de bar, après avoir hésité entre elle, la froide Damaris, et sa soeur, la douce Jalta.

01/2016

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Littérature érotique et sentim

La pénitente

Le psychiatre Krafft-Ebing utilisa le mot « masochisme » pour nommer ce qu'il considérait comme une pathologie. L'œuvre de Sacher-Masoch fut marquée par des scènes de son enfance, terreau fertile de son « masochisme » : les récits de sa nourrice, dans lesquels les femmes jouent un rôle prédominant ; sa tante humiliant et cravachant son époux ; ou fessant le jeune Léopold surpris en position de voyeur ; des prostituées ricanantes, des vagabonds enchaînés et passés à la schlague, tous les jours, sous ses fenêtres. Mais en réduisant l'homme à un concept, Krafft-Ebing a sans doute contribué à faire oublier l'œuvre. C'est grâce au travail remarquable du philosophe Gilles Deleuze que Sacher-Masoch est aujourd'hui reconnu comme un grand écrivain. Dans La Pénitente, une ancienne pécheresse se repent de sa vie de débauche. Elle erre de ville en ville en portant une croix sur son dos et en suppliant qu'on la maltraite publiquement. Mais un doux jeune homme croise sa route…

12/2014

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Littérature érotique et sentim

Le palais de glace

Le psychiatre Krafft-Ebing utilisa le mot " masochisme " pour nommer ce qu'il considérait comme une pathologie. L'oeuvre de Sacher-Masoch fut marquée par des scènes de son enfance, terreau fertile de son " masochisme " : les récits de sa nourrice, dans lesquels les femmes jouent un rôle prédominant ; sa tante humiliant et cravachant son époux ; ou fessant le jeune Léopold surpris en position de voyeur ; des prostituées ricanantes, des vagabonds enchaînés et passés à la schlague, tous les jours, sous ses fenêtres. Mais en réduisant l'homme à un concept, Krafft-Ebing a sans doute contribué à faire oublier l'oeuvre. C'est grâce au travail remarquable du philosophe Gilles Deleuze que Sacher-Masoch est aujourd'hui reconnu comme un grand écrivain. Dans Le Palais de glace, une femme cruelle et perverse se débarrasse de son époux avec l'aide de son amant, en enfermant l'infortuné dans un bien étrange lieu, et en le promettant à un sort qui fait froid dans le dos.

01/2016

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Religion

Dieu Vivant (1945-1955). Christianisme et eschatologie

Cette monographie vient reconstituer l'histoire d'une revue prestigieuse, Dieu vivant (1945-1955), animée par Marcel Moré, Jean Daniélou et Louis Massignon, mûrie sous l'Occupation et dans la résistance, et qui accompagna par sa dominante théologique et sa spiritualité "eschatologique" les angoisses de la Guerre froide, la vogue de "l'existentialisme", les approfondissements du dialogue oecuménique et interreligieux et les renouvellements de la pensée catholique dans le moment préconciliaire. Entre Esprit (Mounier), Critique (Bataille) et Les Temps modernes (Sartre), très liée à l'itinéraire spirituel de son principal animateur Marcel Moré (1887-1969), la revue marqua l'un des principaux carrefours intellectuels du moment, laissant ensuite une trace profonde par la qualité et la variété de ses collaborations, le tranchant dialectique de ses positionnements et l'intensité de ses sommaires. Sartre, Bataille, Queneau ou Klossowski, Michel Leiris, Brice Parain ou Jean Hyppolite, mais aussi les Pères de Lubac, Fessard, Bouyer, Urs von Balthasar, Monchanin, Claudel, Maurice de Gandillac ou Gabriel Marcel ont croisé son histoire, à des titres divers, faisant ainsi de Dieu vivant le principal organe de la "nouvelle théologie" d'après-guerre.

10/2015

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Religion

Le Corps de l'Eglise. Suivi de Pour introduire à la lecture de La Promesse du cardinal Lustiger

Le corps de l'Église - cette Église à la fois pécheresse et rachetée, comme l'est le peuple de l'Alliance et comme le sera demain le genre humain, c'est Jésus-Christ répandu et communiqué. Dans cette nouvelle édition riche de textes, rares ou inédits du cardinal de Lubac. de Mgr Lustiger et du père Gaston Fessard, l'auteur montre comment l'Église poursuit sa mission dans la crise historique que nous vivons, marquée par deux événements majeurs : l'inculturation de la foi chrétienne en Afrique et en Asie et ce nouveau temps des païens " né de la sécularisation des anciens continents peuplés d'idoles qui ne sont que des objets du désir de l'homme : l'argent. le sexe, la puissance, la nature ou la culture sans le seul Dieu vivant et vrai. Le livre s'ouvre sur une réflexion consacrée à la constitution israélite de l'Église des Apôtres, qui éclaire le rapport de l'Église catholique à Israël. le sens de l'apostolicité et l'essence eschatologique de la loi chrétienne comme de l'espérance d'Israel. Croyants et incroyants, Juifs et catholiques ne pourront rester insensibles à une réflexion et à des propos qu'ils jugeront parfois déconcertants ou excessifs. Mais n'est-ce pas ainsi que se nouent le dialogue et la reconnaissance réciproque à mie heure de bouleversements qui engagent la création tout entière ?

11/2010

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XVIIIe siècle

Louis XVI. Secrets, ombres et mystères

Grâce à ses archives, Florence Mothe, journaliste et historienne, dévoile un Louis XVI méconnu. Depuis plus de deux siècles, on n'aurait pas dit toute la vérité sur la Révolution française. Certains documents et témoignages semblent avoir été dissimulés, pour répondre à des considérations politiques, ou pour raconter une histoire convenable, d'autres pour monter habilement la fable commode d'un peuple unanime contre son roi, d'autres pour ne pas révéler les traîtrises, les complots, les corruptions qui furent légion à l'époque comme dans toutes les périodes troublées. Certains historiens se sont-ils laissé abuser par le portrait que Louis XVI avait volontairement laissé ? Florence Mothe soulève la question et y répond. Bien loin du gros roi malhabile en tout et féru de métallurgie, l'auteure redessine le visage d'un Louis XVI surprenant, tel que l'ont connu certains de ses contemporains, tel que l'a apprécié et admiré son très informé ministre notamment de l'Intérieur, Antoine de Lessart, dont les archives sont conservées au château de Mongenan, à Portets (Gironde) où il est né, propriété de l'auteure. On découvre un Louis XVI intelligent, cultivé, calculateur, manipulateur, corrupteur, malheureux, et amoureux. Le lecteur ira, avec ce livre, de surprise en surprise et découvrira surtout un des plus grands souverains que la France ait connu.

03/2023

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Poésie

Pressoir

Seize années séparent la publication d'Essart (Unes, 2021) de celle de Pressoir. Seize ans marqués pour Gabriela Mistral par des déchirements collectifs - la seconde guerre mondiale - et intimes - le suicide de son fils adoptif Miguel à l'âge de 17 ans. C'est pourquoi Pressoir, paru en 1954, dernier livre que publiera Mistral avant sa mort trois ans plus tard, est à ce point marqué par la séparation et l'arrivée, la construction et la défaite. Sentiment renforcé par les errances successives dues à sa fonction de consul. Si la capacité de transfigurer le monde, d'imprégner la terre de sacré et de mythologies qui soulevait les poèmes d'Essart semble avoir disparu de ce livre plus solitaire, c'est que la métamorphose est ici plus secrète, plus animale. L'immense bestiaire a disparu, il ne reste que la biche et le coyote. Les vallées et les fleuves sont loin, il ne reste que les murs de la maison. Livre intérieur, livre de portes, de fenêtres et d'escaliers, livre de fer et de ciment : "nous avons remplacé l'univers par un mur et une conversation" , dit Mistral qui cherche les êtres aimés dans le noir d'une vie qui s'en va. La langue et l'espace se sont resserrés, les vers raccourcis, les poèmes acérés, leur souffle se fait plus bref. Le monde est nu et écorché, plein d'arbres brûlés, "maintenant je vais apprendre le pays de l'âpreté" dit-elle en glissant d'un poème à l'autre, entre deux buées, semblant s'enfoncer toujours plus loin vers l'autre rive, la rive inconnue de la disparition et des retrouvailles rêvées. Mistral convoque toute la force du deuil, du souvenir et de l'amour, convoque au fil de poèmes bouleversants les visages chers, les dernières promesses de pitaya et de menthe, de pain et de sel. Et même si les "fruits sont sans lumière" , même si "la lumière est malade" et que les regards perdus sont "de pure absence et d'exil" , la poète chilienne fait là sa dernière ronde avant minuit, son ultime vagabondage dans sa terre désolée - "rase patrie, rase poussière" - ¬elle puise dans son coeur esseulé et dans le sentiment d'abandon qui l'envahit la beauté d'un dernier chant. La parole est difficile, préservée au creux de la main comme une flamme légère, fragile dans la nuit du givre. Le resserrement de la langue n'est pas un tarissement de l'inspiration, des puissances exceptionnelles qui traversaient ses précédents livres, mais "un rêve qui chemine" , une réduction du poème à son seul espace possible dans un monde qui se referme. Réduction à l'essentiel d'une parole rare dont Gabriela Mistral, danseuse qui danse "la danse de la perte" , préserve et transporte la lumière pour transmettre son dernier message terrestre avant la nuit.

09/2023

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Religion

Sommes-nous sortis de la crise du modernisme ? Enquête sur le XXe siècle catholique et l'après-concile Vatican II

A la fin du XIXe siècle et au début du XXe, face à l'effervescence intellectuelle et sociale du monde européen, l'Eglise catholique vit repliée sur elle-même. Se sentant menacée par les remises en cause de la culture moderne, elle campe sur sa doctrine déclarée immuable. De l'intérieur cependant et en France notamment, des chrétiens prennent l'initiative de repenser le christianisme dans les domaines historique, biblique, philosophique, théologique et social. Leur objectif, c'est de faire entrer l'Eglise catholique dans la modernité afin d'actualiser l'Evangile en leur temps. L'historien Louis Duchesne, le bibliste Alfred Loisy, les philosophes et théologiens Maurice Blondel et Lucien Laberthonnière, le scientifique Edouard Le Roy, le militant social Marc Sangnier sont les grandes figures de ce mouvement. Rome prend peur. Les acteurs de cette renaissance prometteuse, que leurs adversaires nomment "les modernistes", sont condamnés, voire excommuniés. Le pape Pie X (1904-1914) met en place dans toute l'Eglise un système de contrôle pour couper court à la résurgence possible du péril "moderniste". Pendant cinquante ans (1914-1960), le catholicisme sera ainsi soumis à une chape de plomb sous les pontificats de Benoît XV, de Pie XI et surtout de Pie XII. La pensée officielle s'impose avec une redoutable fermeté. Les novateurs, notamment les membres des célèbres Ecoles dominicaine du Saulchoir et jésuite de Fourvière, sont les cibles de la nouvelle inquisition. Les théologiens Chenu, Féret, Congar, De Lubac, Fessard, Teilhard sont ainsi destitués et même exilés. La traversée est rude pour tous ceux qui s'essaient à revivifier le catholicisme. Arrive le concile Vatican II initié par Jean XXIII. En dépit d'ouvertures et d'innovations, la doctrine dogmatique et morale sous-jacente demeure en très grande partie traditionnelle. Les questions posées par "la crise moderniste" restent sans réponse. Peu d'années après la clôture du concile, une régression s'opère sous Paul VI et va s'accentuer sous Jean-Paul II et Benoît XVI. Face à cette situation verrouillée et qui le demeure sous le pape François, de pensée classique bien que soucieux d'ouverture aux personnes marginalisées, la nécessaire mutation du catholicisme reste-t-elle possible ? A quelles conditions, les questions des "modernistes" pourraient-elle être prises en considération ?

11/2016

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Autres philosophes

Une pensée en exil. La philosophie de Rachel Bespaloff

Ceux qui l'ont rencontrée (Léon Chestov, Benjamin Fondane, Jean Wahl, Gabriel Marcel, Gaston Fessard, Jean-Paul Sartre...) l'ont considérée comme une femme d'une intelligence extraordinaire et d'une pénétration exceptionnelle ; pourtant, Rachel Bespaloff (1895-1949) est une philosophe encore presque inconnue. La rareté des textes qu'elle a publiés de son vivant, son existence trop précocement interrompue, la difficulté qu'il y a à la ranger dans une école particulière de pensée, n'ont pas contribué à sa notoriété. Ce n'est que récemment, et de façon confidentielle, qu'on a assisté au phénomène discret de la redécouverte - ou de la découverte pure et simple - d'une personnalité qui compte au nombre des plus représentatives de la culture européenne de l'entre-deux guerres. Rachel Bespaloff naît le 14 mai 1895 à Nova Zagora, en Bulgarie, et meurt le 6 avril 1949 à Mount Holyoke, une petite ville du Massachussets. Enfant d'une famille cultivée d'origine juive de l'Ukraine (le père, Daniel Pasmanik, était un membre éminent des cercles sionistes, et sa mère, Deborah Perlmutter, avait un doctorat en philosophie), elle vie ses deux premières années d'enfance à Kiev, puis passe son adolescence à Genève, où elle obtient un diplôme de piano et montre un talent hors du commun, au point qu'en 1919 on lui offre une chaire prestigieuse d'enseignement de la musique et de l'eurythmique à l'Opéra de Paris. En 1925, elle décide d'abandonner une carrière musicale qui semblait très prometteuse pour se consacrer entièrement à une sorte de " réveil philosophique " provoqué par la rencontre de la pensée existentialiste du philosophe ukrainien Léon Chestov. Dès lors, Rachel Bespaloff devient l'interlocutrice et la confidente privilégiée de nombreux penseurs d'orientation libérale, comme Benjamin Fondane, Daniel Halévy, Gabriel Marcel, Jacques Schiffrin, Boris de Schloezer ou Jean Wahl, qui louent chez elle des qualités de penseur raffiné et subtil. En 1930, la philosophe ukrainienne doit quitter Paris pour déménager à la Villa Madonna à Saint-Raphaël, où elle commencera bientôt à se sentir coupée de la ferveur intellectuelle de Paris et à souffrir de la solitude. Elle écrit pendant cette période une étude aussi lumineuse que serrée sur Etre et Temps, qui est l'une des premières discussions philosophiques - sinon la première - du livre de Heidegger publiée en français. Suivent d'autres essais sur Marcel, Malraux, Green, Kierkegaard, Nietzsche, Chestov, qui seront repris plus tard dans le volume Cheminements et Carrefours, publié en 1938. Pour échapper aux lois raciales, Rachel Bespaloff doit émigrer en juillet 1942 avec son mari, sa fille et sa mère, d'abord à New York, puis à Mount Holyoke, où elle travaille comme chargée de cours de Littérature française. Elle achève la même année la rédaction de ses Notes sur l'Iliade qui aboutiront à son second et dernier livre, intitulé précisément De l'Iiliade : des réflexions pénétrantes sur les raisons fondamentales de la guerre et sur l'ambivalence des objectifs et des valeurs qui caractérisent les héros homériques (la même année exactement, Simone Weil, relisant le poème d'Homère, écrira elle aussi L'Iliade, poème de la force ; une coïncidence d'intérêts et de recherches unit de façon aussi extraordinaire que remarquable les deux philosophes). Peu avant sa rencontre programmée et volontaire avec la mort, Bespaloff écrit quelques articles sur Van Gogh, Camus, ainsi qu'un essai développé, mais malheureusement inachevé, sur Montaigne, qu'elle intitule L'instant et la liberté. Même si elle connaît en apparence une période de grande créativité et de succès indéniable, auprès notamment de collègues et d'étudiantes qui ont pour elle la plus grande estime, elle vit ses années de séjour aux Etats-Unis comme un exil devenu progressivement insupportable. L'inconfort, la solitude l'emportent : sans laisser de trace ni autoriser d'explication " rationnelle ", elle décide brusquement de mettre fin à ses jours en ouvrant le gaz de sa cuisine. Elle a 54 ans. A la lumière des principaux événements qui ont marqué la biographie de Bespaloff, l'élément le plus significatif à prendre en compte pour étudier l'oeuvre est sans aucun doute l'exil : c'est lui qui résume le mieux en une réalité qui est aussi un rapport à l'existence l'expérience que Bespaloff a connue. Celle-ci doit en effet faire l'épreuve à maintes reprises de la condition d'exilé. Mais il y a plus important encore que les données objectives, qui montrent un exode incessant : la perception subjective de son état par la philosophe. C'est bien comme la sienne propre, c'est-à-dire plus profondément encore ne l'imposent des circonstances dramatiques, qu'elle vit la condition de l'exilé, de l'apatride, du réfugié, de celui qui est sans cesse, quoi qu'il fasse, en voyage, toujours en quête d'une terre qui lui reste interdite, lointaine et inaccessible. On trouve ici, dans toute son évidence, une correspondance impressionnante entre les trois ordres de réalité que sont les principaux épisodes de sa vie, l'histoire et le destin du peuple juif dont elle revendique l'appartenance, et les modalités spécifiques de sa recherche. Loin de toute adhésion à l'existentialisme, dont elle critique sévèrement, au contraire, la tendance à cristalliser en des stéréotypes doctrinaux l'indispensable référence à l'existence, mais aussi sans réduction possible à toute autre position philosophique, la dimension qui reflète le mieux la personnalité théorique originale de Bespaloff est celle de l'exode, de la recherche inlassable d'un point d'ancrage, qui n'est jamais définitivement atteint. La particularité de sa réflexion tient en effet au dialogue serré qu'elle mène avec les " sommets " de la pensée contemporaine, et à ses réticences à se reconnaître inconditionnellement dans une orientation spéculative déterminée. Son débat, direct et indirect, avec des penseurs comme Wahl, Marcel, Heidegger, Weil, Montaigne, Augustin, Chestov, Kierkegaard, Nietzsche - pour ne citer que les plus importants - dessine un itinéraire intellectuel qui prend la forme programmatique d'une confrontation acharnée et presque éperdue. Le seul " point fixe " auquel elle parvient dans sa " pérégrination " philosophique incessante, c'est celui de la " pensée tragique " que font percevoir les vers de l'Iliade : avec les textes bibliques, ils représentent pour elle le point le plus élevé de l'expression poétique. La voix des Tragiques, celle des prophètes qui s'élèvent de la Bible, dans l'analyse qu'elles font des faits et des causes qui mettent brutalement l'homme en face de l'événement de la guerre et de l'origine du mal, l'enjoignent d'adopter une attitude de profonde humilité devant le réel et l'existence, puisqu'il est totalement impossible de supprimer les aspects conflictuels qui caractérisent le monde. Une attitude de grande compréhension et de communion difficile (entre espoir et désespoir) avec la réalité sensible, qu'il faut comprendre et accepter dans son ambivalence constitutive. Reste donc décisif, si l'on sait l'écouter, l'avertissement qui se renouvelle à chaque fois qu'on s'abandonne à la lecture d'Homère et des Prophètes : c'est une réalité profonde et tragique qui sous-tend la vie humaine, dans ses contradictions, ses luttes, ses principes de destruction sans solution possible. Seule la musique, d'après Bespaloff (et là aussi, c'est bien une " pensée-biographie " qu'on voit à l'oeuvre), permet de retrouver les moments de vérité profonde et de n'y pas succomber ; c'est à travers elle qu'elle cherche des affinités et des relations entre les différents penseurs. La musique représente l'une des modalités principales, sinon exclusives, de relation avec la transcendance. C'est spécifiquement dans le désaccord harmonique, dont le rythme musical est l'expression, que Bespaloff identifie le témoignage d'une transcendance à la fois nécessaire et paradoxalement inatteignable. Dans le mouvement musical, se réalise avant tout un équilibre capable d'adoucir la fuite désespérante du temps dans une sorte d'unité extatique : l'instant parfait, ce présent authentique soustrait à la dispersion, et comme tenu dans la même main que le passé et le futur. La vérité ne peut donc être révélée que dans la dimension musicale de l'instant - à condition de préciser que celle-ci ne coïncide nullement avec un état d'âme idyllique : il lui faut au contraire, pour exister, reconnaître tragiquement l'échec existentiel auquel l'homme est condamné depuis toujours. Dans l'instant, l'homme transcende les émotions mêmes dont il est personnellement traversé pour s'élever à la question radicale et tragique du sens de l'existence. Le livre de Laura Sanò propose la première vision d'ensemble d'une grande protagoniste du débat philosophique au xxe siècle, et tâche précisément d'en faire percevoir la dimension. A l'auteur, écrit Remo Bodei dans sa préface, " on doit reconnaître le grand mérite d'avoir mené sa recherche en reliant organiquement deux plans distincts. D'un côté, l'analyse rigoureuse des textes auxquels Rachel Bespaloff a confié sa pensée, arrachée ainsi à l'oubli presque complet où était tombée depuis plus d'un demi-siècle sa "pensée nomade". De l'autre, la reconstruction très documentée du contexte historique dans lequel prend place la recherche de la philosophe ukrainienne. " L'intention de Laura Sanò a donc été de scruter les noyaux théoriques de la réflexion de Bespaloff, pour faire apparaître la remarquable singularité de son positionnement intellectuel, et pour mieux comprendre par ailleurs de quelle manière se rencontrent en lui les avancées les plus significatives de la recherche philosophique contemporaine. En ressort le portrait d'une personnalité philosophique d'une finesse et d'une vigueur exceptionnelles, attentive à toutes les nouveautés théoriques, et prête à chaque instant à tout remettre en discussion, à commencer par elle-même ; le portrait d'une femme raffinée et complexe, qui a su mettre au centre de sa vie une authentique recherche de la vérité, inconditionnellement.

05/2023